"Bulletin" des hôpitaux en pleine campagne électorale

Une patate chaude pour les libéraux

Santé - le pacte libéral


par Martin Pelchat - Un "bulletin" des hôpitaux qui promet d'être controversé risque de mettre du piquant dans la prochaine campagne électorale. Ironie du sort: cette patate chaude avec laquelle devra composer le ministre de la Santé, Philippe Couillard, est en grande partie l'oeuvre du Dr Yves Bolduc, un candidat-vedette... des libéraux.
Véritable "star" du milieu de la santé depuis qu'Alma, où il travaille, est décrit comme un modèle d'efficacité en la matière, le Dr Bolduc, en qui plusieurs voient un successeur éventuel à Philippe Couillard à la Santé, a été embauché en mai dernier comme "consultant-spécialiste" par le magazine L'actualité pour mettre au point une méthodologie afin d'évaluer les établissements de santé. Le médecin avait attiré l'attention du magazine en déclarant à une émission de télévision que la population avait le droit de connaître la performance de ses hôpitaux.
Toutefois, en novembre, le médecin a été approché par Philippe Couillard pour devenir candidat libéral dans Lac-Saint-Jean. Sa candidature a finalement été annoncée par Jean Charest le 28 janvier. Depuis, les libéraux ont multiplié les signaux confirmant leur intention de déclencher les élections le 21 février, en vue d'un scrutin le 28 mars. Or, la publication du grand dossier de L'actualité est prévue pour la fin février ou le début mars.
"J'assume les mandats que j'ai faits ; ça démontre aussi mon expertise", a lancé Yves Bolduc lorsque joint par Le Soleil. "Ce n'est pas une cachette que dans le réseau de la santé, je suis l'expert des données."
Le Dr Bolduc insiste : il n'était pas question qu'il aille en politique lorsqu'il a accepté le mandat du magazine et la publication du dossier était prévue depuis longtemps pour mars 2007, soit bien avant qu'on parle d'élections le 26 mars. "À partir du moment où il a été question que j'aille en politique, on s'est entendu que je me dissocierais de L'actualité." Il précise aussi que le but de sa méthodologie était de faire "un état de situation objectif, indépendamment des partis". "Je n'ai pas porté de jugement sur si c'est amélioré ou détérioré."
"Je suis fier de ma méthode et je vais être content de la défendre, poursuit-il. Et la preuve que je n'étais pas engagé politiquement, c'est que les chiffres vont donner l'état du réseau. Je suis un gars honnête intellectuellement. Les chiffres qui sont là-dedans, que ce soit pour n'importe quel parti, ce sont les bons chiffres. Si un hôpital n'est pas bon, ce n'est pas parce que je vais en politique qu'on va le mettre bon."
L'éditrice de L'actualité, Paule Beaugrand-Champagne, explique de son côté que le travail commandé au docteur Bolduc en tant que spécialiste de l'organisation des soins est terminé depuis deux mois et que le magazine en est très satisfait. Elle ajoute avoir été prévenue par le médecin lorsqu'il réfléchissait à une possible candidature. "C'est un homme qui a un sens profond de l'éthique" dit-elle.
Mme Beaugrand-Champagne refuse par ailleurs de qualifier l'exercice auquel se livrera le magazine de "bulletin" des hôpitaux et insiste qu'il ne s'agit pas d'un "palmarès" comme L'actualité en publie un chaque année des écoles. Il s'agit d'un "grand dossier", dit-elle, auquel l'équipe travaille depuis un an. "C'est notre travail", insiste-t-elle, réalisé à partir de données objectives. "Ce n'est pas politique."
L'actualité a présenté des extraits du dossier aux critiques en santé de tous les partis politiques, il y a quelques jours, et parlait alors d'un "classement" des établissements de santé, nous dit-on au Parti québécois.
Entre-temps, les hôpitaux ne cachent pas leurs appréhensions devant la publication d'un tel exercice. "Les bulletins, on trouve que c'est un exercice un peu limité", lance le directeur des communications de l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux (AQESSS), Alain Leclerc. En jugeant par exemple la performance des urgences sur la base de la présence de personnes âgées de plus de 75 ans pendant plus de 48 heures, on ne précise pas qu'il manque peut-être d'argent dans les services à domicile, dit-il. "Un bulletin, c'est toujours un instantané qui ne met pas en lumière ce qui se passe en amont et en aval."
mpelchat@lesoleil.com


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