Quel front de beu il a ce Macpherson :

Tribune libre

Il fallait bien s’attendre à ce que notre bonne vieille Gazette réagisse aux allégations contenues dans La Bataille de Londres. Elle l’a justement fait le 12 avril avec un titre en éditorial qui résume, on ne peut plus clair, la pensée de la direction du journal : The Supreme Court and a tempest in a teapot.
Ne sont donc qu’anodins les faits révélés par Frédéric Bastien, faits voulant qu’en 1981 deux juges de la Cour suprême aient joué dans les coulisses du pouvoir à Londres afin d’accélérer le processus du rapatriement de la Constitution.
Façon comme une autre pour la Gazette de minimiser un fait extrêmement troublant par une petite pirouette métaphorique. Mais, dans ce cas précis, le summum de la haute voltige de la mauvaise foi revient sans aucun doute à Don Macpherson avec sa chronique There are times when the end justifies the means du 13 avril.
Comparer PET à Lincoln !
Vous avez, hélas chers lecteurs, très bien compris qu’en 1981 pour notre « ami » Macpherson, la fin justifiait les moyens. Selon notre homme, Il y a des temps comme cela dans l’histoire des peuples où on n’a pas à s’enfarger dans les fleurs du tapis.
En 1864, en pleine guerre de Sécession, écrit le chroniqueur, Lincoln n’a-t-il pas usé des méthodes peu orthodoxes pour en arriver à ses fins, soit de permettre la fin de l’esclavage aux États-Unis? Les Laskin et Trudeau se devaient donc eux-aussi d’être peu scrupuleux dans les moyens utilisés pour en arriver à leurs fins.
On ne peut être plus clair. Selon Macpherson, dans l’histoire d’une grande nation telle le Canada, il y a des temps où la fin justifie les moyens. Et, si on suit la logique de Macpherson, Laskin aurait pu en 1981 faire pire que cela n’aurait pas été si grave. Le moment était trop important. Il fallait à tout prix sauver le Canada des séparatistes en rapatriant au plus vite le BNA Act. Il fallait surtout profiter du fait que « ces méchants séparatistes » détenaient les rênes du pouvoir à Québec.
Certains pourraient en effet penser qu’on aurait pu attendre encore quelques années afin que le jeu de l’alternance finisse par reporter au pouvoir le très fédéraliste PLQ. Mais les Trudeau et Chrétien ne voulaient pas d’un tel scénario. Et Macpherson sait trop bien pourquoi.
Pas question d’attendre
Le chroniqueur de The Gazette sait très bien qu’aucun chef de parti au Québec ne pouvait accepter que l’on associe à une constitution rapatriée une charte des droits et des libertés ayant pour effet de diminuer les pouvoirs de l’Assemblée nationale. Surtout en matière de langue de culture. Or, Macpherson a toujours été à l’affut des dangers qui peuvent remettre en cause les privilèges – les droits acquis - de la minorité anglaise au Québec.
Ce risque de perdre ce suprématisme du tout à l’anglais, il existe depuis le début de la Révolution tranquille. Macpherson sait que ce sont les libéraux qui, dès la campagne électorale de 1962, ont ouvert toute grande la porte au courant nationaliste. Le slogan Maitres chez-nous, vous connaissez? En 1981, on ne pouvait pas trop leur faire confiance. Surtout avec Claude Ryan comme chef. Pas plus qu’avec son successeur. En 1975, n’est-ce pas Robert Bourassa qui, avec sa loi 22, a permis que le français devienne la seule langue officielle du Québec? Et qui a obligé les enfants d’immigrants de subir un test d’anglais afin d’être éligible à fréquenter l’école anglaise?
Macpherson sait également qu’à l’époque, Pierre-Elliot Trudeau ne pouvait pas, sans payer un énorme prix politique, désavouer la loi 22 comme la vieille constitution de 1867 lui permettait encore de le faire. Macpherson était au courant qu’il ne restait qu’une seule solution : rapatrier cette constitution et y associer une Charte des droits et libertés restreignant les pouvoirs de l’Assemblées nationale du Québec.
Prendre tous les moyens pour arriver à ses fins
Macpherson est bien au courant que, dans la tête de Trudeau, prendre tous les moyens pour arriver à ses fins étaient inscrits dans sa façon d’opérer dès son accession au pouvoir. C’est d’ailleurs ce que l’establishment canadien attendait de cet intellectuel organique. C’est ainsi que, sans scrupule, il a muselé les journalistes de Radio-Canada jugés trop « crypto-séparatistes ». C’est également parce que, dans a tête, la fin justifiait les moyens qu’il il a fait emprisonner sans raison plus de cinq-cents personnes innocentes pendant une crise d’octobre montée de toute pièces. Question de terrasser une fois pour toute l’hydre séparatiste.
Mais plus encore que ces deux forfaits, plus encore que des juges de Cour suprême qui ne respectent pas le sacro-saint principe de la séparation des pouvoirs si cher à Montesquieu, c’est l’affront que Pierre Elliot Trudeau a fait au peuple québécois en 1981 qui démontre hors de tout doute que, quand il s’agit de contourner les droits du Québec et des parlants français, l’histoire de ce pays fourmille de cas où on ne s’enfarge aucunement dans les fleurs du tapis.
Lors de la Nuit des longs couteaux, c’est sans scrupule que Trudeau a rallié les neuf provinces anglaises contre le Québec. Il a ainsi imposé aux Québécoises et aux Québécois une constitution qui va tout-à-fait à l’encontre de la promesse de changement que, à la toute veille du référendum, il avait faite au Centre Paul-Sauvé. Mais faut-il alors comparer PET à Lincoln? En tout cas, Macpherson se permet de faire une telle amalgame.
Sordide façon de banaliser le sort des Noirs aux USA
Il faut bien être au Québec pour qu’une majorité accepte qu’un aussi puissant porte-voix de la minorité se permette de prononcer une telle ineptie sans que cela occasionne le moindre éclat.
Comparer les agissements d’un Trudeau à un certain geste si peu orthodoxe de Lincoln, c’est subtilement comparer le sort de la minorité anglo-québécoise à celui que faisait subir les sudistes étasuniens aux esclaves noirs avant les interventions du célèbre président. C’est mettre sur le même pied les dires du grand Lincoln avec la loufoque sentence de Trudeau voulant qu’une possible indépendance du Québec soit rien de moins « qu’un crime contre l’humanité ».
Le pire de toute cette histoire, c’est qu’en déblatérant ainsi en ce 13 avril 2013, en déclarant que tous les moyens, même les plus immoraux, soient bons pour sauver le Canada, ou tout simplement pour sauvegarder les privilèges de « notre minorité historique », Macpherson démontre que rien n’a changé depuis 1981.
Et les exemples ne manquent pas. Songeons seulement aux dépenses éhontées du gouvernement fédéral en faveur du camp du non pendant a campagne référendaire de 1995. Songeons à la boulimie des naturalisations qui l’a accompagnée. Songeons à l’orgie des commandites qui l’a suivie, le motif étant de nous mettre de force le Canada dans la gorge. Songeons enfin à un Clarity Bill qui n’a d’autre objectif que de nier que le Québec forme une nation et que, de ce fait, quoiqu’on dise, quoiqu’on fasse, question de paraphraser un certain premier ministre, cette dite nation est maître de son destin.
Parce qu’il se permet de comparer Pierre-Elliott Trudeau à Abraham Lincoln dans l’utilisation des moyens pour arriver à ses fins, je me dois de dire que Don Macpherson est un sournois personnage. Pour ne pas dire sinistre.


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2 commentaires

  • Alain Raby Répondre

    28 avril 2013


    Nos parlementaires devraient s'inspirer d'Abraham Lincoln et contrevenir à la constitution pour décréter l'émancipation de la Nation Québécoise. Ou bien un vote parlementaire pourrait être pris par nos représentants élus à l'Assemblée nationale pour proclamer l'indépendance du Québec. le référendum viendrait après. De telles déclarations d'indépendance avant référendum ont souvent eu lieu récemment en ce monde. Ces nouveaux pays ont été rapidement reconnus par les autres états indépendants, y compris par le Canada et furent acceptés par les Nations-Unies, parce que le droit international reconnait la déclaration unilatérale d'indépendance, le référendum n'étant considéré que consultatif par cette plus haute instance internationale. Mais voilà, il faudrait cran, audace et détermination.
    La proclamation de l’indépendance par les élus du peuple : De nombreux exemples parmi les nations
    Voici un tableau pour illustrer l’idée que l’Assemblée nationale du Québec pourrait proclamer l’indépendance du Québec et ensuite prendre tout son temps pour organiser un référendum. Le Canada lui-même a rapidement reconnu la légitimité et la légalité de cette procédure pour plusieurs nouveaux pays.


    Déclaration d`indépendance Tenue de référendum Entrée à l`ONU
    Norvège 7juin 1905 août 1905 27septembre 1945
    Estonie 2 février 1990 3 mars 1990 17sept.1991
    Lituanie 11 mars 1990 9 février1991 17 sept.1991
    Lettonie 4 mai 1990 3 mars 1991 17sept 1991
    Slovénie 2 juillet 1990 23 dec.1990 22 mai 1992
    Ukraine 16 juillet 1990 1 dec.1991 24oct 1945
    Arménie 23août 1990 21 sept 1991 2 mars 1992
    Le Kosovo a aussi procédé à une déclaration unilatérale et a été reconnu internationalement y compris par le Canada en 2008. Au 25 avril 2012, 91 pays avait reconnu l’indépendance du Kosovo( voir Google).
    Plusieurs autres pays n`ont même pas daigné procéder à un référendum après que leurs élus eurent proclamé l`indépendance nationale et ils ont été acceptés par le Canada, les autres pays et l`ONU. On sait que la déclaration unilatérale d’indépendance est considérée légale en droit international et donc par la Cour internationale de justice, alors que le référendum n’est considéré que comme consultatif
    Exemple :la Slovaquie, la Biélorussie l`Azerbaidjan pour ne nommer que ceux-là.
    Alors la Nation Québécoise, son peuple et son état, eux…...
    Alain Raby, 4 Place de l’église, Saint-Jean-Port-Joli,

  • Archives de Vigile Répondre

    28 avril 2013

    Comparativement à La Gazette, nous avons les radios-X pour alimenter à grands coups de sophisme et de démagogie la classe ouvrière facilement influençable.
    La soirée est (encore) jeune. (Radio-Canada)
    Le vendredi de 19 h à 20 h
    Merci à Olivier Niquet avec sa revue hebdomadaire "Le bêtisier des médias"
    Contrairement à bien des gens, il ne sort pas ses poubelles, il les écoutent.
    Olivier Niquet contemple fièrement sa récolte de moments radiophoniques croustillants de la semaine.
    Olivier Niquet revient sur les réactions des « larves de gauche » autour des attentats de Boston, sur la Journée de la Terre et sur Montréal qui noie le Québec.
    http://www.radio-canada.ca/emissions/la_soiree_est_encore_jeune/2012/archives.asp?date=2013/04/26&indTime=2103&idmedia=6675248