De façon bien irréfléchie, le gouvernement Legault a ouvert la porte à une réforme de notre mode de scrutin. Il a financé le Mouvement Démocratie Nouvelle à hauteur de 250 000 $ pour mousser son option et doit présenter sous peu un projet de loi portant sur une proportionnelle mixte avec compensation régionale.
Un système proportionnel produit des gouvernements fragiles qui doivent former des coalitions avec les autres partis pour se maintenir au pouvoir. Menottés, donc, quand vient le temps de faire des réformes.
Il implique la création de deux classes de députés. Les traditionnels (environ 80) élus dans leur comté et des «de liste» (environ 45) désignés par les partis politiques qui pourront y placer leurs candidats qui seraient élus de façon indirecte.
Le vote proportionnel affaiblirait le seul parlement de langue française en Amérique (Cf le livre de Christian Dufour).
Claudette Carbonneau, ex-présidente de la CSN, milite activement pour modifier notre façon de voter. Dans un texte d’opinion publié par La Presse, elle apporte un argument qui me fait frémir. Somme toute, argumente-t-elle, la proportionnelle aurait permis de bloquer la réduction des dépenses de l’État de Lucien Bouchard (1995-1998) et celle de Philippe Couillard (2014 et suivantes).
Le système actuel, a-t-elle écrit, «autorise, comme on l’a vu sous le gouvernement Couillard, de saccager nos réseaux de santé et d’éducation à partir d’une majorité artificielle, déconnectée du vote populaire». Artificielle... pardon. Les Libéraux et la Coalition avenir Québec ont récolté près de 65 % du vote lors de cette élection et avaient des programmes similaires. Claudette Carbonneau préfère additionner le vote du PQ et de QS (38 %) pour démontrer son point.
On comprend donc que le but de la proportionnelle serait de permettre à des lobbies, connectés sur des tiers-partis, de perpétuer un douillet statu quo en ligotant tout gouvernement.
Il est plutôt ironique que le MDM rejette l’idée de soumettre le mode de scrutin proportionnel à un référendum sous prétexte que ce serait «anti-démocratique»? Ils proposent plutôt de consulter le peuple... après l’avoir mis en place? C’est le principe de la cage à homards. Le sujet est trop complexe, arguent-ils, pour laisser les électeurs décider.
Notre mode de scrutin de type britannique a bien servi le Québec et produit des gouvernements stables capables de réaliser leurs engagements. Il suffirait de rajouter une question sur le mode de scrutin sur le bulletin de vote lors des prochaines élections générales pour refermer cette porte que d’autres provinces et le Canada ont refermée.