Tania Longpré : Comprendre les enjeux de l’immigration

Québec cherche Québécois pour relation à long terme

0d80b106d71dd33c48858301527470c7

Vigile — lectures

Avec un titre accrocheur et une trame narrative personnalisée, ce livre traite d’une question controversée et vitale pour l’avenir du Québec. Comment réussir l’intégration des nouveaux arrivants? Son auteur qui a de profondes racines italiennes peut en parler en connaissance de cause puisqu’elle est un modèle d’intégration réussie et que sa vie professionnelle est consacrée à l’enseignement du français aux immigrants. «Devant le succès de l’intégration de ma famille maternelle à leur nouvelle société, j’ai décidé d’agir concrètement après des immigrants. La langue étant le premier outil de l’intégration, j’ai choisi de devenir enseignante de francisation. » (p.14) C’est à la lumière de ses expériences personnelles qu’elle analyse les obstacles à l’intégration des immigrants et qu’elle propose des solutions. Les réflexions de Tania Longpré sont enracinées dans le terreau de ses relations concrètes et personnelles avec le monde réel des immigrants ce qui nous préserve des slogans réducteurs qui affectent trop souvent les débats sur l’immigration.
Son raisonnement repose sur quelques prémisses.
1- L’intégration est une nécessité pour le bien-être des immigrants et pour la cohésion de leur société d’accueil;
2- L’intégration ne passe pas seulement par la connaissance fonctionnelle d’une langue mais aussi par la maîtrise des référents culturels de la société d’accueil.
3- Tant que le Québec ne maîtrisera pas la politique de l’immigration, l’acquisition de l’identité québécoise restera problématique pour les immigrants.
4- Une politique d’intégration réussie implique des investissements importants et suppose en conséquence d’ajuster le niveau de l’immigration aux ressources financières mise au service de leur intégration.
5- C’est la capacité d’intégration qui doit déterminer la capacité d’accueil des immigrants.
Tout le livre est une démonstration convaincante de la pertinence de ces positons qui sont fondées sur une multitude d’exemples tirées de l’expérience de l’auteur dans ses cours de francisation des adultes.
L’auteur soutient qu’il ne faut pas seulement apprendre aux immigrants à parler français mais encore faut-il aussi leur apprendre à devenir Québécois. Elle critique l’approche actuelle du gouvernement québécois qui dans ses programmes de francisation ne donne pas de place à la formation à la culture qui est pourtant la porte d’entrée dans la société et qui permet de participer activement à la vie collective. Ces programmes sont aussi sous-financés car ils ne couvrent pas la totalité du parcours. Les immigrants n’ont pas les ressources et le temps disponible pour améliorer leur connaissance du français. Tania Longpré préconise que la francisation soit gratuite pour tous. Actuellement le Québec ne finance que la moitié de l’apprentissage.
Pour alléger le processus de l’intégration, l’auteur propose que la connaissance du français soit exigée avant l’arrivée au Québec comme cela se pratique en France, en Allemagne, en Australie, au Royaume-Uni qui exigent que tous les immigrants connaissent la langue de leur pays d’accueil. (p.33) 87% des immigrants investisseurs ne connaissent pas le français à leur arrivée; c’est aussi le cas de 50% de ceux qui viennent dans le cadre du regroupement familial. La connaissance du français n’est pas nécessaire pour venir au Québec, elle donne seulement plus de points dans la grille de sélection. Il n’y a d’ailleurs aucun test pour évaluer sérieusement le niveau de français même lorsqu’il existe.
L’auteur s’attaque à la politique du multiculturalisme et des accommodements raisonnables. « C’est à l’immigrant de vouloir s’intégrer et de faire le nécessaire pour y arriver. Toutefois, c’est notre rôle de lui fournir tous les outils et la motivation nécessaire pour y parvenir… C’est au gens à s’intégrer à la société et non l’inverse » (p. 45 et 48) Elle dénonce la mentalité de la non-intégration qui est suscitée par les accommodements dits raisonnables qui encouragent les immigrants à rester repliés sur eux dans leur communauté plutôt que de les inviter à se joindre à nous et à partager les valeurs communes de la société. « L’aplaventrisme culturel à outrance au nom du multiculturalisme ne donne qu’un résultat : la ghettoïsation des immigrants, favorisant l’isolement des communautés ethniques et l’exclusion sociale. « (p.59)
Voilà un livre pertinent, stimulant et décomplexé qui s’appuie sur des faits réels et non sur des mythes pour montrer les inconséquences d’une absence de politique d’intégration et surtout pour décrire les absurdités de notre laisser faire en matière culturelle. Dans son dernier chapitre l’auteur aborde la vraie question. Une société politiquement minoritaire, qui est incertaine de son destin, qui refuse d’affirmer son identité peut-elle inspirer la confiance et le respect nécessaires pour être attirante et générer le vouloir vivre ensemble? La double identité engendre un conflit de loyauté et peut difficilement inciter les immigrants à s’intégrer à une minorité linguistique. Tant que le Québec restera une province au sein du Canada, l’intégration des immigrants sera problématique. En immigration comme sur le plan linguistique et bien d’autres enjeux, le Québec province est condamné au destin de Sisyphe.


Laissez un commentaire



2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    5 mars 2013

    Une langue est utile dans la mesure où elle permet à l'individu de gagner sa vie avec. Si au Québec , on ne peut imposer le français comme langue de travail, on perd notre temps à essayer de franciser les immmigrants. D'ailleurs le même constat s'applique au CEGEP. Si on ne peut trouver d'emploi sans l'anglais, alors vous n'arriverez jamais à imposer le français comme langue d'étude au collégial ou à l'université. C'est la langue du travail qui détermine tout.
    Plus il y a de la demande pour des services en français, plus de gens ont besoin du français pour rendre ses services et gagner leur vie.
    C'est comme si on essayait d'imposer le latin au collégial. Si personne ne peut travailler avec cette langue, personne ne voudra faire ses études dans cette langue. C'est pareil pour le français. A partir de là, point besoin d'imposer le français. Cela vient tout seul si on doit apprendre le français pour travailler.

  • François Ricard Répondre

    5 mars 2013

    L'immigration est-elle nécessaire? Souhaitable?
    Quelles sont les études qui traitent d'immigration? Quelles sont les études qui prouvent que l'immigration est bénéfique?
    Tout le monde dit que nous avons besoin d'immigrants.
    De quels types d'immigrants avons-nous besoin? Avons-nous des études à ce sujet?
    Tous les politiciens disent que nous avons besoin d'immigrants.
    Les Chambres de commerce disent que nous avons besoin d'immigrants.
    Tous les journalistes et commentateurs disent que nous avons besoin de l'immigration.
    Sur quelles études base-t-on pareille affirmation?
    N'y aurait-il pas lieu, sinon de cesser toute immigration, au moins de la diminuer de 50% pour les deux ou trois prochaines années. Le temps de demander à des experts ( démographe, sociologue, économiste) de répondre à quelques questions extrêmement importantes:
    ---Avons-nous besoin de l'immigration?
    ---Si oui, de quels types d'immigrants avons-nous besoin?
    ---Quelles sont les conditions essentielles pour une intégration efficiente des immigrants reçus?