Multiculturalisme et mauvaise conscience occidentale

Tribune libre

Ce n’est plus un secret pour personne; le multiculturalisme doit son existence à l’influence des idéologies radicales des années 70. La promotion de la différence, la thématique de l’exclusion et la rupture avec l’ordre établi, toute des idées qui auront une influence prépondérante dans la formulation du multiculturalisme à la sauce canadienne. Or, j’aimerais suggérer que, d’une part, ces idées ont grandement influencés l’émergence de la doctrine multiculturaliste, mais aussi, dans une perspective plus générale, de la mauvaise conscience occidentale.
En effet, la mauvaise conscience occidentale, dont l’émergence remonte essentiellement à la période d’après-guerre et de la décolonisation, eu clairement permise la formulation de la doctrine multiculturaliste. Les deux conflits mondiaux, portant l’idée de la guerre totale à son paroxysme et le coût humain qu’engendre une telle pratique de la guerre, permettront un relâchement des valeurs proprement occidentales, combinées à la montée du tiermondisme comme autant de conséquence de la mauvaise conscience occidentale.
Dans le clivage nord-sud, l’habitant du sud revêt toute les caractéristiques du bon sauvage de Jean-Jacques Rousseau, en proie à l’exploitation unilatérale et sans limite d’un nord dont l’existence même semble suggérer la repentance immédiate et perpétuelle. Pour mener à bien le processus rédemptoire, il est aussi suggéré de s’effacer pour que le nouvel arrivant se sente chez lui, moindre dette de l’homme l’occidental envers l’hériter du bon sauvage.
De la conviction que l’Occident doit incarner l’avant-garde mondiale à la dépréciation même de son existence, l’idée multiculturelle constitue la suite logique. Attaqué, l’Occident ne se défend plus ou si peu, en son sein même existant une intelligentsia qui n’a de cesse de le déprécier, de le pointer du doigt comme source incontournable de tous les maux qui affligent l’humanité. Le multiculturalisme, le pluralisme identitaire, pose l’idée du préjugé favorable envers la différence comme condition sine qua non à l’expiation perpétuelle des péchés occidentaux. Promouvoir la différence, dans ces conditions, revient à se nier soi-même puisque le maintien existentiel de toute entité collective ou individuelle requiert nécessairement une certaine dose de narcissisme. Se résoudre à la promotion de telles idées, c’est la mort de l’Occident, c’est la mort des peuples qui en font partie, la fin annoncée de la nation franco-québécoise qui n’a su que se déprécier tout au long de son existence d’entité colonisée et inférieure, qui dans son accession à la modernité aurait dût retrouver sa fierté et sa volonté d’affirmation, mais qui fût, en fin de compte rabrouée comme toute nation dominée à laquelle on refuse de reconnaitre l’existence.
Le multiculturalisme canadien, outre son origine, incarne dans la pratique la haine du peuple québécois, sur fond de mauvaise conscience occidentale. Il nous impose, dans sa forme légale, tout un spectre d’a priori hautement discutable. Il sert surtout à se convaincre soi-même que l’existence nationale n’en vaut pas la peine, la doctrine multiculturelle faisant l’effet d’un puissant sédatif envers la douleur (et la réaction!) qui devrait normalement affliger un peuple dont le maintien est tout sauf certain. Le Québec multiculturel : de majoritairement franco-québécois à franco-québécois au sein d’une pluralité de culture, car le simple fait de l’existence d’une culture majoritaire opprime les nouveaux arrivants et brime le formidable apport qui devrait normalement être le leur.


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mars 2010

    @ Mathieu Pelletier:
    Merci pour ce texte. Je crois que votre analyse est excellente, et très bien exprimée.
    Maintenant, je me permettrais un petit commentaire: souvent, les nations du Tiers Monde, ont créé des sociétés à leur image, et bien avant que les navires des Occidentaux n'y jetent l'ancre.
    Si l'Occident ne cesse de décliner, décliner... Que feront ces nations habituées à nous culpabiliser pour tous leurs problèmes, alors?