Il y a un peu plus d’une semaine, la Commission des institutions de l’Assemblée nationale annonçait son refus d’agréer à la demande du PQ et de la CAQ de convoquer les commissaires France Charbonneau et Renaud Lachance pour « faire la lumière sur les conclusions du rapport de la commission Charbonneau ».
La décision qu’allait rendre le président de la Commission des institutions à l’égard de cette demande des partis d’opposition ne faisait aucun doute puisque les commissaires nommés en vertu de la Loi sur les commissions d’enquête bénéficient de l’immunité accordée aux juges de la Cour supérieure et ne peuvent, comme ces derniers, être contraints à témoigner devant toute instance sur les motifs de leur décision.
Au lieu de prendre du temps pour décortiquer les motifs du désaccord des commissaires sur un seul aspect du rapport de la commission Charbonneau, et continuer par leur action à discréditer le travail de cette commission qu’ils ont réclamée à grands cris, les partis d’opposition feraient mieux de talonner le gouvernement libéral sur les mesures que celui-ci entend adopter pour mettre en oeuvre sans tarder les recommandations du rapport. Rappelons que l’opinion divergente du commissaire Lachance à propos du lien entre le financement des partis politiques et l’octroi des contrats publics, trois pages d’un rapport qui en compte 1409, ne porte pas sur les recommandations visant à dépolitiser l’octroi des contrats publics. Car, c’est bien de cela qu’il s’agit : mettre les décisions relatives à l’octroi des contrats publics à l’abri des influences politiques partisanes.
La corruption administrative
Lors des audiences de la Commission, plusieurs experts sont venus présenter leurs conclusions et recommandations sur les sujets visés par le mandat de la Commission : lutte contre la corruption et la collusion dans les contrats publics, infiltration du crime organisé, protection des dénonciateurs, et l’influence du financement des partis politiques sur l’octroi des contrats publics de l’industrie de la construction.
Parmi ces experts, deux universitaires, Jonathan Hopkin, spécialiste du financement des partis politiques à la London School of Economics, et Micheal Johnston, politologue et chercheur à l’Université Colgate, auteur de Syndromes of Corruption, ont expliqué de manière éloquente un phénomène propre aux sociétés comme la nôtre dans laquelle le libre marché est chose acquise et où les institutions démocratiques sont généralement capables de détecter la corruption et d’y mettre un frein.
Dans ces sociétés, la corruption administrative (le « pot-de-vin ») est risquée, du fait justement de l’existence de mesures de surveillance de la corruption. Pour garantir leur juste part de marché dans l’octroi des contrats publics dans un domaine où ces contrats représentent plus du tiers du chiffre d’affaires de leur entreprise, comme dans l’industrie de la construction, les acteurs privés ont plutôt recours aux contributions politiques. Dans nos sociétés où l’État investit massivement dans l’économie par l’entremise de mesure d’incitation de toutes sortes (crédits d’impôt, crédits de taxes, subventions directes et indirectes), la possibilité réelle d’influencer les décisions politiques concernant l’attribution de ces incitatifs étatiques va conduire les acteurs privés à tout mettre en oeuvre pour obtenir une juste part de ces investissements. C’est ainsi que se développe, selon Micheal Johnston, un « marché d’influence où se rencontrent les intérêts des élites politiques et économiques » (tome III, p. 33).
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COMMISSION CHARBONNEAU
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Les partis d’opposition devraient talonner le gouvernement libéral sur les mesures qui s’imposent
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