Chaque premier ministre laisse son empreinte. Jean Lesage et Robert Bourassa voulaient propulser le Québec dans la modernité et renforcer ses pouvoirs au sein du Canada. Porteurs de politiques publiques progressistes, René Lévesque et Jacques Parizeau voulaient en faire un pays.
Que veut Philippe Couillard ? À un an du prochain scrutin, la question se pose. Féru de formules floues et ronflantes, le premier ministre s’est trouvé un nouveau mantra. Sous sa gouverne, dit-il, le Québec serait passé d’une phase de « restauration » à la « transformation ».
Pour bien marquer son territoire de visionnaire autoproclamé, il prend même soin de traiter ses adversaires Jean-François Lisée et François Legault de politiciens issus du « siècle dernier ».
Derrière les formules sibyllines de M. Couillard se cache néanmoins sa véritable « vision » du Québec. Son premier mandat, et peut-être son dernier, en témoigne déjà amplement.
Un État « transformé »
Ce qu’il faut comprendre, c’est que Philippe Couillard est un néo-libéral dans le sens idéologique du terme. Son parti pris pour un État « transformé » vise surtout à en réduire le rôle sur tous les plans. C’est le fondement de la « vision » Couillard.
D’où ses principaux gestes. Austérité. Réduction des services à la population, y compris chez les plus vulnérables. Silence face à la perte de « fleurons » de l’économie québécoise. Hypercentralisation et déshumanisation en santé et services sociaux. Surrémunération des médecins. Métamorphose affairiste d’une culture médicale vouée au bien public en culture entrepreneuriale individualiste.
Sur le plan éthique, l’apparence de « transformation » est cependant plus ardue. Il jure d’avoir érigé un mur entre son régime et celui de Jean Charest. Or, M. Couillard et plusieurs de ses ministres en sont eux-mêmes les produits. Comme disaient nos grands-mères, difficile de faire du neuf avec du vieux.
D’où le retour récurrent des fantômes de l’ère Charest. Le reportage de notre Bureau d’enquête faisant état d’enquêtes policières sur un élu et un ex-élu du PLQ qui auraient pu être bloquées en est l’énième écho.
Dédain larvé
Sur les fronts linguistique et constitutionnel, l’État n’intervient pas non plus sous Philippe Couillard. Son allergie aux questions dites « identitaires » se manifeste par la même inaction chronique.
Au fond, ce qu’il abhorre le plus, c’est le nationalisme québécois en soi et sous toutes ses formes. Aux antipodes des Bourassa et Lesage, M. Couillard est incapable de concilier libéralisme et nationalisme. De fait, on sent chez lui une volonté de « guérir » le Québec de toute trace d’affirmation nationale, qu’il semble d’ailleurs voir comme un relent gênant du « siècle dernier ».
En cela, il est le premier chef de gouvernement du Québec à dégager la même sorte de dédain larvé qu’avait Pierre Elliott Trudeau envers le nationalisme de la société dont il était pourtant issu.
Bref, plus le temps passe, plus M. Couillard donne l’impression de s’être trompé de Parlement. Qui sait ? S’il perd les prochaines élections, peut-être le verra-t-on un jour réapparaître à Ottawa.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé