L’Histoire que je vais vous raconter s'est déroulée vers la fin du mois de mars et le premier avril 1918. La ville de Québec était alors secouée par des anticonscriptionistes. Après l’arrestation d’un jeune homme nommé Joseph Mercier, des manifestants attaquèrent le poste de police de la place Jacques-Cartier située dans le quartier Saint-Roch. Le lendemain, nos joyeux révoltés se rendirent dans les bureaux de recrutement militaire localisés place Montcalm (l’actuel carré d’Youville), pour brûler les documents qu’ils trouvèrent sur place. Ils attaquèrent aussi L’Événement et le Chronicle, des journaux qui véhiculaient de la propagande appuyant la conscription.
Bien sûr, ayant trop longuement volé le bon peuple, au lieu de créer de l’emploi, nos amis les capitalistes envoyaient au front les chômeurs, afin de rétablir l’ordre de la bourgeoiserie et sa démocrasserie. Ils firent appel à un grand Canayen França, le major-général François-Louis Lessard. Celui-ci possédait passablement d’expérience dans le domaine, puisqu’il avait déjà maté des ouvriers grévistes québécois en 1878 et des Métis en 1885. Il était devenu comme qui dirait « a pure Canadian ». J’imagine que les patrons de Lessard devaient jouir à l'idée d’envoyer un Québécois de souche tuer ses semblables.
C’est à grand renfort de mitrailleuses que notre héros régla le problème au coin des rues Saint-Vallier et Saint-Joseph. Les militaires se payèrent alors toute une traite, tuant quatre personnes, dont trois ouvriers. L’un d’eux (Georges Demeule) était âgé d’à peine quinze ans. Ah! Ce fut un jour mémorable. Les habitants du quartier virent toute la grandeur, la splendeur et la magnificence de la couronne britannique. Depuis, nous sommes tous fiers d’être Canayens.
Par ailleurs, est-il juste que ce brave Georges Demeule soit presque complètement disparu de notre mémoire collective aujourd'hui, sous prétexte que ce n’était qu'un pauvre ouvrier révolté contre Sa Majesté ? Allez poser la question à Madame Pauline Marois, cette grande souverainiste sociale-démocrate et à son cortège de schtroumpfs.
Sur cela, j’aimerais saluer Mathieu Houle-Courcelles (que j’ai abondamment paraphrasé ici), car il m'a ouvert les yeux sur l’amnésie volontaire des autorités, lorsqu'il s’agit de luttes ouvrières, anticapitalistes et anticolonialistes.
IN MEMORIAM à l'occasion du 1er juillet
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3 commentaires
Archives de Vigile Répondre
5 novembre 20155 novembre 2015
Georges Demeule était mon oncle que je n'ai jamais connu car je suis née après ces événements. Comme vous dites selon ce que ma famille m'a raconté, il était au mauvais endroit au mauvais moment.
Pauline Demeule
Archives de Vigile Répondre
27 août 2013Geroges Demeule n'a pas "Participé" aux émeutes. Il est recensé que lors de la tuerie, il se rendait jouer au "Eurches?" chez un ami, ayant en sa possession un jeu de carte neuf qu'il avait acheté pour l'occasion.
Le Coroner avait par la suite établi que les 4 victimes était innocentes de tout délit et s'étaient simplement retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Il avait ensuite émis des recommandations, l'une d'elle étant de donner au familles de "justes compensations", proposition qui à été rejetée. Les proches des victimes n'ont donc jamais rien recus.
Archives de Vigile Répondre
28 juin 2013J'ai fait référence à cet épisode de notre Histoire dans "De Londres à Ottawa,le terrorisme d'État dans l'histoire du Québec", article paru en octobre 2000 dans L'Action nationale.
Pourtant, j'ignorais la participation de ce Georges Demeule aux émeutes, pire, j'ignorais même son existence.
Merci infiniment, monsieur Benoît pour l'ancrage de cet énième moment de notre lutte séculaire dans le rappel du nom et de l'action d'une personne qui y a laissé sa vie.
Votre toute reconnaissante,
Andrée Ferretti.