S'opposer aux exportations d'électricité profite à qui?

Gouvernement mondial



Texte publié dans Cyberpresse du vendredi 13 mars 2009 sous le titre "Une insulte pour les Québécois"
Qui tirera profit de la campagne d'obstruction qui se met en marche aux États-Unis contre l'achat d'hydroélectricité québécoise? Que certains groupes soient en désaccord avec l'exportation d'électricité est une chose. Qu'ils s'allient avec des groupes américains pour s'opposer à la vente aux États-Unis d'une électricité propre et renouvelable et de surcroît sans GES en est une autre. Rappelons que l'opinion publique dominante au Québec est favorable à l'accroissement de la production d'électricité et à l'exportation de nos surplus. En tant que Québécois, il nous revient donc de nous demander à qui profite l'opposition: qui sera l'ultime perdant si cette campagne obtient gain de cause?
Les grands gagnants seront sans doute les producteurs de charbon et les compagnies d'électricité qui tirent leur énergie de centrales thermiques qui s'en alimentent. Les grands perdants seront les Québécois qui ne récolteront pas la richesse collective de la vente de leur hydroélectricité et qui, de surcroît, respireront un air contenant plus de polluants atmosphériques.
Un reflet du consensus social
Le BAPE ainsi que la commission fédérale-provinciale d'examen conjoint (la commission) viennent de rendre public un rapport d'enquête conjoint sur le projet hydroélectrique de la Romaine dans lequel ils rendent un avis favorable à sa réalisation. La commission conclut que le projet n'est pas susceptible d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants, ceci étant conditionnel à la mise en oeuvre de mesures d'atténuation, de compensation et de suivi environnemental. Ce rapport survient au terme de plus d'une année d'examen environnemental du projet par les deux ordres de gouvernement et de nombreuses consultations publiques, incluant des audiences publiques, au cours desquelles plus de 120 mémoires ont été déposés et plusieurs centaines de questions d'approfondissement ont été demandées.
À titre de participant aux différentes phases des audiences, je dois saluer le travail de synthèse de la commission. Son rapport représente fidèlement les propos tenus par les différents intervenants qui ont participé au processus. Ses recommandations reflètent également la forte adhésion de la grande majorité de la population, pour qui l'amélioration durable de la qualité de vie passe par un accroissement des revenus provenant des exportations d'électricité. Pour la majorité des Québécois, la qualité de vie veut aussi dire une réduction des émissions de GES et de la dépendance sur le pétrole, et un accroissement de l'utilisation d'électricité du côté des transports collectifs et individuels.
Un avantage concurrentiel
La commission reconnaît également l'avantage concurrentiel dont le Québec dispose pour profiter des occasions d'affaires sur les marchés d'exportation. Elle mentionne que l'augmentation continue de la demande de ces marchés devra être comblée par de nouvelles installations ou par des échanges. La construction de nouvelles centrales avec réservoirs facilite l'intégration d'autres filières renouvelables intermittentes, comme l'éolienne, en permettant de fournir la puissance d'équilibrage requise pour pallier la variabilité du vent, et ce, sans émission de GES.
Nos voisins américains reconnaissent la contribution exceptionnelle de la filière hydroélectrique à la stabilité des réseaux électriques. À preuve, un programme visant la remise en valeur de plus de 160 000 MW d'hydroélectricité est en cours. À cela s'ajouteront plusieurs projets de centrales avec réserves pompées pour répondre aux périodes de pointe. L'Europe n'est pas en reste. Elle entend accroître sa production hydroélectrique pour maximiser l'intégration éolienne et réduire le rythme d'implantation des centrales thermiques alimentées au charbon.
Une question commerciale
Bien qu'il soit important de poursuivre la lutte pour faire reconnaître notre hydroélectricité comme renouvelable au sud de la frontière, la situation présente ne limite en rien notre capacité d'exporter. Elle limite notre accès au marché des crédits de carbone et aux subventions pour les énergies renouvelables de nouvelle génération. Somme toute, l'étiquette «énergie verte» ne prend d'importance que si le Québec veut obtenir des subventions américaines pour la production d'électricité. Que les États-Unis résistent à rendre l'hydroélectricité du Québec éligible au marché des crédits en lui accordant le statut d'énergie renouvelable n'a donc rien de surprenant: en règle générale, les subventions sont destinées à l'industrie locale naissante et non à l'industrie mature des voisins.
Par contre, dans les États du Nord-Est américain, notre marché naturel d'exportation, l'hydroélectricité du Québec est considérée comme une source non émettrice de GES. Ainsi, les importations d'hydroélectricité permettent à ces États de réduire leurs achats de coûteux crédits de carbone pour respecter leurs quotas d'émissions de GES. Il y a donc là un marché colossal pour notre hydroélectricité. Nos voisins demandent une option alternative à leur dépendance au charbon. L'exportation d'hydroélectricité québécoise est la solution de rechange et tous en bénéficieront, mis à part les lobbys du thermique.
L'AIEQ met donc en garde ceux qui seraient tentés de «fossoyer» l'économie du Québec en cherchant à freiner notre développement. Faire campagne chez nos voisins pour miner la crédibilité d'une industrie structurante pour le Québec -- une industrie qui produit plus de 5 % de son PIB -- est, en cette période économique difficile, une véritable insulte à tous les Québécois.
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Jean-François Samray, Président-directeur général Association de l'industrie électrique du Québec (AIEQ)

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