Réécrire l’histoire du Québec contre les Québécois

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Non, nous ne sommes pas tous des immigrants : nous sommes des descendants des colons français ayant construit ce pays

Les grands médias ont retenu de la commémoration de l’attentat de Québec que Justin Trudeau avait traité les sympathisants de La Meute de nonos. Pour piger dans le même lexique que le premier ministre, la formule était un peu nounoune, même si on n’en fera pas un drame.


On peut critiquer sévèrement La Meute sans utiliser un vocabulaire enfantin qui fait déjà simplet dans la cour d’école.


Couillard


Mais Philippe Couillard a prononcé un discours autrement plus important dans lequel il a proposé une inquiétante vision de l’histoire du Québec. Cette conception a des conséquences politiques.


Citons-le, comme rapporté par la Presse canadienne : « On est tous venus d’ailleurs rejoindre les Premières Nations, il n’y a que la date qui change. Et cette date ne détermine pas notre niveau de citoyenneté ».


Comment ne pas reconnaître ici une réécriture de l’histoire pour la soumettre au dogme multiculturaliste selon lequel nous serions « tous des immigrants ».


On comprend le message : pour Philippe Couillard, les colons qui ont fondé et construit la Nouvelle-France n’ont représenté en fait qu’une vague d’immigration parmi d’autres. Les 60 000 habitants présents lors de la Conquête n’étaient pas un peuple, ils n’avaient pas créé une société. Ils étaient les premiers migrants dans une longue chaîne appelée à se poursuivre jusqu’à aujourd’hui.


C’est un déclassement symbolique majeur, conforme, sans surprise, au multiculturalisme canadien.


Dans cet esprit, la majorité historique francophone n’est qu’une communauté parmi d’autres et non plus le cœur identitaire du pays.


Cela a des conséquences sur notre conception de l’intégration des immigrés.


De quel droit pourrions-nous leur demander de prendre le pli identitaire des Québécois francophones si ces derniers ne sont qu’un groupe parmi d’autres arrivés au fil d’une histoire dont le fil conducteur serait un incessant mouvement migratoire ?


Poussons plus loin : pourquoi assurer ici un statut particulier au français s’il s’agit de la langue d’un groupe parmi d’autres s’étant installé dans un territoire sans âme nommé Québec ?


Lorsqu’on va au bout de cette logique débilitante, on en arrive à dire que Montréal est un territoire amérindien non cédé. Québec solidaire, l’allié idéologique objectif du PLQ, n’hésite pas à aller jusque-là.


Aurait-on l’idée d’expliquer que les Roumains, en Roumanie, ne sont qu’un groupe culturel parmi d’autres ? Dirait-on la même chose aux Italiens en Italie et aux Grecs en Grèce ? Dirait-on la même chose aux Marocains au Maroc ?


Déracinement


Pourquoi dirait-on des Québécois francophones qu’ils sont des étrangers chez eux ?


Ils ont donné la preuve qu’ils étaient prêts à accueillir des immigrés, mais à condition qu’on les respecte comme peuple et qu’on embrasse leur réalité et leur identité.


Doivent-ils vraiment se déraciner historiquement pour faire une place à ceux qui les rejoignent ?


Étrangement, cette idée est celle de leur premier ministre.


Un jour, lorsqu’on écrira l’histoire de son mandat, on sera en droit d’intituler l’ouvrage : « Le premier ministre qui se méfiait de son peuple et gouvernait contre lui ».