Nota bene : reprise d’un article de réflexion mis en ligne sur le site Dedefensa.org un 18 mai 2015. Il s’agit, en quelques sortes, d’une sorte de legs spirituel qu’il m’importe de partager avec les lecteurs de Vigile. Qu’il nous soit permis de réfléchir, en cette époque charnière, sur les tenants et les aboutissants de notre quête identitaire, dans un contexte de domination mondialiste.
Le travail sur l’être est comparable à une alchimie socratique
Nous poursuivons, dans le sillage de la « Révolution spirituelle » notre réflexion critique portant sur les dérives contemporaines qui menacent l’intégrité de l’être et sa transformation réelle. À une époque où l’hédonisme ambiant nous est présenté comme une panacée, la discipline intérieure demeure l’unique voie menant à l’authentique libération.
Dans un contexte où les termes sont galvaudés, nous n’avons d’autres choix que de remettre à plat tout ce corpus de concepts mal employés que nous sommes forcés d’ingurgiter au gré de la doxa officielle. Les dés sont pipés, à telle enseigne qu’il est ardu de se prononcer sur des sujets tels que la discipline ou la libération.
La pensée critique est un combat que l’on mène pour le bénéfice d’une plus grande clarté. Peut nous importe le but, c’est le cheminement qui fait foi de la qualité du travail herméneutique.
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L’intimité n’est possible qu’à travers l’altérité
C’est la rencontre du nourrisson avec son père qui amorce un premier pas vers l’autonomie affective et émotionnelle. La mère représente le lien matriciel, la source nourricière et l’enfant finit par être confronté avec le monde extérieur. C’est dans ce contexte que le père amorce une autre forme de communication avec le nourrisson. L’enfant expérimente une première forme d’altérité en étant confronté au monde extérieur. L’exode du sein nourricier fait en sorte que se développe la conscience de soi, facilitant l’apprentissage du langage et faisant en sorte qu’une ébauche de liberté soit esquissée. Confronté au monde extérieur, l’enfant réalise qu’il y a des limites entre soi et les autres.
Le souvenir du confort de la vie utérine représente-t-il un premier sentiment d’intimité ?
À notre humble avis, l’intimité représente un état qui protège l’individu face au monde extérieur. Toutefois, l’altérité, c’est-à-dire tout ce processus d’échange avec d’autres interlocuteurs, permet à l’être humain de gagner en maturité. L’authentique indépendance de l’être est tributaire d’un juste équilibre entre intimité et altérité. C’est en se confrontant à autrui que l’on se forge des armes qui nous aideront à survivre par la suite.
Si la confrontation semble venir menacer (temporairement) notre intimité, elle représente, malgré tout, le lieu de tous nos apprentissages en définitive.
Communiquer, c’est communier avec autrui. Et, contre toute attente, les esprits libres communient en débattant. Le débat, par-delà les joutes oratoires et les passes d’armes littéraires, reprèsente une forme primitive de démocratie, le ferment d’une possible forme d’organisation des «forces en présence».
Mais, pour débattre, il faut se connaître soi-même. C’est ce qui explique le fameux «je est un autre» prononcé par Arthur Rimbaud à l’intérieur d’une lettre rédigée en 1871. Extraordinaire intuition du jeune poète qui pressentait, avec plusieurs coups d’avance, l’impasse de la communication moderne. Mais, comme l’on construit son langage à partir de nos contacts avec autrui, «nous sommes les autres» par la force des choses et il peut être ardu de débusquer sa «réelle» identité à travers cette jungle de la communication.
Le masque est une deuxième peau
Il n’est pas surprenant de constater tout cet engouement de l’art contemporain pour la thématique du tatouage, des masques et du «transformisme». À une époque où la «rectitude politique» n’a plus aucune crédibilité, dans un contexte où l’ubiquité des communications virtuelles permet toutes les permutations, il peut être tentant de se travestir afin de confondre nos interlocuteurs. Et, partant, ce subterfuge comporte le risque de «se prendre à son propre jeu», dans un contexte où la communication est devenue un leurre systémique. C’est ce phénomène que l’on retrouve dans le cyberespace, alors qu’une armée de trolls (avatars – personnes sous fausses identités travaillant à subvertir la communication) s’emploie à pervertir les débats menés dans nos agoras virtuelles.
Peu importe si le troll est payé par un lobby ou une quelconque officine, ou s’il s’agit d’un militant zélé qui s’évertue à «foutre la merde» dans un débat. L’essentiel de son travail de sape consistant à induire un effet pervers de «dissonance cognitive» dans le fil de la discussion, ce qui contribuera à discréditer un auteur ou un débat d’idées. L’emploi des trolls est une technique de communication qui fait, désormais, partie de l’arsenal machiavélique de l’«ingénierie sociale». Cette technique s’articule selon une géométrie à trois bandes, c’est-à-dire qu’il ne s’agit plus d’un débat au sens classique du terme. Le débat, à la source, signifiait un échange de procédés (bons ou mauvais) entre un orateur et son contradicteur.
Le langage et ses lieux de représentation
La propagande, avant d’être récupéré par le marketing, faisait partie de l’arsenal classique de la guerre. Elle était employée pour déstabiliser l’adversaire, minant la crédibilité de sa propre communication. La propagande était – à notre avis – distincte de la DOXA officielle, c’est-à-dire la parole diffusée par les canaux de communication du pouvoir en place. Avant que les sophistes ne viennent la distordre, la DOXA représentait, chez les anciens grecs, un instrument de construction du discours puisant l’essentiel de son langage à partir de la «sagesse populaire». Platon finit par assimiler la DOXA à une forme de jargon démagogique menant à la déception en bout de ligne.
On pense spontanément à la démagogie de nos classes dirigeantes qui se servent de la sophistique pour distordre les raisonnements, induire des idées pernicieuses et vicier le débat. Mais qu’importe, tout bon démagogue parle toujours un peu le langage du peuple, sans tomber pour autant dans le vil populisme. Néanmoins, il ne faudrait jamais oublier la distinction capitale entre un orateur et un acteur. L’orateur se sert de son art afin de propager ses idées ou de défendre une ligne politique. L’acteur se met dans la peau d’un personnage fictif et il nous joue la comédie … pour le plus grand bénéfice de ceux qui savent lire entre les lignes.
Ici, je suggère à mes lecteurs, d’aller visionner la dernière vidéo consacrée aux discussions menées entre Philippe Grasset et quelques objecteurs. On y assiste à une étonnante représentation, entre la joute théâtrale et le débat d’idées. Travaillant, comme au théâtre, à partir d’une mise en abîme savoureuse, l’éditeur de Dedefensa.org nous fait prendre conscience des leurres de la communication intriqués au cœur du «discours sur le réel». Ou «discours sur la représentation du réel»?
À une époque où le jeu politique subit une telle quantité de médiations, la représentation théâtrale peut s’avérer une source d’information plus fiable et crédible en bout de ligne. La communication induite par le «jeu théâtral» est tissée à partir d’une trame fictionnelle et comporte des jeux de représentation qui s’imbriquent, se nourrissent et finissent par générer un récit qui «nous apprend quelque chose». Le discours politique, quand à lui, n’est plus qu’un surgeon de la communication générée par l’appareil de propagande.
Puisque nous sommes entrés dans l’ère de la « guerre totale », ininterrompue. La propagande est partout, sur tous les fronts et en temps réel. Il s’agit de déstabiliser les ennemis extérieurs et intérieurs.
Donc, conséquemment, la communication est devenue une forme aboutie de propagande, un «appareil de consentement collectif» (dixit PHP). Philippe Grasset, penseur autodidacte courageux, pointe du doigt le même phénomène avec son concept de «narrative». La communication ne communique plus. Elle brouille les pistes, distord les esprits et finit par détruire toute forme de consensus social. Elle est une «arme de destruction massive». C’est ce constat qui m’a poussé à offrir ma collaboration au site Dedefensa.org.
La guerre de la communication
Il faut donc le dire : la communication postmoderne est PLUS qu’une déclaration de guerre. C’est LA guerre. Dans un contexte où «the medium is the message» – de facto, la communication est devenue l’issue finale – le message politique ne rime plus à rien. Tout ce cirque est nauséeux, ça donne le tournis et on comprendra que le commun des mortels prenne ses distances face à la représentation en cours. Les soi-disant «analystes politiques» sous-entendent (pour les malentendants) que le «bon peuple» est derechef conquis par cette «narrative» de circonstance. À moins que se soit l’inverse qui soit vrai : les «analystes politiques» seraient intoxiqués par leur propre discours.
La communication officielle, «narrative», nous distrait constamment face au réel que nous sommes forcés d’affronter à la sortie d’Internet. Il s’agit d’une distorsion permanente : la «narrative» contre la nature. Ou une communication contre-nature. Pas surprenant que la recherche de l’intégrité soit comparable à une quête menée sans relâche par toute cette jeunesse désemparée. On se réfugie au fond de soi, on gratte sur la surface afin d’écailler le masque. La communication de l’intime est devenue un soliloque, une prostration de dernier recours face à la trame diffuse et touffue de cette guerre de la non-communication.
Qui suis-je ?
Il peut être tentant de se réfugier à l’intérieur de soi, sur son «quand à soi». Pourtant, une fois les masques tombés, force nous est de reconnaître que nous sommes bien peu de chose en dehors … de cette vie façonnée au contact des autres. Et, si la majorité de nos prises de contacts n’étaient que de la poudre aux yeux, du vent, les effluves de la vanité sous toutes ses formes ? Ne serions-nous que le produit d’une illusion collective ? Qu’il me soit permis de faire allusion à nouveau au film The Matrix [peu m’importe si la propagande officielle stipule qu’il s’agit d’une référence-culte pour tous les paranos de ce monde], un opus dont la première version a été produite en 1999. Le point cardinal de ce film consiste à nous faire prendre conscience qu’il existe un AUTRE monde à côté de celui qui est dépeint par les médias à longueur de journée. Les médias de «destruction massive» des consciences injectent de la FICTION à toutes les nanosecondes afin de contribuer à désagréger le «réel».
Poursuivant le travail de sape mené par les producteurs d’Hollywood, les médias aux ordres (et une part croissante des médias dits «alternatifs») travaillent inlassablement à grignoter tous nos repères. Les médias nous DICTENT ce qui se passe, aujourd’hui, sur les divers terrains d’opération des «affaires étrangères». Les médias nous RECOMMANDENT de manger ceci ou cela. C’est par l’entremise des médias que nous prenons conscience de l’ATTITUDE qu’il convient d’adopter au vu des circonstances. La MATRICE est omnisciente, les médias sociaux travaillant jusqu’à pervertir nos communications idoines et «intimes». Le RÉEL est menacé de toutes parts.
Et, nous y sommes presque. Nous y voilà dans le vif de mon sujet. Encore un petit effort et nous allons y parvenir.
De la nature des choses
Dans ce contexte de guerre totale de la communication, il va de soi que la NATURE représente l’AVATAR par excellence. La dernière forme d’ancrage qui puisse encore donner de l’espoir aux esclaves de la postmodernité. La «narrative» en est pleinement consciente. La NATURE c’est là d’où nous venons et là vers où nous retournons.
Alors, cessons de prêter l’oreille aux jérémiades de nos contemporains et branchons-nous sur «dame nature». L’être humain étant son pire obstacle, vivement une vraie bonne guerre thermonucléaire que l’on soit (qui ça ON ?) débarrassés de l’engeance humaine. Enfin, une fois que se seront dissipées les radiations et autres retombées mortifères, la VIE pourra reprendre son cours normal. Bien évidemment. On connaît la chanson de cette bonne vieille «narrative» éculée.
Passé un certain stade d’aliénation et de désillusion, le sujet qui OSE défier la «narrative» ne peut faire autrement que d’opter pour une LUCIDITÉ salvatrice. Et, cette lucidité commande d’aller au fond de soi puiser nos dernières énergies vitales, histoire de nous ressourcer et d’expérimenter cette fameuse «maïeutique» qui est l’équivalent de l’accouchement de notre conscience d’hommes et de femmes libres.
Un changement de perspectives
Jésus, dans son célèbre Sermon sur la montagne, énonce dans le passage dit «les Béatitudes» : «Heureux les pauvres en esprit, car le Royaume des Cieux est à eux». Le lecteur attentif finira par comprendre qu’on y fait allusion à cette simplicité volontaire qui représente l’antidote à toutes nos lubies, ces scories imprimées par des siècles et des siècles de propagande. Pour recevoir LA connaissance, il faut, au préalable, se nettoyer l’âme. L’espoir renait seulement lorsque l’on ferme ses oreilles face aux champs des sirènes de la pollution mentale ambiante. S’il ne s’agit pas de se déconnecter du «réel», encore faudrait-il savoir de quel «réel» on parle. Il est question d’un retour sur nos fondamentaux afin de préparer le terrain du ressourcement. Parce que la source coule au fond de nous, elle sourd en nous. Le ressourcement consiste, stricto sensu, à éliminer graduellement toutes les sources de distorsions cognitives.
Krishnamurti, penseur hindou de la lucidité extrême peut, lui aussi, nous aider à cheminer. Bien que sa quête de lucidité puisse finir par être desséchante, ce chercheur met le doigt sur certains points capiton. Ainsi, il nous prévient que «si je veux vivre sans conflit intérieur, je dois, tout d’abord, me libérer de toutes les images (objets de la représentation)». Ce joug nous empêche de nous libérer de nos conditionnements. Nous surconsommons des tonnes d’images. Guy Debord aurait dit que «les images nous consomment» … L’image – ou représentation – est tellement forte et prégnante que nous en venons à oublier le RÉEL.
En temps réel
En lieu et place, il faudra réapprendre à communiquer en temps réel, de personne à personne. Dans un monde où les caméras de surveillance surabondent et où les gens vous foncent dessus tout en consultant l’écran de leur téléphone dit «intelligent», il est urgent de nouer des relations humaines. Le plus souvent possible et de toutes les manières possibles. Les médias sociaux servent à isoler les gens en générant l’illusion de communautés qui ne sont que fictives ou virtuelles en dernier lieu. Même vos amis «réels» finiront par oublier ce que vous êtes à force de s’adresser à vous par l’entremise d’un avatar. Qui plus est, les médias sociaux intériorisent une foule de comportements pathogènes, alors que chacune de vos communications sont surveillées, enregistrées, commentées par les autres et que ce mode de communication s’apparente à celui d’un univers carcéral.
Les géants de l’informatique viennent de mettre en vente les premières montres «intelligentes». La «réalité virtuelle», oxymore luciférien par excellence, vous attend au prochain tournant de la destinée. Comme le groupe de musique pop Daft Punk, nous porterons tous un casque «virtuel» bientôt. À la manière d’une colonie de fourmis, notre esprit et nos affects seront téléguidés vers les nouveaux centres de tri de l’activité des néo-humains. La «réalité virtuelle» se chargera de nous inoculer un semblant de conscience … Nous serons devenus des «matériaux humains», des «humanoïdes» consentants. C’est le but ultime de tout pouvoir suprême : transformer ses sujets dociles en objets malléables.
La discipline intérieure
Il faut apprivoiser la solitude afin d’apprendre à mieux «se connaître soi-même». Être seul avec soi-même c’est un état d’esprit qui vous confronte à l’autre personne qui est derrière vous lorsque vous êtes planté devant le miroir de votre existence. «Qui suis-je» en définitive ? Peu m’importe d’être conscient des masques dont je m’affuble si je suis incapable de déceler mon propre substrat. Carl Jung pointe du doigt les archétypes universels … mettant dos-à-dos la mémoire de notre intimité avec «l’inconscient collectif». Ne serions-nous que les maillons d’une chaîne d’esclaves incapables de s’affranchir du joug des illusions ? Et, que dire de notre potentiel de libération, cet appel vers des hauteurs insoupçonnées ?
Les « grands prêtres » du mouvement libertaire nous ont appris que la discipline est une entrave à la jouissance immédiate. Jouir le plus possible deviendra l’antienne d’un culte destiné à paver la voie à une nouvelle idéologie particulièrement mortifère. «Je consomme, donc je suis» marquera le point d’orgue du libéralisme postmoderne. Ainsi donc, nous sommes invités à travailler plus afin de nous procurer des biens et services qui nous permettront d’oublier que nous sommes des esclaves en bout de ligne. On peut parler de l’Ouroboros de la consommation. Nous sommes condamnés à une insatisfaction perpétuelle qui fonctionne comme un moteur affectif et, conséquemment, «l’enfer c’est (bel et bien) les autres».
L’autre n’est qu’un rouage de ma propre machination. Cette machination fantasmatique, je la mets (volontairement) en œuvre afin d’oublier mon humaine condition à travers l’inévitable «fuite en avant» que représente mon existence réelle. L’autre est soi un obstacle, s’il retarde la réalisation de mes fantasmes, ou bien un élément facilitateur, s’il me permet d’accéder à mes désirs. Il est facile, si l’on démonte cette stupide machination, de réaliser que nous sommes TOUS les rouages les uns des autres à travers le procès de la survie en milieu de consommateurs. C’est ce que les bouddhistes nomment la «chaine de la souffrance universelle».
La «société du spectacle», qui se réalise à travers notre société de consommation, fonctionne à partir des rouages d’une grande «chaine de jouissance» aveugle. Voilà pourquoi certains apologètes de la subversion n’hésitent pas à affirmer que le sadomasochisme représente (peut-être) l’ultime forme de relation humaine. Le professeur de philosophie Sylvère Lotringer a déjà affirmé que les sadomasochistes pouvaient atteindre à un certain niveau de vérité, d’authenticité à travers leur quête d’absolu (…). Qu’est-ce à dire ? Oublions la dimension liée à la production de la souffrance pour nous concentrer sur celle de la subordination. Ce fameux fétichisme de la relation maître-esclave est en cause ici. Ceux et celles qui s’adonnent à certaines formes de perversion à travers leurs jeux (sexuels ou autres) ne feraient que remettre en scène les véritables relations mises en forme par notre société.
Et, si les pervers-narcissiques se réjouissaient de faire souffrir les autres ? C’est un peu comme si la jouissance ne pouvait se réaliser qu’à travers la destruction de la liberté d’autrui. Parce que l’ultime paradigme de la domination implique une œuvre de destruction, un mécanisme qui avilit l’essence même du genre humain. C’est ce que Pier Paolo Pasolini aura tenté d’expliquer à travers son dernier film Salò. Par delà la mise en scène d’une hideuse conspiration, ce film fétiche démonte la mécanique de notre société de consommation par le biais de la critique du totalitarisme absolu. Pasolini a fini par comprendre que les bourreaux sont dépendants de leurs victimes sacrificielles; ils n’ont de liberté qu’à travers l’anéantissement de leurs esclaves. L’Ouroboros de la consommation finira par nous consommer … à moins que nous prenions conscience de la donne.
Vers l’authentique libération
Dans un contexte où notre égoïsme finit par nous dévorer, le «don de soi» représente le sacrifice libérateur par excellence. Ainsi donc, nul besoin de sacrifier des victimes offertes en offrande pour … se libérer de la tutelle des «dieux jaloux». Nos contemporains ne se rendent même pas compte qu’ils pratiquent une forme d’onanisme en «faisant l’amour» avec autrui. Nous nous masturbons (les uns les autres) à travers notre prochain, rêvant d’échapper à la hantise d’une solitude qui nous rattrape invariablement. Certains gnostiques, injustement condamnés par les autorités ecclésiastiques, ont déjà tenté de résoudre le paradigme de l’égoïsme en pratiquant une sorte de yoga de l’amour basé sur la contemplation de l’autre. L’autre n’est plus «cet obscur objet de mon désir». Il devient, à travers la maïeutique de «l’union sacrée», ce complice qui m’accueille et me répond. Le désir peut être apprivoisé pour que l’Ouroboros de la consommation lâche sa prise … alors que la jouissance ne s’obtient plus à travers l’anéantissement de l’autre. Il faut voir, et revoir, le film «L’empire des sens» du cinéaste Nagisa Oshima, un autre opus qui témoigne de la difficulté d’aimer lorsqu’un couple est captif de sa «passion dévorante».
Voilà pourquoi l’authentique quête de liberté suppose une discipline intérieure qui nous permettra de « mettre à plat » nos passions.
Le désir, cette appétence qui nous propulse de l’avant (relire Saint Augustin à ce sujet) est comparable à un appel à la vie qui peut devenir l’Ouroboros qui finira par dévorer notre âme en fin de parcours. Le «don de soi» procède de cette alchimie intérieure qui représente la seule discipline capable de nous extraire de l’«empire des sens», de nous délivrer de l’égoïsme tutélaire de nos ancêtres. C’est pourquoi la société de consommation table sur notre insatisfaction perpétuelle pour nous asservir et faire de nous de simples appendices de la jouissance. Avaler et expulser. Voilà le programme de la machination matérialiste (et, aussi, celui d’un impérialisme qui remplace les peuples par des cohortes d’ilotes apatrides). La société humaine serait-elle devenue un gigantesque tube digestif en cette fin de civilisation ?
Une histoire à suivre …
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