Quelques questions à François Legault

Pour l'avenir du Québec ?

CAQ - Coalition pour l’avenir du Québec

De l'économie
Vous partez du principe que « les Québécois vivent un écart de richesse important face à leurs voisins américains ». Vous ajoutez que cet écart a eu tendance à s’accroître au cours des trente dernières années. Or, d'après les calculs de Jean-François Lisée et Pierre Fortin, sans tenir compte de ceux qui forment le 1% de la population la plus riche des États-Unis et du Québec, le revenu de 99% des Québécois est supérieur à celui de 99% des Américains. Ne tentez-vous pas de dramatiser une situation pour vous créer un rôle de sauveur ?
Lorsque vous terminez votre introduction en soulignant que « la santé financière du gouvernement du Québec est compromise par une dette qui s’accroît continuellement », à nulle part vous faites référence à la responsabilité des entreprises dans l'accroissement de cette dette : de 1964 à 2004, la contribution des entreprises aux recettes fiscales du Québec est passée de 38% à 12% et n'a cessé de décroître depuis ce temps. En résumé, ces entreprises paient aujourd’hui 42% moins d’impôts qu’il y a quarante ans, alors que leurs bénéfices ont triplé.
À St-Jérôme, vous proposiez de couper 4000 postes à Hydro-Québec. Or, en 2009, Hydro-Québec, sans aucune subvention gouvernementale, contribuait davantage à l'assiette fiscale du Québec (4,7G$) que l'ensemble des entreprises privées de la province (3,2G$) alors que ces dernières touchaient 3,6 G$ en subventions. En traitant ainsi Hydro-Québec, n'êtes-vous pas en train de proposer de tuer la poule aux oeufs d'or ?
De la démocratie
En Outaouais vous nous avez dit que le Québec a un besoin de profonds changements que vous accomplirez sans tenir compte des sondages, donc de l'opinion de la population. Quelle différence cela fait-il avec le gouvernement actuel qui refuse de tenir compte du fait que plus de 80% de la population réclament une commission d'enquête publique sur la corruption ?
Par contre, quand il est question de souveraineté du Québec, l'opinion publique vous semble plus impérative : « On prend acte du fait que les gens ne sont pas là ». Mais vous savez pertinemment que les Québécois envoient chaque année des milliards à Ottawa pour soutenir une guerre en Afghanistan à laquelle nous nous opposons majoritairement. Pour sauver l'industrie de l'automobile ontarienne alors qu'on laisse sécher notre industrie forestière. Pour financer le transport de l'électricité de Terre-Neuve vers les États-Unis lui permettant ainsi d'entrer en concurrence directe avec Hydro-Québec. Comment pouvez-vous affirmer être hautement préoccupé par notre dette publique ?
De l'éducation
Vous terminez votre texte de consultation économique en ces termes « nous croyons fermement que tout passe par l’éducation ». Vous proposez alors d'augmenter le taux de diplômation des jeunes : on ne peut qu'applaudir. Mais quand vous prétendez y arriver en abolissant Cégeps et commissions scolaires et en évaluant les enseignants deux fois par année, entre autres sur la réussite de leurs élèves, vous nous laissez perplexes.
Voici ce qu'écrivait Diane Ravitch : « Lorsque j’ai quitté le gouvernement, je défendais le principe de la rémunération au mérite : j’estimais que les enseignants dont les élèves obtenaient les meilleurs résultats devaient être mieux payés que les autres. Aujourd’hui, en observant les effets concrets de ces politiques, j’ai changé d’avis : je considère désormais que la qualité de l’enseignement que reçoivent les enfants prime sur les problèmes de gestion, d’organisation ou d’évaluation des établissements. » Ravitch était vice-ministre de l’Éducation sous l'administration de M. George H. W. Bush et elle est l'auteur du livre The Death and Life of the Great American School System dans lequel elle décrit les conséquences catastrophiques de ce que vous nous proposez comme solutions. Ne craignez-vous pas d'aggraver une situation que vous prétendez vouloir améliorer ?
Du rôle de l'État
Quelle sera la place de l'État dans un gouvernement Legault ? À travers vos textes, vous proposez « un rôle allégé pour le ministère de la Santé », en Éducation vous dites que le ministère « devrait se concentrer sur les objectifs, les politiques et l’allocation des ressources  » et dans le domaine économique vous réduisez son rôle à celui d'« accompagnateur ».
Le rapport Duchesneau a pourtant mis en lumière ce qu'engendre la diminution de la taille de l'État : le ministère des Transports n'a même plus les compétences pour évaluer le travail qu'il confie aux entreprises privées. Et au ministère de l'Environnement, on se fie maintenant à la bonne foi des entreprises « partenaires », autrefois appelées « pollueurs »...
La crise économique de 2008 et celle que nous vivrons inévitablement sous peu mettent pourtant en évidence les conséquences d'un État effacé qui laisse toute la place aux marchés.
Monsieur Legault, de quel avenir parlez-vous pour le Québec ?


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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    16 octobre 2011

    M. Proulx,
    Votre article me plaît énormément. Je me dis, enfin une œuvre pédagogique. Le contenu est éclairant parce que concret. Ça me change des débats divisionnaires, sans doute essentiels, entre souverainistes dits mous et indépendantistes dits pures et dures. Vous, vous présentez des faits, des faits et encore des faits. Merci.

  • Pierre Grandchamp Répondre

    15 octobre 2011

    En ce qui concerne la disparition des Commissions scolaires, le New Brunswick l'a déjà fait et a dû y revenir.
    Avec la disparition des Commissions scolaires, cela signifie que l'arbitrage des besoins et des équipements dans le territoire de l'ex-Commission scolaire serait fait par des fonctionnaires du bureau régional du Ministère de l'Éducation: le centre de décisions serait loin du milieu.
    Quant à l'évaluation au mérite des enseignants, c'est très dangereux.On peut peut-être évaluer des vendeurs d'assurances..mais encore là!
    Je pense que c'est au niveau du Ministère de l'Éducation qu'il faudrait effectuer des coupures!