L'investissement fédéral dans les infrastructures

Si peu, si tard!

L'investissement fédéral dans les infrastructures : des grenailles!

Budget fédéral 2009 - réactions de Québec

Publié dans L'Aut'journal du jeudi 28 janvier 2009 sous le titre "Budget fédéral : Je suis en « calvinse »"
***
Je suis en "calvinsse". Je ne joindrai pas ma voix au chœur de ceux qui célèbreront le plan de relance fédéral: c'est trop tard et trop peu. C'est surtout beaucoup trop
peu.
C'est du moins ce qui s'annonce à quelques heures du discours du budget:
"7 milliards aux infrastructures

[...L]e ministre fédéral des Transports John Baird a annoncé, lundi, à
Ottawa, une enveloppe de 7 milliards de dollars, incluant un fonds de 4
milliards pour les infrastructures (routes, ponts, systèmes d'aqueducs et
d'égouts, transports en commun) et un autre de 2 milliards pour les écoles
et les collèges. Le tout est complété par une enveloppe de 1 milliard
destinée aux infrastructures vertes."
Les milliards et les millions, ça me donne le vertige.
Aussi, pour comprendre un peu mieux à quoi cela correspond, j'aime mieux
ramener le tout à l'aune de Montréal.
Si la proportion allouée au Québec est du quart (de 4 milliards),
ça nous fera quelque chose comme 1 milliard pour les infrastructures
traditionnelles.
En partageant 50 50 entre les travaux du gouvernement du Québec
(autoroutes, routes, ponts, etc.)
et ceux des municipalités, ça laissera vraisemblablement 500 M$ aux
municipalités
et donc, en proportion de la population, environ 100 M$ pour la Ville de
Montréal.
Est-ce beaucoup?
Un tempête de neige, à Montréal, ça nous coûte 18, 19, 20 M$.
Le fédéral va donc verser à Montréal l'équivalent de cinq ou six tempêtes:
merci.
(Faut être poli et reconnaissant: ils n'étaient même pas obligés.
Enfin, si, tout de même, vu les circonstances...).
C'est tout de même très peu.
Dans son budget adopté en décembre dernier,
la Ville de Montréal a déjà prévu investir dans ses infrastuctures, en
2009,
1,156 G$ (1,156 milliard de dollars), 1156 millions.
Sommaire du PROGRAMME TRIENNAL D’IMMOBILISATIONS 2009-2001, page 74
http://ville.montreal.qc.ca/pls/portal/docs/page/service_fin_fr/media/documents/budget-2009-9-global-som-pti-2009-2011.pdf
L'apport fédéral représentera donc 8 ou 9% (1/12) de ce que la Ville
investira en 2009:
même pas un supplément de 10%!
On est loin du gros coup pour fouetter l'économie! C'est la crise ou non?
Ce n'est pas + 10% qu'il aurait fallu, mais + 40%, +60% et peut-être même
plus.
Il est vrai que, pour 2009, il n'aurait pas non plus fallu que ce soit
beaucoup plus (que 40 ou 60% de plus),
car il faut tout de même un minimum de temps de préparation.
Sans compter qu'il faut éviter d'engorger les capacités de l'industrie par
un afflux trop massif et subit. Autrement, c’est parti pour le gaspillage
comme en 1976.
Par ailleurs, ce n'est pas à la fin janvier qu'il faut annoncer ces
montants: au rythme où l'argent fédéral est débloqué, on posera du béton en décembre
prochain (et encore, si on se grouille et si on est chanceux).
Et d'autant que la crise est bien partie pour durer jusqu'en 2010, au
moins.
Il aurait fallu annoncer dès l'automne dernier des dépenses pour 2009 ET
pour 2010. Minimum.
Déjà, les services techniques municipaux se plaignent du fait que les
budgets municipaux ne sont adoptés officiellement que très tard dans
l'année, à la fin de l'automne:
ça leur laisse peu de temps pour se revirer en enclencher les travaux
rapidement, pour que les chantiers commencent dès le début du printemps et
qu'on ne se retrouve pas à étendre de l'asphalte en plein hiver.
Il aurait été intelligent de permettre un minimum de planification sur
deux ans
et il aurait été approprié d'en mettre pas mal plus: quatre ou cinq fois
plus, par année, pour au moins deux ans.
Au lieu de ça, on donnera des réductions d'impôts... à ceux qui paient de
l'impôt: merci pour eux.
Si ces heureux contribuables sont rationnels pour deux sous - c'est ce
qu'on leur souhaite et ce qu'il faut leur recommander,
ils rembourseront leurs emprunts et, si possible, ils en économiseront un
petit peu.
Tant mieux pour eux. Tant pis pour la relance de l'économie!
Pierre J. Hamel, professeur-chercheur
INRS-Urbanisation, Culture et Société

Institut national de la recherche scientifique

http://www.ucs.inrs.ca/default.asp?p=hamel
http://www.ucs.inrs.ca

Montréal, Québec H2X 1E3
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --
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(nouvelle version, mise à jour)
L'investissement fédéral dans les infrastructures : des grenailles!
Au lendemain du discours du budget fédéral, un quotidien montréalais
confectionné sans ses journalistes titrait à la une : « Une pluie de
milliards ». Il me semble pourtant qu’il ne s’agisse que d’un parcimonieux
saupoudrage de nanogranules, comme si on avait choisi un traitement
homéopathique pour ce qui semble être la crise la plus sévère depuis la
Grande Dépression.
Déjà, une comparaison rapide (et grossière) avec le plan de relance
américain fait paraître bien pâlichon ce qu’on nous annonçait mardi : alors
que le Canada a une population et un PIB qui sont l’une comme l’autre à peu
près dix fois moins importants que ceux des États-Unis, le plan de relance
du gouvernement Harper sera vingt fois moins sérieux que celui de nos
voisins du Sud.
Les premiers commentaires montrent que les salariés disposeront de
quelques dollars de plus par semaine et, en faisant preuve d’une bonne
volonté exacerbée, on peut se dire que c’est mieux que rien. Or, il en est
de même pour la plupart des mesures annoncées : elles sont modestes et
dispersées – mis à part les coups de pouce pour l’industrie automobile et
le sud de l’Ontario qui ne sont pas aussi minables, merci pour eux.
Bon nombre d’analystes insistent pour que nous portions plutôt notre
regard vers les montants annoncés pour relancer l’investissement dans les
infrastructures : ce serait du sérieux, rendez-vous compte, pas moins de 12
milliards de dollars!
Les milliards et les millions, ça me donne le vertige. Aussi, pour
comprendre un peu mieux à quoi cela correspond, je préfère ramener le tout
à l'aune de Montréal. Bien entendu, personne ne sait encore ce que cela
signifiera exactement pour chaque municipalité. Le jour du discours sur le
budget, le maire de Montréal estimait que notre ville recevrait environ 250
millions sur deux ans. La veille, en étant de nature un peu moins
jovialiste que notre maire, j’avais fait le pari que Montréal recevrait 100
millions pour 2009. Que l’on parle de 100 ou 125 millions par année, ce
n’est pas rien, mais est-ce beaucoup?
En guise de comparaison, on se rappellera qu’à la mi-janvier, le fédéral
avait octroyé un contrat d’un montant similaire (254 millions) pour
relancer l’économie d’une ville… du Texas, en y faisant fabriquer des
camions militaires, plutôt que d’en confier la fabrication à l’usine Paccar
de Sainte-Thérèse. Il est vrai que nous devrions tous nous réjouir puisque
ce contrat contribuera de toute façon à faire redémarrer la grande roue de
l’économie (qui tourne pour tout le monde); nous finirons bien par en
profiter. Les Texans achèteront peut-être plus de sirop d’érable? C’est
comme escompter un effet papillon économique.
Mais revenons à Montréal. Une tempête de neige entraîne des dépenses de
18, 19, 20 M$. Le fédéral va donc verser à Montréal l'équivalent de six ou
sept tempêtes : merci.
(Faut être poli et reconnaissant, ils n'étaient même pas obligés. Enfin,
si, tout de même, vu les circonstances.)
Il demeure que c'est très peu.
Dans son budget adopté en décembre dernier, la Ville de Montréal a déjà
prévu investir 1,156 milliard de dollars dans ses infrastructures en 2009.
Sommaire du PROGRAMME TRIENNAL D’IMMOBILISATIONS 2009-2011, page 74
L'apport fédéral représentera donc entre 9 et 11 % de ce que la Ville
investira en 2009 : à peine un supplément de 10 %!
On est loin du gros coup pour fouetter l'économie! C'est la crise ou non?
Ce n'est pas +10 % qu'il aurait fallu, mais +40 % ou +60 %, voire
davantage.
Sachant que, pour 2009, il n'aurait pas non plus fallu injecter beaucoup
plus (que 40 ou 60 % supplémentaires), car il faut tout de même un minimum
de temps de préparation.
Sans oublier qu'il faut éviter d'engorger les capacités de l'industrie par
un afflux trop massif et subit. (On n’a qu’à penser au gaspillage de 1976.)
Mais on aurait pu annoncer dès maintenant qu’on allait « mettre la gomme »
pour 2010.
Au lieu de cela, on donnera des réductions d'impôts... à ceux qui paient
de l'impôt (eux apprécieront). Si ces heureux contribuables sont rationnels
pour deux sous – c'est ce qu'on leur souhaite et ce qu'il faut leur
recommander – ils rembourseront leurs emprunts et, si possible, ils
économiseront un petit peu d’argent.
Tant mieux pour eux. Tant pis pour la relance de l'économie!
Pierre J. Hamel, INRS
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