Cet obscur «PSP» qui change nos vies

Sommet de Montebello - 20 et 21 août 2007


Le président américain George W. Bush s’entretient avec le premier ministre Stephen Harper et avec le président mexicain Felipe Calderón au sommet du G8. (Photo AFP)


André Noël - Connaissez-vous le PSP? Oui, bien sûr, il y a la PlayStation Portable de Sony. Mais soyez francs: connaissez-vous le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité? Bon, c’est vrai, ce PSP est moins amusant, sinon pas amusant du tout, si bien que les initiés sont peu nombreux. Parmi eux: Stephen Harper, George W. Bush et Felipe Calderón. C’est pour le fignoler qu’ils se rencontrent à Montebello, les 20 et 21 août.


Il s’agira de la troisième rencontre annuelle des dirigeants du Canada, des États-Unis et du Mexique. La première a eu lieu à la résidence personnelle de George W. Bush à Waco, au Texas, en 2005 (avec Paul Martin et Vicente Fox). C’est là qu’a été lancé le PSP, lequel prévoit justement des rencontres au sommet chaque année. La deuxième s’est tenue à Cancún en mars 2006.
Le but officiel du PSP: «accroître la coopération entre les trois pays dans le domaine de la sécurité et au niveau économique». Ces mots ronflants veulent vraiment dire quelque chose. Le PSP vise à élargir l’ALENA, l’accord de libre-échange nord-américain. C’est un cadre de discussion formel menant à de nouvelles ententes sur une foule de questions, des plus banales aux plus stratégiques, et à l’harmonisation de plusieurs règlements.
Des opposants, de gauche et de droite, croient qu’il aboutira à une perte de la souveraineté et de l’identité nationales. Sornettes! rétorquent ses partisans. Quoi qu’il en soit, c’est important. Hélas! le plus important se déroule derrière des portes closes, ce qui explique aussi pourquoi si peu de gens en ont entendu parler.
Entre les rencontres au sommet, les discussions se font entre ministres, hauts fonctionnaires et dirigeants de grandes entreprises. Certaines portent sur des dossiers majeurs, comme l’exportation de pétrole et d’eau du Canada vers les États-Unis. D’autres groupes de travail se concentrent sur l’établissement de listes de voyageurs jugés dangereux à bord des avions, sur la préparation à une épidémie de grippe aviaire, sur le passage accéléré des camions aux frontières, etc. Le PSP a déjà accouché de 300 «initiatives». Plusieurs auront un impact sur votre vie.
Adieu Kyoto!
C’est dans le cadre du PSP que s’est tenue une rencontre cruciale à Houston, en janvier 2006. Des représentants de l’industrie pétrolière et des gouvernements américain, canadien et albertain formulaient alors cette recommandation: multiplier par cinq les exportations du pétrole extrait des sables bitumineux de l’Alberta vers les États-Unis.
Six mois plus tard, Stephen Harper y donnait suite: «La production des sables bitumineux de l’Alberta – les deuxièmes réserves (de pétrole) établies de la planète – s’établit à plus d’un million de barils par jour et atteindra les quatre millions d’ici 2015», déclarait-il à l’Economic Club de New York. Adieu Kyoto! Une armée d’ingénieurs travaille maintenant à la création d’un énorme pipeline pour diluer tous ces sables bitumineux et les envoyer dans des raffineries américaines.
Une autre importante rencontre s’est tenue à Calgary en avril dernier entre les représentants du Canada, des États-Unis et du Mexique, toujours dans le cadre du PSP. Celle-ci portait sur le «North American Future 2025 Project». Un des ateliers abordait « la consommation d’eau, les transferts d’eau et les dérivations d’eau en vrac», dans le but d’atteindre «une utilisation optimale de l’eau (en Amérique du Nord)».
Selon un document interne obtenu par le Conseil des Canadiens, le but du projet 2025 est de «renforcer la capacité des fonctionnaires canadiens, américains et mexicains et de leurs gouvernements respectifs à analyser, comprendre et prévoir l’intégration de l’Amérique du Nord». Il évoque l’exportation d’eau canadienne aux États assoiffés du Midwest américain.
Alertée par ce document, la Chambre des communes a adopté une motion excluant l’eau des ententes de libre-échange par un vote de 134 voix contre 108, le 15 juin dernier. Les députés conservateurs ont voté contre la motion et pourraient la renverser s’ils devenaient majoritaires.
Autre exemple d’initiative du PSP: l’harmonisation des règlements sur les pesticides. Dans un rapport daté de l’an dernier, le secrétariat du PSP qualifie de «barrières aux échanges» les différences entre les limites de résidus de pesticides utilisées par chaque pays. L’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire du Canada (ARLA) estime désormais qu’il s’agit d’un irritant et a entrepris d’ajuster sa réglementation, au cas par cas.
Actuellement, 50% des produits chimiques utilisés en agriculture répondent à des normes communes au Canada et aux États-Unis. Dans 40% des cas, les normes sont plus sévères au Canada. Cela va changer. L’ARLA prévoit une hausse des limites acceptables de résidus de certains pesticides et une baisse pour d’autres.
» Pour en connaître davantage, consultez le site du gouvernement canadien au [www.psp-spp.gc.ca/menu-fr.aspx->www.psp-spp.gc.ca/menu-fr.aspx]. Il vous dirigera vers les sites américain et mexicain.
» Pour un point de vue critique, cliquez sur le site du Conseil des Canadiens: [www.canadians.org/francais/index.html->www.canadians.org/francais/index.html]
» Pour un point de vue favorable, lisez les communiqués et discours du Conseil canadien des chefs d’entreprise : www.ceocouncil.ca/fr/, ainsi que les textes du Council of the Americas : [www.americas-society.org/coa/NACC/indexNACC.html->www.americas-society.org/coa/NACC/indexNACC.html]


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