Une expérience aux antipodes

Élection Québec 2012


CLAUDE BÉLAND
L'auteur a été président de la Société d'implantation du CHUM et président du Mouvement Desjardins. Il réagit à l'opinion de Gaétan Frigon, intitulée [« Une option valable»->50306], qui a été publiée samedi dernier.
Dans son texte, l'ancien PDG de la SAQ rappelle que les qualités de chef ainsi que de l'équipe d'un parti prennent une importante considérable dans le contexte d'élections générales et que dans ses fonctions de PDG, il a eu à se rapporter à deux ministres, soit François Legault et à Pauline Marois, lesquels étaient, dit-il, des politiciens aux antipodes. Il en conclut, en donnant des exemples, que «d'une part, avec Pauline Marois, tout était clair, net et précis. (...) D'autre part, avec François Legault, c'était le contraire.»
En tant que PDG de la Société d'implantation du centre hospitalier de l'Université de Montréal (SICHUM), j'ai vécu la même situation. J'ai eu à me rapporter successivement à trois ministres: Pauline Marois, Rémy Trudel et François Legault. Mme Marois a occupé le poste pendant toute la période de la mise en place de la SICHUM et de la définition du contenu et du contenant de cet important projet.
Avec Pauline Marois, et aussi, pendant quelques mois par la suite avec Rémy Trudel, tout était clair, net et précis, alors qu'en me rapportant à François Legault, nommé ministre de la Santé en 2002, ce fut tout le contraire.
Et je ne suis pas le seul le dire. L'ex-recteur de l'Université de Montréal, Robert Lacroix, et le sociologue Louis Maheu le confirment dans leur livre écrit en 2010 et intitulé Le CHUM, une tragédie québécoise (Éditions du Boréal, 2010). Ils écrivent, référant à la période de la mise en place et de la définition du projet: «Les objectifs étaient clairement énoncés; grâce au travail de l'équipe et à son leadership, les travaux évoluèrent très bien au cours de l'année 2001. Le partenariat CHUM-Université de Montréal n'avait jamais été aussi explicite et efficace que durant cette première phase des travaux de la SICHUM.»
Effectivement, grâce aux orientations claires, nettes et précises de la ministre Pauline Marois, l'équipe de la SICHUM a réussi à respecter ses échéanciers. Nous savions déjà que nous pourrions, si le même enthousiasme était maintenu, construire le nouvel hôpital dans les délais prescrits.
Mais, en 2002, François Legault est nommé ministre de la Santé. Un ministre délégué (non élu) David Levine est aussi nommé. Plus moyen d'obtenir des directives précises. «En clair, écrivent MM. Lacroix et Maheu, on jouait un peu à l'apprenti sorcier avec un projet de société de grande envergure. Heureusement, la période Levine ne dura que 139 jours puisque candidat à l'élection partielle du 17 juin 2002, il fut battu et dut quitter le gouvernement. (...) Pour sa part, François Legault, répondait de moins en moins aux appels de Claude Béland, lequel s'impatientait, comme l'ensemble de son conseil d'administration, de l'absence de réponse du gouvernement sur le plan directeur clinique déjà déposé.»
Alors que depuis l'an 2000, au moment de la création de la SICHUM, tout avait toujours été clair, net et précis, appuyé par un suivi rigoureux de la ministre Marois, voilà que je me retrouvais, comme le dit M. Frigon, devant un ministre aux antipodes de Mme Marois.
Oui, j'ai démissionné en l'absence de leadership de M. Legault et de son délégué. M. Frigon a raison: les qualités d'un chef sont importantes. Mais un bon chef n'est pas seulement celui qui est habile à compter, à calculer, à aligner des chiffres. Il faut aussi être habile à aligner des idées et des projets qui se réaliseront harmonieusement grâce à un leadership partagé.


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