Serrer les rangs

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La grande erreur du Bloc consiste surtout à ne viser que l'électorat « progressiste » et à abandonner la droite identitaire



Depuis la vague orange de 2011 qui l’a fait fondre de 49 à 4 députés, le Bloc québécois vivote sur le respirateur artificiel. Réduit à une peau de chagrin, la pertinence de sa présence à Ottawa est de plus en plus remise en question. Le scrutin du 21 octobre prochain ne fera pas exception.




Le 1er octobre dernier, la défaite historique du Parti québécois, son parti frère, l’a aussi frappé de plein fouet. Idem pour la grave crise interne provoquée par la guerre à finir entre les partisans et les opposants de l’ex-chef Martine Ouellet, dont le but était de remettre la souveraineté au centre du discours bloquiste.




Depuis sa démission et l’arrivée de l’ex-ministre péquiste Yves-François Blanchet comme chef, la tempête s’est calmée. Les dix députés restants l’appuient. L’instinct de survie a pris le dessus. « Serrer les rangs ». Leur mot d’ordre est informel, mais bien réel.




Rassemblées dimanche pour l’investiture de leur député Mario Beaulieu, les troupes bloquistes en ont fait la démonstration. Pour ou contre l’existence du Bloc, on ne dira jamais assez à quel point, en politique, tenter d’avancer malgré de forts vents contraires exige une méga dose de détermination. Ou de déni, c’est selon.




Se réinventer




Serrant les rangs, l’ex-chef bloquiste Gilles Duceppe et l’ex-chef du PQ, Pierre Karl Péladeau, étaient présents pour l’occasion. Le dernier sondage Léger plaçant le Bloc à 18 % d’appuis au Québec, soit loin derrière les libéraux à 34 % et les conservateurs à 27 %, ce message d’unité visait surtout à mobiliser les troupes.




Face au déclin du PQ et de l’option souverainiste, le Bloc n’a pas le choix. Pour séduire, il doit aussi se réinventer une personnalité politique. L’opération, comme diraient les Français, est celle d’un relooking, mais partiel. Retournant à sa maxime de la « défense des intérêts du Québec », sa stratégie est tout de même plus ciblée.




Les intérêts économiques du Québec et l’environnement seront ses chevaux de bataille. En brandissant le drapeau du nationalisme économique, le Bloc emprunte une des marques de commerce du populaire gouvernement Legault. Avec l’environnement, il ambitionne aussi de gruger dans les talles progressistes du NPD, réduit à 8 % d’appuis au Québec.




Ère post-souverainiste




Mais attention. Les libéraux de Justin Trudeau et le Parti vert d’Elizabeth May feront de l’environnement un thème électoral majeur. Les joueurs seront nombreux à se disputer le coin « vert » de l’arène électorale.




Bref, nationaliste économique québécois, contre le pétrole albertain et pour la taxation des GAFA, le Bloc qui, jadis, fut la très souverainiste opposition officielle de Sa Majesté face au très fédéraliste Jean Chrétien, redéfinit ses clientèles.




En cette ère post-souverainiste, les uns diront que le Bloc fait acte de réalisme. D’autres, qu’il devient provincialiste. Quoi qu’il en soit, Yves-François Blanchet tentera de convaincre plus d’électeurs francophones qu’une « forte délégation » du Bloc au fédéral serait payante pour le Québec.




Le 21 octobre, les Québécois en seront les juges ultimes. Les campagnes électorales, il faut le dire, se font de plus en plus étonnantes.






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