Affaire SNC-Lavalin: Justin Trudeau accepte les conclusions du rapport, mais refuse de s'excuser

Le premier ministre est sévèrement blâmé par le commissaire à l’éthique dans l’affaire SNC-Lavalin

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Trudeau se présente comme le défenseur des emplois canadiens


 OTTAWA | Justin Trudeau admet du bout des lèvres avoir commis des erreurs dans l’affaire SNC-Lavalin alors qu’un rapport accablant du commissaire à l’éthique l’accuse personnellement d’ingérence politique. 


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 « J’accepte ce rapport entièrement et je prends la pleine responsabilité pour tout ce qui s’est passé », a dit M. Trudeau en marge d’une annonce à Niagara-on-the-Lake, mercredi après-midi. 


 Le premier ministre a rapidement rétorqué qu’il n’était pas d’accord avec toutes les conclusions du rapport et qu’il « ne s’excuserait pas de s’être tenu debout pour les emplois canadiens ». 


 M. Trudeau réagissait au rapport dévastateur du commissaire Mario Dion publié le matin même, qui concluait que M. Trudeau avait contrevenu pour une deuxième fois en quatre ans à la Loi sur les conflits d’intérêts, cette fois dans l’affaire SNC-Lavalin. 


 Confronté à deux versions des faits, soit celle du premier ministre et celle de l’ex-ministre Jody Wilson-Raybould, M. Dion n’a donné aucune crédibilité à l’histoire de M. Trudeau et son entourage. 


 Affaire SNC-Lavalin 


 Rappelons que cette affaire a éclaté au grand jour en février quand le quotidien The Globe and Mail a publié un reportage alléguant que M. Trudeau et sa garde rapprochée avaient fait pression sur l’ex-ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, pour qu’elle aide la firme d’ingénierie à éviter un procès criminel dans une affaire de pots-de-vin allégués en Libye. 


 « M. Trudeau s’est servi de sa position d’autorité pour influencer la décision de Mme Wilson-Raybould, conclu d’une part M. Dion dans son rapport d’enquête. Les gestes posés pour favoriser [les intérêts de SNC-Lavalin] étaient inappropriés », continue-t-il, tout en ajoutant que les actions du gouvernement sont troublantes. 


 Le commissaire a aussi estimé que les considérations politiques évoquées directement par Justin Trudeau dans le but d’influencer Jody Wilson-Raybould étaient inacceptables. 


 L’enquête du commissaire révèle également une proximité inquiétante entre le cabinet du premier ministre et SNC-Lavalin. 


 M. Dion détaille notamment les nombreuses rencontres entre l’entourage du premier ministre et SNC-Lavalin pour trouver une stratégie commune dans le but de convaincre Mme Wilson-Raybould d’offrir un accord de poursuite suspendue (APS) à la compagnie québécoise. Tout cela, à l’insu de l’ex-ministre. 


 Un APS est une sorte d’entente à l’amiable qui permet à une entreprise accusée au criminel d’éviter un procès. Une fois l’entente conclue, l’entreprise peut continuer à soumissionner des contrats fédéraux. 


 Pas accès à tout 


 M. Dion a aussi accusé le gouvernement de lui avoir bloqué l’accès à l’ensemble de la preuve. 


 Il soutient que le gouvernement n’a pas voulu lever le sceau de confidentialité nécessaire pour que certaines personnes puissent s’exprimer librement lors de son enquête. 


 « Je suis convaincu que si l’on veut que le commissariat demeure réellement indépendant et qu’il remplisse son mandat, je dois avoir un accès sans entraves à tous les renseignements pouvant m’être utiles dans l’exécution de mon mandat », déplore M. Dion. 





 

 « L’autorité du premier ministre et de son bureau a servi à contourner, à miner et, au bout du compte, à tenter de discréditer la décision de la directrice des poursuites pénales ainsi que l’autorité de Mme Wilson-Raybould. » 


 « Des intérêts politiques personnels ont également été évoqués, directement ou indirectement, auprès de Mme Wilson-Raybould à au moins quatre occasions distinctes. » 


 « M. Trudeau a tenté d’influencer la procureure générale de diverses façons, tant directement que par le biais de personnes sous son autorité. » 


 « SNC-Lavalin a échafaudé un argumentaire [...] destiné à être présenté à la directrice des poursuites pénales dans l’espoir qu’elle revienne sur sa décision. Le ministère des Finances et le Bureau du Conseil privé ont tous deux activement aidé SNC-Lavalin à préparer cet argumentaire. » 


 Ce qu’ils ont dit 


 « Justin Trudeau avait promis d’être responsable et éthique. Mais, encore et encore, il a utilisé le pouvoir de son bureau pour s’enrichir, récompenser ses amis et punir ses critiques. » – Andrew Scheer, chef du Parti conservateur du Canada 


 « Justin Trudeau se prend pour Louis XIV. Son mépris des lois et de l’éthique permet aux conservateurs et au NPD de manger du Québécois. Les travailleurs innocents vont tout perdre et les probables bandits se sauver. » – Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois 


 « Le rapport confirme des faits essentiels, conformes à ce que j’ai partagé avec tous les Canadiens, et confirme la position que j’ai prise dès le départ. Le commissaire n’a pas été distrait par des informations inexactes sur les événements ou sur ma personne et a tiré des conclusions basées sur les faits. » – Jody Wilson-Raybould 


 « Il est absolument scandaleux que le premier ministre Trudeau trahisse la confiance des Canadiens pour servir les intérêts de ses amis des grandes entreprises. Ce rapport prouve que le gouvernement libéral a fait passer les riches et les privilégiés avant la loi. » – Jagmeet Singh, chef du NPD