Redevances minières - Changement de cap

Bfdd385ed4c5e2a3d855038f250897c7

Pas le Pérou, mais tout de même une amélioration réelle

Si la politique est l’art du possible, alors il faut admettre que le gouvernement Marois a taillé toute une brèche dans le régime d’impôt minier. Les minières auront eu beau tempêter sur tous les tons, toutes seront tenues de payer des redevances. Et ne serait-ce que sur ce seul principe, c’est une vraie rupture avec les libéraux.
En campagne électorale, l’impératif est clair pour les politiciens : chiffrez vos promesses ! réclament les adversaires… et les médias. Et puisqu’il s’agit de se faire élire, les partis dorent la pilule. On projette à long terme, les milliards pleuvent et les millions se ramassent à la pelle. Hélas toutefois pour eux, c’est à cette aune comptable que par la suite les réalisations sont comparées.
Il est donc vrai qu’en matière de redevances minières, le Parti québécois avait promis mer et monde l’été dernier. Avec son nouveau régime hybride, un gouvernement Marois s’assurait de centaines de millions de dollars de revenus annuels, avec quoi on pourrait éliminer la taxe santé, annuler une partie de la hausse des tarifs d’électricité, réduire la dette… Ah ! Perrette et son pot au lait…
Mais comme dans la fable, il faut se méfier des écueils de la route quand on la parcourt avec autant de projets en tête. En matière de redevances minières, ces écueils sont nombreux. La fluctuation des prix de la matière sur le marché international en est déjà un de taille. Mais surtout, il y a tout un barrage à traverser : celui des entreprises minières, toujours prêtes à clamer qu’elles vont retirer leurs billes si on les encadre trop.
Dès l’élection du gouvernement Marois, elles se sont livrées, avec l’appui de maires et de chambres de commerce, à une bataille féroce, signe des intérêts en jeu, s’attaquant à la ministre des Ressources naturelles Martine Ouellet, dénonçant un climat d’incertitude qu’elles alimentaient.
« Les compagnies minières vont essayer de nous faire peur […]. Nous devons résister à cette forme classique de chantage », disait Nicolas Marceau en campagne électorale. Ce fut au final une demi-résistance : entre le projet de départ du PQ et celui présenté lundi, les compromis ont été nombreux. On a modifié les façons de calculer l’impôt minier minimum et celui sur les profits, et ces deux impôts ne s’additionneront pas. C’est encore par les incitatifs que la transformation de la ressource au Québec sera encouragée. Pour qui rêvait mieux, c’est décevant.
Et pourtant, une bataille a été gagnée. Si le pot de Perrette s’est renversé, il ne s’est pas cassé et c’est en soi énorme. Maintenant, toutes les minières en activité au Québec payeront un impôt minimum. C’est une avancée. Réelle.
Car d’où part-on ? On part d’un rapport du vérificateur général qui, en 2009, démontrait que les sociétés minières payaient des broutilles en matière de droits. On part d’un gouvernement libéral qui se contentait d’aller chercher les redevances sur les profits nets des minières, faisant en sorte que, de 2002 à 2008, 40 % des entreprises n’ont rien versé, 50 % en 2011.
Il faut voir encore dans quel environnement favorable les minières travaillaient sous les libéraux. Pas question pour le gouvernement de les pousser à faire de la transformation locale ; pas question non plus d’exiger d’elles une contribution financière pour restaurer les sites miniers exploités. Pas question non plus de lever le secret (!) quant au nombre et au nom des entreprises payant des redevances, encore moins de connaître le montant versé par chacune. Un monde à part, bien protégé.
Ce temps-là vient de se terminer. Outre les redevances, le nouveau régime minier soutiendra davantage la transformation sur place : ce ne sont pas les contraintes souhaitées par plusieurs, mais ce n’est pas le laisser-faire. La Loi sur les mines sera par ailleurs modifiée pour assurer la restauration des sites. De plus, toute l’information sur les redevances payées et le tonnage extrait sera, enfin, rendue publique.
ll y aurait moyen de faire mieux : le monde minier reste marqué d’une culture du Far West digne du XIXe siècle. Creuser l’emporte encore sur les exigences environnementales et citoyennes, et la législation s’en fait l’écho. À cet égard, il n’y a pas de révolution : la Loi sur les mines ne sera pas réécrite. Mais contre vents et marées, le gouvernement Marois fait un effort.
Alors qu’il relançait mardi à sa façon le Plan Nord et qu’on attend de voir en quoi, hors l’esbroufe, son « Nord pour tous » se distinguera du grand projet de Jean Charest, il est au moins clair qu’en matière minière, le gouvernement part sur de nouvelles bases. Ce n’est pas rien dans un secteur qui n’a de cesse d’imposer son exigence : qu’on lui laisse les coudées franches.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->