Un bas qui pue

Le bas de laine des Québécois sent de plus en plus mauvais

L'affaire de la CDPQ — le scandale



Le bas de laine des Québécois sent de plus en plus mauvais.
En 2002, alors qu’ils formaient l’opposition officielle, les libéraux de Jean Charest réclamaient du gouvernement Landry plus de transparence de la part de la Caisse de dépôt et placement, cette même transparence qu’ils refusent à leur tour aujourd’hui aux Québécois.
Les pertes faramineuses subies par la CDPQ depuis le début de la crise financière mondiale demeureront un thème majeur de la campagne électorale. Le PQ et l’ADQ y verront.
D’abord parce que, même si Jean Charest et sa ministre Monique Jérôme-Forget se retranchent derrière l’autonomie de la Caisse par rapport au pouvoir politique, la ministre des Finances donne des orientations à ses dirigeants, à défaut de dicter tous les choix précis de placements. Ainsi, en 2002, à l’époque de l’investissement injustifiable dans Montréal-Mode et de la construction d’un siège social pharaonique pour la Caisse, Mme Jérôme-Forget affirmait «qu’il fallait remplacer la folie des grandeurs par la folie des rendements». C’est d’ailleurs dans cette même entrevue que l’actuelle ministre des Finances exigeait des dirigeants de la Caisse plus de transparence et de reddition de comptes à la population.
Le gouvernement Charest a fait savoir qu’il souhaitait de la Caisse des choix de placements qui assureraient un plus haut taux de rendement; celle-ci a donc misé sur des actions à plus hauts risques, comme le papier commercial. Mario Dumont rappelle dans chacun de ses discours que Teachers, le fonds des enseignants ontariens auquel la CDPQ est toujours comparée, n’a investi que 60 millions de dollars dans le papier commercial; la Caisse, 13 milliards! Alors que la Caisse a été créée par Jacques Parizeau dans les années 60 pour mettre à la disposition de l’État québécois un «capital bâtisseur», les libéraux de Jean Charest ont demandé aux dirigeants de la Caisse d’utiliser les dépôts des Québécois dans la Régie des rentes et ceux de la SAAQ ou de la CSST comme un «capital spéculateur», plaide M. Dumont. Pauline Marois abondait dans le même sens, hier, à Maisonneuve à l’écoute, à la radio de Radio-Canada. Jean Charest ne peut jouer totalement les Ponce Pilate par rapport aux pertes astronomiques de la Caisse. L’équivalent des cotisations à la RRQ pendant trois ans a été perdu, a illustré Mario Dumont mercredi.
Ces pertes risquent fort d’avoir un impact prochain – après les élections – sur le coût de l’immatriculation et du permis de conduire, et sur les cotisations à la RRQ et les primes payées par les employeurs à la CSST. Jean Charest a évidemment tout intérêt à nous réserver ces surprises pour l’hiver 2009.
Le droit à l’information
Alors que les Québécois n’ont eu droit qu’à une berceuse de la part du président du conseil de la Caisse, Pierre Brunet, à la demande de Mme Jérôme-Forget, les lecteurs du Globe and Mail de Toronto ont su en début de semaine que la Caisse avait vendu en catastrophe pour 10 milliards d’actions afin de s’assurer des liquidités pour rencontrer ses obligations vis-àvis de ses déposants. La Caisse, la ministre, qui parle jusqu’à plusieurs fois par jour à M. Brunet en période de crise, et le premier ministre se sont bien gardés d’informer les Québécois sur ces «ventes de feu». Il est frustrant et humiliant d’apprendre des bribes d’information sur les trous dans notre bas de laine dans un quotidien de Toronto.
La présente crise financière est très exceptionnelle, elle appelle des réactions très exceptionnelles, comme dans toute gestion de crise.
Par ailleurs, l’argument de M. Charest voulant que les rendements de la Caisse doivent être jugés sur une longue période et qu’un rapport annuel suffit est fallacieux. De nombreux grands fonds du Canada et d’ailleurs dans le monde publient des rapports trimestriels ou bisannuels. Ce souci de transparence devrait s’appliquer à plus forte raison pour des cotisations provenant de l’ensemble des citoyens. Tout particulier, détenteur d’un compte d’actions à la bourse, reçoit un relevé trimestriel, mais il jauge la qualité des investissements – et de ceux qui le conseillent – sur une période de quelques années. Les Québécois auraient le gros bon sens de faire de même pour leur Caisse de dépôt et placement.


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