Québec ne va pas assez loin

Par Étienne Couture

17. Actualité archives 2007


En décembre dernier, le premier ministre du Québec et le ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation annonçaient la nouvelle stratégie de la recherche et de l'innovation. Les milieux de la recherche publique et industrielle ont applaudi celle-ci sans équivoque. Quant à lui, le Réseau des ingénieurs du Québec croit que la stratégie ne va pas assez loin.
La stratégie québécoise de recherche et d'innovation révèle deux constats inquiétants. D'abord, les PME québécoises continuent de se limiter aux innovations les plus simples et les moins exigeantes en investissements. Ensuite, les 6775 entreprises actives en R-D (recherche et développement) ne représentent que 3 % des entreprises recensées et leur investissement ne correspond en moyenne qu'à 48 % des sommes investies par les entreprises ontariennes actives en R-D. Autrement dit, nos entreprises investissent la moitié moins que leurs consoeurs ontariennes en innovation.
Aussi, que devrions-nous faire pour renverser la vapeur et augmenter le nombre d'entreprises innovatrices actives en R-D ? Comment accroître les sommes investies par les entreprises québécoises actives en R-D ? Comment améliorer la qualité de la recherche et augmenter les investissements en R-D et comment s'assurer que les applications issues de la R-D pourront véritablement être utilisées dans les PME ?
Le Réseau des ingénieurs du Québec croit qu'il faut réfléchir à toutes ces questions. Cependant, nous aurions souhaité que la stratégie proposée aille plus loin en s'attaquant davantage à ces questions et en formulant des cibles précises pour chacune, et que celles-ci soient échelonnées dans le temps.
De même, la volonté du Réseau des ingénieurs du Québec est que l'innovation se réalise, qu'elle pénètre le tissu industriel et commercial et quelle produise des effets accélérateurs sur l'économie québécoise. De par la nature de leur travail et le rôle stratégique dans les entreprises, les ingénieurs ont un rôle central à jouer pour les aider à innover et pour permettre au Québec de maintenir et développer sa capacité innovante. En ce sens, la stratégie devrait aller plus loin en favorisant, entre autres, l'utilisation des ingénieurs dans nos PME.
Agents de changements
La majorité des petites entreprises et quelques moyennes n'ont pas l'infrastructure intellectuelle nécessaire pour faciliter l'application de nouvelles innovations. Il en résulte que celles-ci ne se font pas toujours adéquatement, lorsqu'elles se réalisent malgré tout. Pourtant, l'expérience démontre clairement que lorsqu'un ingénieur travaille dans une PME, il provoque des innovations en tout genre qui font progresser l'entreprise.
Pour remédier à la situation et permettre l'implantation de technologies sophistiquées dans nos PME, le Réseau des ingénieurs du Québec propose de mettre sur pied un programme d'aide aux PME. Ce programme leur permettrait tout simplement d'aller chercher une partie du financement nécessaire afin d'obtenir les services d'ingénieurs pour faciliter l'implantation de technologies innovantes dans l'entreprise. En attendant, l'Ontario multiplie les annonces pour favoriser l'innovation dans les entreprises. Il faut donc réagir rapidement et déterminer à quels coûts, sur quelle période et combien d'entreprises pourraient bénéficier de l'implantation de technologies innovantes par les ingénieurs notamment pour mieux faire face à la concurrence étrangère.
Prime au rendement
La stratégie devrait aller plus loin en primant les entreprises qui prennent ou accentuent le virage vers l'innovation, notamment en terme de qualité et d'investissement. Ainsi, elle devrait favoriser la réalisation de diagnostics de R-D dans les PME qui ont moins de moyens que les grandes entreprises. Ils mesureraient le potentiel d'innovations ou d'amélioration par l'innovation. La réalisation de ces innovations pourrait ensuite se faire à l'interne ou par le biais d'appels à des ressources externes en tout genre (ingénieurs, firmes privées ou publiques, centres de recherche, etc.). Les améliorations ainsi effectuées et les partenariats entre l'entreprise et les ressources externes pourraient être financées en partie par la stratégie. Cette ouverture sur l'innovation permettrait à nos dirigeants de PME de mieux comprendre l'importance de l'innovation comme outil de développement de leur entreprise.
Une vision
Sans réelle planification et sans cible définie, la volonté exprimée dans la stratégie québécoise de la recherche et de l'innovation de créer un Québec innovant risque de se diriger nulle part.
Le Québec doit mettre en place une stratégie qui permette de maximiser la portée de la recherche effectuée afin qu'elle produise les effets escomptés. Considérant les coûts de la recherche et le nombre limité de ressources s'y consacrant, il importe de les utiliser de façon optimale. Pour ne pas manquer sa cible et relever adéquatement les défis de la mondialisation, la stratégie québécoise de la recherche et de l'innovation doit aller plus loin et favoriser l'implantation d'une véritable culture de l'innovation au sein des entreprises québécoises, il en va du maintien de notre niveau de vie.
Étienne Couture, ing.
président,
Réseau des ingénieurs du Québec


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