Photo: Bloomberg Martin Vallières - (Montréal) Les dirigeants de la firme Coventree, de Toronto, qui fut le principal promoteur du marché des papiers commerciaux au Canada ont encaissé plusieurs millions de dollars en primes depuis deux ans.
Et ce, durant la période où la surchauffe puis l'effondrement de ce marché de 35 milliards de dollars de PCAA non bancaires ont engendré des pertes énormes chez plusieurs entreprises et institutions financières, dont la Caisse de dépôt et placement, la Banque Nationale et le Mouvement Desjardins au Québec.
Plus précisément, les six principaux dirigeants de Coventree se sont partagé au moins 9,2 millions de rémunérations directes au cours des exercices 2007 et 2008, a constaté La Presse Affaires dans les documents de l'entreprise déposés auprès des autorités boursières.
Et de cette somme de 9,2 millions, au moins 6,7 millions étaient constitués de primes au comptant obtenues surtout pour l'exercice 2007 de Coventree. Il s'agit du même exercice à la fin duquel éclata la crise des PCAA, en août 2007.
Par ailleurs, alors que Coventree est en voie de fermeture après la chute de son principal marché, l'un de ses cofondateurs, Dean Tai, vient de se faire consentir une somme d'un million au comptant à titre de «prime de départ» de son poste de chef de la direction.
Cette indemnité est mentionnée brièvement dans un communiqué énonçant la «fermeture ordonnée» de Coventree que la firme a publié il y a quelques jours, à un mois de la tenue de son assemblée d'actionnaires finale à Toronto.
Selon le président du conseil de Coventree, Brendan Calder, qui a aussi supervisé l'accord des primes aux dirigeants, le chef de la direction démissionnaire Dean Tai a démontré «un leadership incomparable» à la direction de la firme.
M. Calder lui attribue aussi le «développement de la culture d'entreprise de Coventree» et la formation d'une «équipe de talents extrêmement talentueux».
N'empêche, Coventree est aujourd'hui en ruines. Elle n'a plus qu'une quinzaine d'employés à son siège social torontois comparativement à 80 avant la crise des PCAA en août 2007, qui étaient répartis entre des bureaux à Toronto et à Denver, au Colorado.
D'ailleurs, en plus de ses clients investisseurs et spéculateurs, plusieurs des actionnaires de Coventree ont perdu gros dans son aventure des PCAA.
Ses actions qui cotaient à un sommet de 16,30$ l'unité à la Bourse de Toronto en juillet 2007, alors que culminait le marché des PCAA non bancaires, ont dégringolé jusqu'à 55 cents en quelques semaines après le gel de ce marché.
Cette chute brutale correspondait alors à une perte de 260 millions en valeur boursière. Depuis, l'action de Coventree a lentement remonté vers les 3,80$.
Par ailleurs, parmi les actionnaires échaudés de Coventree figure nulle autre que... la Caisse de dépôt et placement! Elle fut même pendant un temps l'un des principaux actionnaires de Coventree et son principal client des PCAA non bancaires, jusqu'à l'effondrement de ce marché en août 2007.
Selon les plus récents bilans disponibles, la Caisse de dépôt a perdu au moins 18 millions depuis deux ans avec la dégringolade de ses 1,34 millions d'actions de Coventree.
Mais hier, au siège social de la Caisse, on a refusé tout commentaire ou précision sur le solde résiduel en actions de Coventree. Et ce, même si les chiffres complets du prochain bilan annuel de la Caisse sont prêts pour leur publication prochaine, après l'annonce de ses résultats sommaires.
Pourtant, l'examen de documents boursiers antérieurs de la firme Coventree suggère que la Caisse de dépôt y aurait fait au moins un bon placement. Ça remonte en novembre 2006, au moment de l'inscription des actions de Coventree à la Bourse de Toronto. La Caisse de dépôt était alors le principal actionnaire privé de Coventree, à hauteur de 28,9% du capital.
Mais elle a encaissé un peu plus de 30 millions avec la revente de 3,1 millions de ses actions à 10,75$ chacune, lors de la première émission publique de Coventree.
Un an plus tard, ces actions de Coventree ne cotaient plus qu'à 1$ environ en Bourse, après le gel du marché des PCAA non bancaires.
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