La politique, c’est le métabolisme d’une société organisée. Sans elle, il n’y a pas de société, il n’existe que des individus en concurrence. Les politiciens sont dès lors essentiels à la société.
Les médias, c’est le système nerveux de la société. Ce sont eux qui transportent l’information quant à l’état des lieux, aux problèmes à régler, aux décisions politiques et leurs conséquences.
La démocratie, c’est l’exercice du pouvoir, la prise de décision par l’ensemble des citoyens, par l’entremise des politiciens. Il en découle que la confiance, entre citoyens et politiciens, est essentielle à la démocratie.
Notre démocratie est en danger parce que cette confiance est actuellement au plus bas.
Les politiciens sont la plupart du temps perçus, sauf par ceux qui les côtoient régulièrement, comme guidés par leurs propres intérêts plutôt que par les intérêts de la société. Pourquoi ? Entre autres raisons, parce que plusieurs politiciens sont effectivement guidés par leurs propres intérêts, ce que les médias dénoncent très efficacement.
Quant à la majorité des politiciens, guidés par les intérêts de la société, ils s’expriment la plupart du temps en termes électoralistes, poussés par leur parti, par la nécessité perçue et par une grande partie de l’électorat, justement.
Et c’est ici que s’instaure le cercle vicieux.
Modèle inadéquat
Le modèle économique traditionnel des médias professionnels est, depuis l’apparition du numérique, devenu inadéquat pour assurer leur survie. Les médias sociaux, notamment, leur font une forte concurrence dans la diffusion de la nouvelle, tandis qu’une grande partie de la publicité qui leur était destinée est désormais dirigée vers Google, Facebook et consorts.
Pour contrer ce mouvement, attirer l’auditoire et, ainsi, les annonceurs, les médias ont tendance à amplifier le sensationnalisme, le populisme, la confrontation et, surtout, l’immédiateté.
Parallèlement, pour pallier la perte de revenus publicitaires, ils coupent dans les salles de rédaction, réduisant leurs moyens de produire l’information de qualité.
De leur côté, les politiciens doivent communiquer. Pour le service public, mais aussi pour leur maintien au pouvoir. S’ils veulent de l’espace dans les médias, ils doivent, parallèlement, verser dans le sensationnalisme, le populisme, la confrontation et l’immédiateté, ces instruments de l’électoralisme.
L’information documentée, approfondie, complète, donc plus coûteuse et plus « lente », est délaissée au profit de l’information-consommation, de l’infospectacle. Parce que les médias ont besoin d’argent, parce que les politiciens ont besoin de « temps d’antenne ».
Le public fonde alors ses opinions sur des bagatelles percutantes, et non sur des faits bien étalés. Mal informé, il comprend mal les enjeux sociaux, la politique. Il ne connaît des politiciens que les turpitudes de certains et retire à tous respect et confiance. Quand le citoyen comprend mal la politique et ne fait pas confiance aux politiciens, la démocratie est carrément malade.
Or, si les médias continuent dans cette voie, ils courent à leur perte. Parce que l’information-spectacle, l’information-consommation, ça ne coûte presque rien à produire, avec YouTube, Facebook, Instagram, etc. Jamais une organisation professionnelle ne pourra concurrencer les innombrables générateurs de « nouvelles » sur Facebook.
La seule façon de se maintenir, pour les médias professionnels, c’est de démontrer une valeur ajoutée, c’est-à-dire la vérité et la qualité de leurs messages. De démontrer leur crédibilité. De se définir comme la véritable source d’information. De se démarquer des agitateurs.
Mais cela ne peut se faire qu’à l’unisson avec les politiciens.
Ceux-ci doivent prendre conscience qu’en utilisant les médias professionnels pour des fins partisanes et stratégiques, en les court-circuitant par des tweets forcément fragmentaires, en jouant avec la vérité, en utilisant la langue de bois, en trahissant eux-mêmes l’information par la tirade partisane, ils contribuent à la disparition des médias professionnels.
Et à la disparition de l’information de qualité essentielle à la démocratie.
Dans ce flot toxique, il existe malgré tout des îlots de santé. Certains politiciens ne succombent pas à l'électoralisme, certains médias conservent une indéniable excellence d'information.
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