Congrès annuel des «Jeunes libéraux» à Sherbrooke

Pour le maintien du CÉGEP

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Tribune libre

Le congrès annuel des «Jeunes libéraux» (JL) s’est tenu cette fin de semaine à Sherbrooke. Cette année, c’est entre autres l’idée de l’abolition des cégeps dans l’optique de la valorisation d’un système d’éducation orienté sur les besoins des entreprises qui a été votée. Cette volonté de «virage utilitaire» que les JL souhaitent dès le niveau secondaire notamment via la promotion de l’entreprenariat dans les établissements scolaires, trouve sa justification dans le fait que le milieu collégial actuel ne serait pas suffisamment adapté au 21e siècle. La réalité n’est plus la même qu’en 1968, nous disent-ils, ce qui devrait nous pousser à miser collectivement sur une éducation directement branchée sur le marché du travail et la compétitivité.

Mais qu’est-ce qui a si changé depuis les années 1960 qui nécessiterait d’appliquer ce que nous propose la jeunesse libérale en ce moment? À mon sens, c’est l’avènement du néolibéralisme comme force économique, politique et sociale, dont les JL sont l’une des expressions les plus radicales, qui constitue la clé d’analyse la plus pertinente et adéquate pour comprendre de telles prises de position. Ce processus a pris la forme de la critique et du démantèlement d’institutions publiques misant sur la solidarité sociale qui étaient le fruit de longues et pénibles luttes sociales et syndicales depuis le début du 20e siècle. C’est en effet le rouleau compresseur néolibéral comme nouveauté socio-historique qui a généré la glorification de la sphère privée et des besoins des entreprises auxquelles le système d’éducation devrait se soumettre.

Selon les JL, qui s’inscrivent dans l’optique néolibérale dont je viens de tracer les contours, le temps serait donc venu de réduire à néant un des plus importants acquis de la Révolution tranquille dans la sphère de l’éducation soit la création des cégeps qui démocratisera les études supérieures en les rendant plus accessibles. Les études collégiales sont une étape dans la vie des jeunes adultes où ils apprennent réellement à se connaître en découvrant de nouveaux horizons, ce qui les aidera ultimement à faire un choix plus éclairé pour leur avenir. Je pense qu’en finissant le secondaire, les étudiants sont encore trop jeunes pour aller directement à l’université et que, dans cette voie, le cégep devrait être considéré comme une zone de transition et une véritable chance qui leur est donnée de prendre conscience de la pluralité des chemins qu’ils peuvent choisir. Il s’agit par ailleurs d’un milieu stimulant qui permet de développer son esprit critique, d’enrichir sa culture générale et de se familiariser avec diverses disciplines qui ne sont souvent pas présentées au secondaire, mais qui sont susceptibles d’accrocher de nombreux jeunes qui voudront continuer dans cette branche particulière à l’université.

Que l’on me comprenne bien, je ne suis pas du tout en train de nier l’importance du marché du travail auquel chacun aura inévitablement à s’intégrer dans sa vie. Je tiens simplement à critiquer les récents propos des JL qui, selon moi, survalorisent l’entreprenariat au détriment d’autres perspectives qui sont tout autant légitimes. Leur vision utilitariste de l’éducation et l’idéologie individualiste qui lui est lié sont, à mon avis, néfastes pour l’élaboration d’un projet de société car elles ont comme conséquence, sous prétexte de pragmatisme et d’efficacité, de faire entrer les individus dans des moules préétablis qui sont des produits directs de leur idéologie! L’école ne devrait pas être au service des entreprises, mais des étudiants qui sont dans un processus de développement personnel et professionnel! Pour le maintien des cégeps!


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