Option nationale, état des lieux

Chronique de Nic Payne

Deux mois après que Jean-Martin Aussant eut mis en veilleuse sa carrière politique, Option nationale se prépare fébrilement à une course à la chefferie. Au-delà des doutes soulevés par certains commentateurs — doutes légitimes, mais parfois intéressés — sur les perspectives d'avenir d'ON après le départ de son chef fondateur, l'organisation de notre jeune parti continue de progresser, et sa base militante demeure imprégnée d'un dynamisme exceptionnel qui fait l'envie de bien d'autres formations politiques.
Ces constats positifs ne nous empêchent pas de prendre la juste mesure des défis auxquels ON fait face en cette période de transition, mais ils témoignent néanmoins d'une chose essentielle: Option nationale n'est pas née, et ne s'est pas nourrie, que de l'adhésion à un seul homme. Jean-Martin Aussant fut un excellent instigateur, et un incomparable agent de progression, mais il a semé, avec d'autres, dans un sol d'une fertilité extrême, devant laquelle le culte des personnalités politiques prend une importance relative. Aujourd'hui, nos convictions, et les raisons qui ont mené à la fondation d'Option nationale sont intactes et toujours aussi fortes.
L'inadéquation du statut provincial, et la quête d'affranchissement qui en découle, sont au coeur de la trame politique, du ressenti et de l'imaginaire collectifs québécois depuis des décennies. Ces éléments constituent une ligne de force, un mouvement de fond qui couve à même ce que nous sommes, qui se manifeste de toutes sortes de façons dans notre vie collective, et qui régit le débat politique y compris lorsque la question nationale n'est pas directement mise en cause. Même les Québécois qui ne sont pas convaincus des mérites de l'indépendance portent souvent en eux le souci de l'émancipation nationale. Être Québécois, c'est, presque par définition, se rendre compte tôt ou tard que le Canada et le Québec sont deux sociétés, et deux entités nationales distinctes. De ce constat, il n'y a qu'un pas à franchir pour conclure que le Québec doit accéder à son indépendance politique.
C'est là, dans l'indépendantisme et dans ses causes profondes et persistantes, qu'Option nationale trouve son carburant. Nous en étions arrivés au point dramatique où une génération entière de Québécois n'avait jamais été mise en contact avec un discours et un engagement indépendantistes soutenus et assumés, lorsque nous avons décidé de fonder un nouveau parti dédié à cette cause. Un immense champ était ouvert, et l'est toujours, dans lequel nous avons été immédiatement aspirés. Dès lors, Option nationale nous a dépassés, est devenu plus grand que nous, plus grand que la somme de ses parties. Il serait d'une tristesse infinie que nous renoncions abruptement à notre idéal seulement deux ans plus tard parce qu'un chef nous a quittés, alors que tant reste à faire, même après avoir initié des milliers de jeunes à la politique et à l'indépendance et ragaillardi des milliers de moins jeunes qui avaient décroché.
Dès les débuts d'ON, bien sûr, s'est posée la délicate question de notre rapport avec ceux de nos compatriotes souverainistes qui, de bonne foi, voyaient et voient encore notre démarche comme un facteur de division. À ceux-là, nous devons continuer de tendre la main, en toute ouverture et dans le plus grand respect, en leur faisant remarquer que la posture attentiste adoptée par le Parti québécois depuis près de vingt ans, et plus récemment la surenchère à gauche de Québec solidaire sur le même thème, n'ont pas permis de progrès indépendantistes significatifs, laissant plutôt place au découragement et à la démobilisation, et à l'incrustation dans une alternance navrante entre gouvernements provinciaux rouges et bleus n'ayant pas les moyens de nos ambitions.
Rappelons-leur aussi que dans les premières lignes des statuts d'Option nationale — la constitution de notre parti — se trouve une clause unique en son genre qui stipule audacieusement que nous sommes prêts à collaborer, et même à fusionner, avec tout parti ayant une démarche indépendantiste claire et concrète. Cette clause est lourde de sens; elle signifie que nous sommes un parti voué à l'objectif indépendantiste, et non pas «un autre parti souverainiste» voulant répondre aux aspirations pointues d'une clientèle particulière. Elle signifie aussi, et surtout, que nous souhaitons ardemment la fameuse «union des forces indépendantistes», tant que celle-ci se consacre bel et bien à l'indépendance du Québec, sans détour, sans délai ni faux-fuyant.
À ce propos, mon collègue Sol Zanetti, dans Le Devoir du jeudi 15 août, propose qu'Option nationale travaille désormais «proactivement» à susciter cette union, et ce, en insistant publiquement sur les conditions auxquelles nous participerions à une coalition.
L'idée pourrait être intéressante — pourvu qu'on n'édulcore pas nos conditions minimales déjà connues —, mais nous n'en sommes pas là, ni nous, ni les autres partis, dont les programmes légitimement adoptés par leurs membres ne priorisent pas l'indépendance. Si Option nationale veut avoir un jour assez de poids électoral pour initier une vraie coalition indépendantiste, il nous faut d'abord consolider nos acquis, continuer de bâtir notre parti sur des fondations solides, de la base militante en allant vers le haut, et continuer de le faire connaître pour ce qu'il est, c'est-à-dire le seul parti au Québec qui fait de l'indépendance son chantier prioritaire et immédiat, avant, pendant et après les élections.
Pour ce faire, il me semble évident qu'ON ne doit pas dépenser de ses belles énergies à reconduire la sempiternelle discussion entre souverainistes qui a cours depuis des années, et dont les bénéfices sont loin de nous sauter aux yeux. Nous n'avons pas travaillé d'arrache-pied à fonder notre parti pour aussitôt nous mettre à jaser en rond en circuit fermé, mais plutôt pour briser ce cycle stérile, ouvrir les portes et aller enfin à la rencontre des Québécois de toutes tendances.
S'impliquer en politique par conviction et former un regroupement nommé «parti» qui, nécessairement, concurrencera d'autres partis, n'est pas une tare, ni un scandale, ni une étourderie. Et si une coalition doit voir le jour, elle verra le jour parce qu'un programme commun aura été possible, et ce programme commun, pour des formations qui se disent indépendantistes, doit être l'indépendance du Québec.
Pour Option nationale, oeuvrer à sa propre pertinence, comme oeuvrer à préparer le terrain d'un véritable ralliement indépendantiste sous quelque forme que ce soit, c'est, d'abord et avant tout, continuer de s'assumer pleinement comme parti indépendantiste déterminé, fonceur et enthousiaste.
Nic Payne


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