Être souverainiste en 2018

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« Le Canada nous condamne à un destin néo-brunswickois­­­. »

On l’a souvent dit ces dernières années, le projet souverainiste ne passionne plus les Québécois. S’il conserve une base réelle, riche en militants dévoués, elle n’est pas sans régresser­­­.


Les débats qui ont enflammé les années 1960 aux années 1990 concernant l’indispensable réforme de la constitution canadienne pour l’ajuster aux besoins du Québec n’intéressent plus que les spécialistes. Elle continue quand même à nous étouffer, mais nous nous sommes habitués à manquer d’air.


Référendum


Quant à un troisième référendum, personne ne le voit à l’horizon. Bien des gens qui voteraient Oui ne croient plus qu’ils auront la chance de le faire un jour. Ils sont nombreux, parmi ceux-là, à s’être tournés vers la CAQ.


Quant aux fédéralistes, ils ne prennent même plus la peine d’argumenter contre elle. Ils se contentent de répéter qu’elle est dépassée.


Et pourtant, des centaines de milliers de Québécois continuent de croire, au fond d’eux-mêmes, que le Québec devrait être un pays. Normal : il s’agit d’une conviction profondément rationnelle, même si on veut nous faire croire le contraire.


Les Québécois forment une nation avec sa langue, sa culture, son identité, ses intérêts collectifs. Certes, ils ont des qualités et des défauts. Mais on se demande pourquoi ils ne prendraient pas eux-mêmes les décisions qui les concernent.


Surtout, dans le cadre du fédéralisme canadien, qui refuse de les traiter comme un peuple, les Québécois sont condamnés à avoir de moins en moins d’emprise sur leur destin.


Le multiculturalisme canadien les réduit à l’état de communauté ethnique toujours soupçonnée d’intolérance qu’il faut dompter grâce à la Cour suprême et sa Charte des droits.


Dans le Canada, le poids politique et démographique des Québécois est condamné à se diluer peu à peu. Et celui qui accepte sa minorisation accepte en fait, même sans s’en rendre compte, son infantilisation. Il accepte que d’autres décident à sa place.


Sans surprise, le fait français lui-même perd en importance dans le Canada. Au Québec même, l’anglicisation est en cours, comme on le voit à Montréal et Laval. Le Canada nous condamne à un destin néo-brunswickois­­­.


Si je prends la peine de rappeler ces arguments élémentaires, c’est pour dire qu’ils ne sont en rien dépassés. Ils touchent l’essentiel de la vie politique : soit on se gouverne, soit on se laisse gouverner.


Dépression


Étrangement, nous nous en fichons. C’est comme si les défaites de 1980 et, surtout, de 1995 nous avaient traumatisés et qu’aujourd’hui, nous préférons simplement ne plus en entendre parler.


Dans ce contexte, être souverainiste suppose de conserver ses convictions dans un environnement médiatique qui fait tout pour décourager ceux qui tiennent encore à l’indépendance. On les accuse de passéisme et de repli sur soi.


Les souverainistes militants qui gardent la flamme vivante rappellent aux Québécois l’existence d’un idéal immense.


Être souverainiste, c’est vouloir que le Québec vive à sa pleine mesure, sans demander à qui que ce soit la permission d’exister ou le droit de se nommer. En dernière instance, c’est une simple question d’honneur et de fierté.