Compte tenu d’une rareté de main-d’oeuvre très réelle avec laquelle composent plusieurs régions du Québec, le gouvernement Legault espère augmenter la participation au marché du travail en misant sur la hausse d’un crédit d’impôt pour les travailleurs de 60 ans et plus tout en réduisant les charges des sociétés qui les embauchent. En parallèle, il prévoit dès cette année verser des sommes au ministère de l’Immigration pour mieux intégrer les immigrants au marché du travail.
Alors que le taux d’emploi du Québec est supérieur à celui de l’Ontario chez les 25 à 59 ans, la situation s’inverse chez les plus de 60 ans : il était de 20,8 % l’an dernier, comparativement à 25,2 % en Ontario. Si le marché du travail accueillait suffisamment de Québécois de 60 ans et plus pour fermer cet écart, « ce sont 90 000 travailleurs sur lesquels le Québec pourrait compter » pour contribuer à la croissance économique, a fait valoir le ministre des Finances, Eric Girard.
La bonification du crédit d’impôt pour « prolonger la carrière » des travailleurs de 60 ans et plus représente pour Québec une dépense de 105 millions cette année et de 533 millions sur cinq ans. En gros, l’âge d’admissibilité passe de 61 à 60 ans, et le budget augmente à 10 000$ le plafond des revenus excédentaires admissibles au crédit. Dans les faits, un travailleur de 60 ans pourrait bénéficier d’une baisse d’impôt maximale de 1500 $ grâce à la mesure, l’effet étant graduellement moindre pour les personnes plus âgées.
« Pour une personne de 60 ans n’ayant que des revenus de travail, le crédit d’impôt bonifié viendra augmenter de 18 129 $ à 28 226 $ le niveau de revenu à partir duquel elle paie l’impôt du Québec », précise le budget Girard. La mesure aura un effet auprès d’environ 158 000 personnes, dont plus de 20 000 « qui n’auront plus d’impôt à payer au Québec ».
Selon la FADOQ, le geste découle d’une « décision judicieuse » et « valorise » la présence des aînés sur le marché du travail.
La réduction du bassin de la main-d’oeuvre s’est opérée de pair avec le vieillissement de la population, lequel « continuera d’exercer des pressions sur le marché du travail », prévient toutefois le plan budgétaire. Le rétrécissement du groupe des 15-64 ans fait en sorte que « la démographie au Québec ne contribue plus à la progression du PIB réel ». Cela dit, « des gains seront encore possibles pour les travailleurs expérimentés et pour les immigrants ».
Sur le plan de l’immigration, le gouvernement propose un « parcours personnalisé » pour aider les arrivants à mieux prendre leur place. Les détails viendront plus tard, mais Québec prévoit déjà verser 730 millions sur cinq ans au ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion. (voir autre texte ci-bas).
Dans un deuxième temps, la réduction des charges sur la masse salariale annoncée par Québec bénéficiera à environ 34 000 petites et moyennes entreprises pour un coût fiscal de 339 millions sur cinq ans.
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) affirme que ses demandes ont été entendues. Les travailleurs retraités sont « une excellente main-d’oeuvre » dans le secteur des services, par exemple le commerce de détail ou l’hébergement, a dit sa porte-parole nationale, Martine Hébert. Pour une PME, calcule la FCEI, la mesure représentera une économie potentielle de 1250 $ par année pour l’embauche d’une personne de 60 à 64 ans, et de 1875 $ pour un travailleur de 65 ans.
Le Conseil du patronat du Québec a déploré que la mesure ne s’applique qu’aux PME. Selon les résultats qui seront obtenus, a proposé la Fédération des chambres de commerce du Québec, la mesure devrait être étendue aux plus grands employeurs.
La mesure aura « peu d’impact » sur les employés du secteur manufacturier, ont estimé Manufacturiers et Exportateurs du Québec, qui se réjouit toutefois d’autres mesures comme la bonification du congé fiscal pour les grands projets en région.