Que cela nous plaise ou non

Accommodements raisonnables et immigration

Il suffit que Cinq jeunes joueuses de taekwondo soient exclues d'une compétition parce qu'elles refusent de retirer leur hidjab, et voilà la délicate question des accommodements raisonnables qui refait surface. Nos chroniqueurs Rima Elkouri et Pierre Foglia évoquent tous deux les règlements de ce sport de contact pour en arriver à des positions... diamétralement opposées.
Encore le hidjab, disait-on en début de semaine, après l'exclusion d'une compétition de taekwondo de cinq jeunes musulmanes ayant refusé de retirer leur voile et de se conformer au règlement.
Encore le hidjab. Personnellement, je n'en suis pas une grande adepte. Je n'aime pas l'image de la femme que cela renvoie, je n'aime pas la récupération politique qui en est faite par les fondamentalistes et je suis mal à l'aise quand je vois des filles aussi jeunes le porter. Même si je sais que, pour bien des musulmanes, le port du hidjab ne constitue en rien un symbole d'oppression, même si je sais que les filles voilées ne sont pas nécessairement les filles soumises qu'on se plaît à imaginer, je reste perplexe devant ce choix.
Personnellement, je suis contre. Je suis contre, mais je ne vois pas ce que mes convictions personnelles ont à faire dans ce débat. Je crois que le respect de la liberté religieuse, dans la mesure où cette liberté ne brime pas celle d'autrui et ne met en péril la sécurité de personne, devrait primer. Même quand cela nous déplaît. Surtout quand cela nous déplaît, en fait. Sinon, à quoi bon?
Dans le cas qui nous concerne, la question était donc de savoir si on permet à des jeunes musulmanes de porter le voile pour participer à une compétition de taekwondo. Qu'a dit le président de la Fédération québécoise? Il a tout simplement appliqué le règlement. Que dit ce règlement? Il dit que le port de tout accessoire sur la tête outre le casque est interdit.
Mais voilà, le règlement est une chose, le bon sens en est une autre.
Est-ce que, dans un esprit sportif, le respect à la lettre du règlement est nécessairement la meilleure avenue? Je n'en suis pas sûre. Encore, si on assistait à une compétition olympique, je ne vous dis pas. Mais voilà, nous sommes loin des Jeux olympiques. Nous sommes dans un gymnase à Longueuil devant des jeunes sportives âgées de 8 à 12 ans. Des filles qui ont choisi de faire du sport, un choix encore marginal au sein de la communauté musulmane, ce qui, en soi, est une bonne chose. Pour les exclure d'une compétition, il faut pouvoir invoquer une bonne raison. Or, ici, je n'en vois pas.
Est-ce que le port du voile dans un tournoi de taekwondo entraîne des problèmes de sécurité ou d'équité? J'attends qu'on m'en fasse la démonstration. Je ne vois pas comment un bout de tissu solidement fixé sous un casque pourrait vraiment entraîner des blessures. Je ne vois pas non plus comment le voile pourrait avantager de quelque façon que ce soit l'athlète qui le porte. On a déjà vu des ceintures noires en taekwondo porter le hidjab en tout temps sans que cela ne dérange personne. Il est où, alors, le problème?
Est-ce injuste de permettre le port du voile aux unes alors qu'on interdit aux autres le port d'un simple bandeau pour retenir la sueur? Oui, sans doute, d'une certaine manière. Sauf qu'on compare ici deux trucs qui ne sont pas comparables. Que cela nous plaise ou non, il y a une différence entre ce qu'on porte par conviction religieuse et ce qu'on porte par simple commodité.
Cela dit, je ne dis pas que le président de la Fédération québécoise de taekwondo était mal intentionné dans cette histoire. Je ne dis pas que l'équipe musulmane qui s'est sentie lésée a eu raison d'alerter les médias. Je ne dis pas qu'il faut crier au racisme. Car comment crier au racisme quand on sait qu'au sein même de la communauté musulmane, on ne s'entend pas sur la nécessité de porter le voile? Comment crier au racisme quand on sait que les plus farouches opposants au hidjab sont souvent eux-mêmes musulmans?
Ce que je dis, c'est qu'il aurait mieux valu trouver un terrain d'entente avant le tournoi, calmement, intelligemment. Un compromis, ça se fait à deux. Et loin des caméras, c'est souvent mieux.
Est-ce à dire qu'au nom de la liberté religieuse, il faille céder à toutes les demandes? Bien sûr que non. Je ne pousse pas le relativisme culturel jusqu'à tolérer l'intolérable. Il n'est question ici ni d'excision ni de crime d'honneur. De grâce, ne mêlons pas tout. Il est question d'un bout de tissu inoffensif que certaines, par conviction religieuse, décident de porter. Que cela nous plaise ou non.


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