Ce qui va changer après la crise sanitaire mondiale

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Et si au contraire, la pandémie renforçait le mondialisme onusien ?


La crise sanitaire actuelle nous fait prendre conscience d’une certaine fragilité du monde. Fragilité de la croissance effrénée, fragilité des acquis en matière de bien-être matériel et même de confort, fragilité des épargnes, fragilité de la sécurité sanitaire. C’est le premier enseignement que nous retiendrons de la présente crise. Cette prise de conscience de la fragilité du monde devrait aussi contribuer à mieux faire accepter l’idée, chez ceux qui n’en seraient pas encore convaincus, que l’écologie planétaire est, elle aussi, fragile et qu’il faut prendre au sérieux les menaces qui pèsent sur notre terre. Le scepticisme et même la négation au sujet des questions écologiques vont sans nul doute régresser dans le contexte de l’après-crise sanitaire.


La crise actuelle montre qu’il est possible d’affronter une grande menace en déployant d’imposants moyens à notre disposition. Le leadership politique, la réorganisation rapide du système de santé, la mise en place de grandes politiques économiques et fiscales et le confinement accepté dans les foyers sont autant de mesures susceptibles d’alimenter le sentiment qu’on va s’en sortir, malgré la menace. On redécouvre l’importance de l’État lorsqu’il fait preuve de leadership dans une situation de crise. C’est un second enseignement qui s’imposera.


En corollaire de cette nouvelle perception du rôle de l’État, on observera sans doute une remontée de la confiance envers la sphère politique, très malmenée ces dernières années, au Québec comme ailleurs dans le monde démocratique. Les enquêtes sociologiques avaient en effet montré une très grande perte de confiance envers les élites politiques, en comparaison des autres segments de la population. Mais c’est surtout sur le plan local — provinces, municipalités, États (États-Unis), régions (France) — que le regain de confiance envers le politique se manifeste en ce moment. La confiance envers les élites politiques sur le plan national n’augmente pas au même rythme, comme on le voit en France, aux États-Unis, mais aussi au Canada.


Les épidémies des siècles passés avaient accentué la méfiance envers autrui, considéré comme un danger potentiel. De nos jours, malgré des cas isolés de méfiance envers certains voisins âgés qui ne respectent pas le confinement ou envers les immigrants d’origine asiatique, par exemple, c’est plutôt la solidarité et plusieurs messages d’espoir qui dominent. Les dessins d’arcs-en-ciel qui apparaissent sur les fenêtres envoient le signal qu’il faut garder confiance dans l’avenir. La solidarité familiale et communautaire et la préoccupation pour la santé et le bien-être de tous devraient ressortir renforcées une fois la crise passée.


La crise sanitaire sera-t-elle suffisante pour contrer l’appétit du « toujours plus », l’appétit pour la croissance qui — la sociologie, encore une fois, le montre — grandit plus vite que le gâteau disponible ? Nous vivons dans une société d’hyperconsommation, qui nous a fait anticiper les revenus à venir, qui a conduit à l’endettement de bon nombre de ménages, qui a fait reculer la frugalité et « la prévoyance pour leurs vieux jours » de nos arrière-grands-parents. Le coup de frein à cette hyperconsommation sera bien réel dans les deux ou trois années à venir — le temps pour plusieurs d’éponger les dettes ! —, mais la tendance à long terme risque de rester la même. Cela ne changera pas vraiment en profondeur…


Une autre chose qui va cependant changer, c’est notre regard sur la mondialisation et la redécouverte du local, de la proximité, de la région, de la nation. La crise sanitaire est largement tributaire de la mondialisation. Le virus est entré d’abord porté par des voyageurs avant de se diffuser par des interactions communautaires. Les voyages et le tourisme de masse ont facilité la propagation de la COVID-19. On découvre aussi notre dépendance collective devant les productions de biens nécessaires au bien-être (médicaments génériques, matériel de toute sorte, etc.), trop largement délocalisées pour des raisons de coûts dans les pays à faibles salaires. C’est la face noire de la mondialisation dont nous avons jusqu’ici profité avec l’arrivée de biens courants moins chers. Notre regard sur la mondialisation sera désormais plus nuancé. L’ouverture vers les autres pays et les échanges internationaux resteront, mais nous allons aussi revoir les manières de faire et mieux prendre conscience des enjeux oubliés ou négligés de la mondialisation tous azimuts des dernières décennies. La crise sanitaire mondiale va rappeler aux nations l’importance de conserver une emprise sur leur propre destinée.




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