L’exemple magistral du Nouveau-Brunswick

Québécois, mobilisez-vous !

Quand une population se tient debout, elle se fait respecter…

Chronique de Richard Le Hir



Comme il fallait s’y attendre et que je l’avais pour ma anticipé dès l’annonce du projet en novembre dernier, les Néo-Brunswickois ont servi hier une sévère correction au premier ministre Shawn Graham en renvoyant son parti sur les banquettes de l’opposition pour l’insistance qu’il a mise à défendre son projet de vente d’Énergie NB à Hydro-Québec.
Lorsque, sous la force de la pression populaire dans sa province, Graham finit par se rendre à l’évidence que son coup de force était condamné à l’échec, il appela à la rescousse son comparse Jean Charest, et ce fut Charest, en annonçant le retrait d’Hydro-Québec pour des considérations prétendument d’ordre financier, qui lui évita l’humiliation d’avoir à l’annoncer lui-même dans une mise en scène que je n’avais pas hésité à qualifier de fumisterie http://www.vigile.net/Un-pretexte-fumiste .
Quelques jours plus tard, cherchant à tirer les leçons de cette expérience pour les Québécois, j’écrivais ceci :
« L’annulation de la vente d’Énergie NB à Hydro-Québec est une victoire des Néo-Brunswickois qui peuvent se vanter d’avoir rendu un fier service à leurs voisins Québécois. Connaissant bien les gens de cette région pour y avoir vécu et travaillé, j’ai compris dès l’annonce de la transaction qu’elle ne passerait pas comme du beurre dans la poêle. Dès le lendemain de l’annonce de cette transaction, Le Devoir et La Presse publiaient tous deux dans leurs chroniques d’opinion un article que j’avais intitulé : « Une version « affaires » de l’accord du lac Meech ? », disponible sur Vigile. J’y expliquais que les gens de l’Atlantique tiennent comme à la prunelle de leurs yeux aux rares instruments de développement qu’ils possèdent.
Je ne m’étais pas trompé. La réaction a été si vive que la région est en pleine ébullition depuis. On a assisté à une mobilisation sans précédent d’une population généralement très placide et peu encline aux débordements. Devant ce qui lui paraissait totalement inacceptable, cette population a tenu tête à son premier ministre et au lobby des grandes entreprises réunies sous la houlette des Irving. L’enjeu pour elles était la possibilité de réduire le coût de leur approvisionnement en électricité, Hydro-Québec étant reconnue pour se montrer accommodante envers la grande industrie. Et effectivement, l’offre d’Hydro-Québec les avantageait. Pour elles, c’est le retour à la case zéro.
L’annulation de cette transaction est une victoire pour la démocratie, et les Québécois viennent de se faire servir une leçon dont ils feraient bien de s’inspirer. Ici, le nombre de nos défaites a anesthésié notre capacité à nous indigner devant ce qui est manifestement inacceptable ou profondément injuste, et à nous mobiliser pour nous y opposer. Notre réflexe en est devenu un de résignation passive. C’est ce qui explique que le gouvernement Charest puisse encore maintenir son refus de tenir une enquête sur l’industrie de la construction et ses liens avec le pouvoir sans craindre la sanction de la rue. »

Quelques mois plus tard, je suis surpris de voir combien ce texte n’a rien perdu de sa pertinence.
Sur leur lancée du printemps dernier, les Néo-Brunswickois ont tiré les conclusions qui s’imposaient et ont prestement montré la porte à Shawn Graham au terme d’une campagne électorale dont l’issue n’a jamais fait de doute, tant l’indignation des Néo-Brunswickois était grande devant le projet de Shawn Graham. Seule restait à déterminer l’ampleur de la dégelée qu’ils allaient lui servir.
Dans une province où les résultats des dernières élections générales ont été très serrés, il n’y a désormais plus de place pour l’ambiguïté. Les Conservateurs sont très majoritaires à 49 % des voix contre 34 % pour les Libéraux de Shawn Graham, ce qui se traduit au plan des sièges par 42 contre 13.
Pour la bonne intelligence de cette leçon, il faut souligner que le chef Conservateur, David Alward, s’est immédiatement emparé de l’initiative dès l’annonce du projet d’acquisition d’Énergie NB par Hydro-Québec, et qu’il n’a cessé pendant six mois de presser ses compatriotes à se mobiliser pour renverser le gouvernement Graham. Il est parvenu à ses fins, lui.
Pauline Marois gagnerait sûrement à le consulter.


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