Moins de neuf mois après la prise des leviers de notre pouvoir, le PLQ n'a pas caché la nature idéologique de ses actions, comme le rappelle souvent le premier ministre Couillard. Est-il surprenant de lire dans Le Devoir qu'après les nombreuses coupes du ministre de l'Éducation, Yves Bolduc n'est parvenu qu'à de menues économies. Explication ? Silence radio.
En fait, il n'y pas d'explications, car le gouvernement n'a pas eu le temps de réellement approfondir une réflexion sur les résultats réels de l'équation coupures/bénéfices. En clair, comme ils ne savent pas exactement ce qu'ils font, ils ne peuvent expliquer les conséquences de leurs actions. Ils ont emprunté à la dernière minute la plupart des idées de la CAQ et ont exécuté sans se poser de questions.
En campagne électorale, Couillard n'a présenté aucune vision. Simplement un élément de surface à propos de création d'emploi, histoire de convaincre l'électeur qu'il avait un programme. Lorsque la question du référendum s'est présentée, il a martelé le clou. C'est la seule vision que nous avons pu retenir : ne pas élire les souverainistes. Les électeurs ont marché. Aujourd'hui nous paierons le prix de la boucherie néolibérale.
Ce qui n'est pas improvisé
Le plan libéral est clair depuis le règne de Jean Charest : détruire le modèle québécois et faire du Québec une province parmi d'autres. L'objectif : transférer l'héritage de nos acquis en tant que peuple dans les comptes des intérêts privés. Bref, privatiser le plus de pans possible de l'État québécois. Ce plan-là est loin d'être improvisé. Et il n'est pas nécessairement mené par les élus... Le PLQ est un simple levier qui permet d'assurer ce passage des intérêts publics vers les intérêts privés. Pour y parvenir, les libéraux, plus précisément les tenants de la privatisation, ont d'abord pris soin de s'assurer que les leurs siégeraient dans les postes clés de nos sociétés d'État, dont l'une des plus importantes : Hydro. D'André Cayer à Thierry Vandal en passant par Jean Charest tous cherchent à favoriser les intérêts privés (dont la très corrompue SNC-Lavallin) en utilisant Hydro Québec comme levier de transfert des pouvoirs du peuple vers le privé. Également, la Caisse de Dépôt a vécu un scandale inouï lors de la crise de 2008 dont l'affaire pour le moins mystérieuse fut littéralement étouffée par les médias. Quelle force parvient à retenir les informations occultes de ces transactions qui ont fait perdre 40 milliards à la Caisse ? Quarante milliard et personne n'a rien vu venir, n'a rien pu dire ? Une valse étrange a fait passer H-P Rousseau vers Powercorp. et Sabia à la Caisse... Une enquête sur ces sociétés qui nous appartiennent nous permettrait de reprendre des projets favorisant d'abord les Québécois et non d'abord les intérêts privés étrangers. Les dirigeants de nos sociétés d'État ne sont pas élus et ils ne gèrent pas toujours en fonction des intérêts des Québécois. En ce qui concerne Hydro, c'est l'évidence. Pourquoi ne peut-on pas mettre dehors ceux qui travaillent contre nos intérêts ?
Après une étrange victoire libérale au mois d'avril 2014, le plan se poursuit. L'improvisation sur les coupes est en réalité l'acte précis de sabotage du modèle québécois. Que cela se fasse habilement ou non n'a plus aucune importante, tant qu'on peut justifier la privatisation dans toutes les sphères de l'État après le saccage. Et le peuple a bien été préparé par certains médias. Aussi bien faire le plus vite possible donc nécessairement, sauvagement.
Le consentement perplexe
Le peuple se fait dire depuis tant d'années qu'il est surendetté, qu'il dépense trop, que nous, les Québécois, sommes des enfants gâtés par nos programmes sociaux, par la péréquation, que notre économie sociale (grâce à laquelle nous sommes passés à travers la crise mieux que les autres) n'est pas un bon système, que nous avons fini par intérioriser le message : les millions d'anglophones qui nous entourent sont plus prospères donc leur système est meilleur. C'est tout de même avec beaucoup de perplexité, voire de scepticisme, que nous témoignons de la destruction des acquis de notre Révolution tranquille. La société distincte passe aux coups de fouet, ça fait mal. Et à ce stade notre seul espoir soit que les libéraux aient raison. Tant qu'il y aura de l'espoir, ils auront des chances de réélection...
Éliminer le pouvoir des députés
De manière générale, la fonction originelle des députés au service du citoyen fut progressivement détournée vers la dictature de la ligne du parti. Ainsi les députés libéraux ne peuvent servir les intérêts de ceux qui les élisent puisqu'ils sont asservis eux-mêmes par le diktat supranational que le PLQ a choisi de servir. À moins que le député ait un intérêt personnel sur un sujet, il s'adonnera peut-être à acheminer un projet de loi vers le sommet du pouvoir. Mais pour l'heure, tous les libéraux travaillent ardemment et de bonne foi pour la ligne de parti, à savoir pour le capitalisme sauvage. Et lorsque le PLQ aura terminé son opération, Québec inc. sera prête à être cédée à son maximum aux intérêts privés. Tel est le programme du parti néo-libéral de Couillard. Nous en témoignons passivement, impuissants... pour l'instant.
Le détournement des fonctions du député est à la base même du cynisme politique, mais surtout de la perte du pouvoir du peuple dans l'appareil de l'État. Qui va préserver nos intérêts de proximité, si le député ne peut plus porter notre voix ? Les ministres vivent dans un bunker dont la seule fenêtre s'ouvre sur des intérêts supranationaux, loin de la réalité des gens.
La seule manière pour le peuple de reprendre les rênes de son pouvoir sera l'action citoyenne concertée. L'année 2015 sera déterminante dans la lutte entre le 1% et le citoyen. Ce dernier devra redoubler de clarté pour éclairer le pouvoir occulte qui le tient à la gorge.
Projet de société du PLQ : détruire le modèle québécois
L'évidence même
Sylvie Bergeron12 articles
Auteure de Vue de l’intérieur, la crainte de l’assimilation (Éd. La Guaya, 2005).
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