Ne blâmez pas les médias

Tribune libre

Il y a quelques décennies, on pouvait consacrer une émission de radio ou de télévision d'une heure à un livre portant sur la question de la surpopulation mondiale sans même nous décrire le lieu ou l'auteur passait ses vacances, nous révéler le designer de son costume, son orientation sexuelle (à cette époque cela aurait été inconcevable) ou nous confier sa recette de tarte favorite. L'auteur était considéré comme le véhicule de sa pensée.
Le même auteur serait invité aujourd'hui dans une dizaine d'émissions de radio et de télévision et quelques téléjournaux et on connaîtrait à la fin le moindre détail de sa vie personnelle et avec un peu de chance quelques éléments superficiels de sa pensée - si tant est qu'il en ait une, mais est-ce si important s'il est divertissant, provoquant ou attendrissant ?
Le moindre élément de pensée sert aujourd'hui de véhicule à la médiatisation de son auteur. Les lignes ouvertes et chroniques journalistiques ne sont que le miroir de ces émissions, une récitation des recombinaisons à l'infinie de ces parcelles de pensée sans aucune logique précise. On choisit quelques bribes d'idées toutes faites comme on le ferait pour un costume et on est prêt pour le grand déballage.
Ne voyez surtout aucun rapport entre ce système et le résultat des élections fédérales de lundi soir.


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9 commentaires

  • Gérald McNichols Tétreault Répondre

    7 mai 2011

    @ Monsieur Roger Warren
    Votre question est intéressante. Aucun politicien ne peut mener une attaque contre les médias parce que cela se retournerait contre lui. La liberté d'expression des médias est à juste titre protégée parce qu'elle est une composante essentielle de la démocratie.
    C'est aux citoyens qu'il appartient de dénoncer les dérives de certains médias lorsqu'ils font preuve de désinformation ou qu'ils perdent leur impartialité.
    En passant, je remarque une tendance à tout demander aux politiciens et même de remplir les rôles qui devraient être ceux des citoyens (les procès d'intention concernant leur degré de volonté réelle de faire l'indépendance est un exemple alors que c'est au citoyens et non aux politiciens de décider de faire l'indépendance). Comment les blâmer d'hésiter quand même l'électorat francophone se comporte de façon aussi désinvolte que lundi dernier? Faut quand même le faire que de voter massivement dans certains comtés pour des poteaux unilingues anglais qui n'ont jamais mis les pieds dans votre comté. Il y a du masochisme dans cela. Voilà le résultat de la radio et de la télé du divertissement : on vote par fantaisie comme si on était en train de faire la vague - c'est-à-dire de se laisser emporter dans un spectacle. Tout un spectacle quand on se réveille le lendemain et que l'effet du narcotique est passé. La souveraineté du peuple implique des citoyens responsables capables de réfléchir par eux-mêmes. À moins d'être complètement cynique, on ne peut pas rigoler tout le temps et zapper des politiciens sérieux même s'ils ne sont pas parfaits à tous égards pour les remplacer par des poteaux qui ne s'attendaient même pas à être élus. On peut pas détruire 20 ans d'efforts parce qu'on veut changer la couleur des rideaux pour faire du changement. En Alberta ils ont pas fait de changement et ils ont gagné. Imaginez les Syriens prêts à mourir pour le droit de voter pour des gens du calibre de nos députés du BLOC s'ils le pouvaient. Et nos citoyens ils n'ont qu'à mettre qu'un petit X et les voilà qui s'ennuient tellement qu'ils décident d'essayer le changement. Voilà ce qu'implique le concept de souveraineté du peuple. Si les francophones avaient voté massivement en faveur de l'indépendance en 1995, nous aurions déjà notre pays et ni l'argent ni le vote ethnique n'auraient pu l'empêcher.
    Pour revenir à votre interrogations, je vois trois façons de contester la dérive actuelle de certains médias
    1.- la première est de démonter les mécanismes par lesquels certains d'entre eux ont perdu leur indépendance et se sont mis au service des oligarchies. Le journaliste et écrivain Hervé Kempf qui donnait une conférence à Montréal cette semaine donne une explication de ce phénomène.
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Herv%C3%A9_Kempf
    2.- Les citoyens peuvent aussi dénoncer les abus flagrants comme dans le cas de la mise en scène et le déroulement scandaleux de l'interview Gilles Duceppe au Téléjournal de Radio-Canada la semaine précédant l'élection ou on a mis en évidence son passage de jeunesse dans un parti communiste ouvrier. S'agissait-il d'une commande ou d'un acte conscient ou inconscient de la part de l'équipe du téléjournal ? Je pense que le téléjournal de Radio-Canada doit faire amende honorable de cette odieuse bévue s'il veut retrouver un minimum de crédibilité. Cela devrait faire l'objet d'une plainte des citoyens au C.R.T.C.
    3.- On peut prendre la décision de s'abonner aux médias indépendants qui maintiennent des normes plus élevées de rigueur. Nous avons la chance d'en avoir à Montréal.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 mai 2011

    On sait tous que le mouvement indépendantiste (Bloc et PQ) est quotidiennement dénigré par les média (Gesca,Radio-can,Québecor) or JAMAIS,JAMAIS un leader indépendantiste n'a osé s'attaquer même timidement à ces haut-parleurs.Pourquoi?
    De quoi ont-ils peur?
    Duceppe serait bien placé maintenant pour écrire quelques mots à ce sujet.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 mai 2011

    Entre autres victime de la concentration des médias, des coupures de temps, d'espaces et y compris de journalistes, de choix arbitraires en fonction du marketing, de relations incestueuses avec les agences de communication, de la tendance «opinion», de la confusion des genres, l'information est de nos jours grossièrement tronquée. Naguère lire un journal local permettait tout à fait de comprendre ce qui se passait dans une localité. Cette période faste pour la démocratie n'est plus qu'un souvenir. Dans l'actuel contexte ratatinant, une campagne électorale ne se mesure pas à son contenu mais à la performance des chefs de parti pendant 35 jours. Le champ est libre pour la désinformation. A preuve, ces électeurs qui ont cru voter pour des «souverainistes» en votant NDP. C'est là le succès de Smiling Jack du lundi 2 mai.

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2011

    M. McNichols Tétreault, de ces deux articles et de votre commentaire récent dans un autre, je prends vraiment de plus en plus de plaisir à vous lire, et j'anticipe d'avance votre prochain article.
    J'aimerais rajouter à l'intention de Marc (le premier commentaire) que loin d'être "dur à suivre" comme vous dites, cet article démontre que "ceci découle de cela"; "ceci" étant le présent article, et "cela" l'autre article auquel vous référez.
    Bien à vous.
    Adam Richard

  • Gérald McNichols Tétreault Répondre

    6 mai 2011

    Merci Luc Potvin de m'avoir lu correctement
    J'ai eu recours à l'ironie parce qu'elle s'impose parfois d'elle-même à l'écriture et que je crois qu'il faut parfois dédramatiser les situations si on veut arriver à penser. La transformation des médias n'est pas à portée de main : les décrire dans leurs travers est un exercice amusant et efficace. Je pense que Marc, le correspondant à qui vous répondiez me comprendra mieux la prochaine fois. Ce que j'ai fait dans mon article sur la boussole, c'était de démonter le mécanisme d'une machine infernale. Quand je l'ai fait, il y avait déjà 1,5M de personnes qui y avaient participé. Le mal était fait.
    Dans mon article du lendemain des élections sur le triste destin des leaders indépendantistes, j'ai été plus profond, c'était le lendemain de l'élection et j'ai proposé une interprétation plus psychanalytique et très personnelle de ce qui s'était passé. Les causes et interprétations sont tellement nombreuses qu'on ne trouvera heureusement jamais une réponse définitive.
    Je découvre depuis quelques semaines seulement la Vigile.net grâce aux critiques dont elle a été l'objet. Je m'aperçois de la passion des participants mais aussi de la dramatisation fréquente qui ne me semble pas propice à la pensée. Beaucoup de gens s'en prennent directement aux auteurs au lieu de demeurer au niveau des idées. Il y a une peur très grande de la critique et de l'auto-critique; on retrouve une tendance à imposer la langue de bois propre à la grande noirceur alors qu'il faut s'exprimer. C'est une dérive néfaste à mon avis.
    J'adore Pierre Falardeau au plus haut point mais je ne pense pas qu'il faille haïr ses adversaires. Je pense être capable de reconnaître le talent d'un adversaire quand il se montre plus fort que moi. Et je n'ai pas besoin de le haïr pour le combattre. Mieux le connaître est bien plus efficace. Mais quand on commet des attaques sur l'auteur d'un texte au lieu de s'en tenir aux propos, on divise et on ne fait rien de bon pour la cause. Si vous doutez de quelqu'un, il faut questionner cette personne, dialoguer au lieu de la juger ou de la condamner.
    Rien dans la situation actuelle du Québec n'est irréversible. Tout est encore possible. Il faut cependant aménager des espaces d'échange pour que les gens aient envie de participer au projet de pays ce qui ne peut arriver si on sème le mépris. Il faut analyser les situations non pas pour ostraciser des coupables ou des groupes de coupables mais bien pour élaborer des stratégies qui vont permettre d'atteindre les objectifs recherchés.
    Le plus grand défi du mouvement indépendantistes c'est de mettre à jour son argumentaire et son image qui ne rejoignent plus la majorité des Québécois et qui sombre parfois dans l'intolérance et la ringardise au détriment de l'ouverture, de l'intelligence et de la pertinence. Il faut aussi savoir prendre de la distance pour regarder le Québec de l'extérieur.
    Et pour revenir à l'ironie, il va surtout falloir que le mouvement indépendantiste réapprenne à rire de ses travers et de ses échecs pour mieux les transcender. La mécanique du rire est une arme redoutable que nous ne maîtrisons pas assez. Même chose pour les signes : Je me rappelle du jour ou, au temps du premier référendum de 1980 alors que j'étais adolescent, un des voisins s'est mis à faire son jogging avec son fleurdelisé cousu sur les fesses de son short bleu. À chacun de ses passages il y avait un fédéraliste de plus.

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2011

    Le plus sage commentaire à « exprimer » dans ce genre de situation, c'est celui que l'on tait...
    André Meloche

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2011

    Je pense que M. McNichols Tétreault use tout simplement d'ironie. Depuis le 2 mai, quelques voix, ici et là, se sont fait entendre pour se moquer de ceux qui ont osé soulever l'hypothèse d'une sorte de complot médiatique en faveur du NPD.
    Or, il y a bel et bien eu, tant chez Québécor que chez Gesca, des scribouilleurs de droite qui, soudainement, au beau milieu de la campagne électorale, nous ont parlé du « vent de fraîcheur » apporté par le NPD et le souriant Cracker Jack. On pense à Éric Duhaime, par exemple, à qui convient plus que parfaitement l'une des expressions lancées par Gérald Larose.
    Même quand ils sont de droite, ce qui est le cas huit ou neuf fois sur dix, les fédéralistes, au Québec, sont prêts à miser sur des forces de gauche pour combattre les indépendantistes. C'est le jeu qu'ont joué les médias, ces mêmes médias dont M. McNichols Tétreault dénonce aussi, et avec raison, l'enlisement dans la futilité ou dans ce « human interest » dont on se rappellera ce qu'en disait Michel Chartrand.
    Alors, le titre de M. McNichols Tétreault, « Ne blâmez pas les médias », à moins que je me trompe du tout ou tout, c'est bien de l'ironie.
    Luc Potvin
    Verdun

  • Gérald McNichols Tétreault Répondre

    6 mai 2011

    Marc,
    Si vous aviez lu mon article jusqu'au bout vous en auriez découvert l'ironie.

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2011

    Dur de vous suivre M.McNichols
    Dans votre article precedent vous nous amener vers des pistes de manipulations médiatique...
    La SRC déboussolée
    Perdre le nord - Pour abuser quelqu’un il faut le rendre confus
    La neutralité discutable d’une machine qui étourdit
    ...et maintenant il ne faut pas blâmer les médias.