Le logo de la CAQ reflète de plus en plus ce que ce parti est : un assemblage hétéroclite et dissonant. L’adhésion récente de François Rebello le met en lumière d’éclatante façon. Rebello se joint à un groupe de fédéralistes inconditionnels (les adéquistes) en faisant une profession de foi souverainiste. C’est comme d’adopter l’islam tout en demeurant catholique.
Si on essaie de trouver le point commun qui unit tous ces gens, il est difficile d’en trouver un autre que l’opportunisme. C’est-à-dire le goût du pouvoir à tout prix. Même au prix de renier ses convictions. Les ex-adéquistes, autant que les autres, mais sur l’axe gauche-droite.
Qu’est-ce que cela peut donner? En admettant que les Québécois se laissent séduire malgré tout, il est presque épeurant d’envisager le genre de gouvernement qui pourrait en résulter. L’heure de vérité sonnera alors et l’illusion fera place à la désillusion.
Supposons que Legault donne à Caire un ministère plus important qu’à Deltell (une fois que ce dernier aura résolu son problème d’autruche), qu’arrivera-t-il, alors qu’ils ne parvenaient même pas à s’entendre quand ils faisaient partie d’une formation politique homogène? Supposons encore que le nombre de ministères qui iraient aux ex-péquistes dépasse celui qui serait attribué aux ex-adéquistes. Quelle serait la réaction de ces derniers?
Imaginons une situation de conflit avec le gouvernement fédéral. Sur la péréquation par exemple. Legault proteste. Jusque-là, ça va. Même Charest l’a fait. Legault menace. Là, Deltell et son sérail sentent que le jupon « nationaliste » de Legault dépasse et posent un ultimatum. Si Legault cède, il perd la face et ses compères ex-péquistes ne sont pas contents; s’il résiste, Deltell et cie font un pas vers la sortie, et peut-être deux.
Les gaz de schiste vont revenir dans l’actualité. Legault, bien « lobbyisé » par Bouchard et Boisclair, décide d’ouvrir la porte en exigeant des garanties minimales des compagnies tout en prétendant qu’elles sont sévères. Le vert Rebello se laissera-t-il abuser?
Il est vrai que, tout ce beau monde, ce sont des gens « pratiques », qui ont l’élastique des principes long. Mais il y a aussi l’électorat. Et cet électorat n’a pas pardonné à Mario Dumont une gestion plutôt erratique de ses affaires du temps qu’il n’était que chef de l’opposition. Que feront ces gens « pratiques » s’ils sentent que le corps électoral évolue dans un sens qui pourrait compromettre leur réélection?
Et en ce moment les ex-libéraux que Legault attend, appelle de ses vœux et promet n’ont pas encore fait leur apparition. Me Bellemare pourrait être tenté de joindre la troupe moyennant certaines promesses. Legault fera-t-il comme Charest et laissera-t-il poireauter l’avocat, ce qui, les mêmes causes produisant les mêmes effets,…
On pourrait multiplier les hypothèses mais, de quelque manière qu’on envisage l’avenir, le risque paraît bien grand d’un gouvernement amateur, sans cohérence, paralysé dans son action, miné par les querelles intestines, aux objectifs flous, avec un capitaine qui change d’idée à tous les deux mois. La CAQ sera devenue la CEQ : la Coalition Enfer Québec.
Oui, à ce moment-là, nous serons vraiment à la cour du roi Pétaud. Friands de spectacles, les Québécois seront bien servis. Mais le bien public dans tout cela, les intérêts supérieurs de la nation? On verra, n’est-ce pas?