Avec un taux de participation aussi atrocement bas que 57 %, le premier ministre doit porter l'ultime responsabilité d'un tel niveau d'indifférence chez autant de Québécois face au choix de leur propre Parlement.
Non parce qu'il a déclenché une élection après la fédérale, ou parce qu'elle était à trois semaines de Noël, ou patati ou patata. Il en est responsable parce que l'inutilité de cette élection crevait les yeux même des citoyens les moins politisés. Dans les faits, le gouvernement, même minoritaire, jouissait de la pleine collaboration de l'ADQ et du PQ pour faire face à la "tempête" économique. Ne restait donc que sa véritable intention: arracher de son gouvernail les deux autres paires de mains, soit celles du PQ et de l'ADQ!
Là-dessus, ce fut mission accomplie. Jean Charest a retrouvé sa majorité. Et aussi courte soit-elle avec ses 66 députés sur 125, elle est néanmoins bien réelle, voire appelée à augmenter si le PLQ devait réussir à détrousser quelques-uns des survivants adéquistes. Car, oui, le timing de l'élection aura aussi permis au PLQ de précipiter l'ADQ en phase possiblement terminale et de renvoyer Mario Dumont dans ses terres. Pour les libéraux, les comptes sont donc réglés avec l'ADQ pour le double crime d'être née des échecs du gouvernement Bourassa dans le dossier constitutionnel et d'avoir privé le PLQ de sa majorité en 2007. Un an et demi plus tard, voyant une ADQ carrément éviscérée, c'est comme si la dernière élection n'avait jamais eu lieu!
Depuis un an, on aura cassé beaucoup de sucre sur le dos de Mario-la-girouette-Dumont. Faut dire qu'il aura beaucoup couru après! Mais l'histoire retiendra aussi que dans sa jeune vingtaine, M. Dumont fut un des rares libéraux à ne pas avoir courbé l'échine. Et à l'avoir fait par conviction, au point de quitter un parti au sein duquel il aurait pourtant pu se la couler douce pour le reste de ses jours. Ne serait-ce que pour cela...
Mais revenons à ce taux désastreux de participation. En fait, je vous avouerai même que lorsque je suis sortie de la soirée électorale à laquelle je participais au réseau CBC, je ne le croyais toujours pas. J'espérais que ce soit une erreur commise par tous les réseaux. C'est pour vous dire!
Bien sûr, on vous a dit qu'il faisait bien froid lundi dernier. Même M. Charest l'a répété! Maudit hiver! N'est-ce pas? Et pourtant, la dernière fois qu'on a voté avant Noël, soit le 2 décembre 1985, ce taux était de 76 %. Vous savez maintenant que ce 57 % est notre taux de participation le plus faible depuis 1927, alors qu'il était de 56,4 %. En passant, question de s'en souvenir au moment où nous avons la première femme chef de l'Opposition officielle, en 1927, les femmes ne votaient toujours pas ici! Au Québec, ce droit de vote ne date en fait que de 1940... De toute façon, ne faisons pas dans le politiquement correct: le 57 % de 2008 est probablement le pire ou le second pire taux de participation depuis plus de cent ans! Ce record est immensément triste.
En d'autres termes, bien qu'il soit légitime malgré tout, lorsque M. Charest parle maintenant d'un gouvernement "rassembleur", on se demande bien où il le voit, considérant qu'il le doit à seulement un électeur sur quatre.
23 ANS PLUS TARD
En 1985, Pauline Marois se présentait à sa première course à la chefferie. Aujourd'hui, 23 ans plus tard, devenue chef du PQ, sa boucle est presque bouclée. Après le tsunami Boisclair, et ayant profité elle aussi de la débâcle adéquiste, elle aura ramené son parti à l'Opposition officielle avec un caucus élargi et expérimenté de 51 députés. Ce qui ne fut pas une mince tâche. Et devrait nous donner une Assemblée nationale nettement plus vivante.
Sa prochaine étape: essayer de prendre le pouvoir une fois que les libéraux auront terminé leur troisième mandat. Ce qui, on en conviendra, lui laisse du temps pour décider si le PQ continuera à "jaser" de souveraineté sans parler du "moyen" de la faire, ou s'il ira à la prochaine élection avec un engagement clair visant à tenter de réaliser ce que Mme Marois appelle le "projet de pays". Ce sera à suivre.
COMME QUOI, ON Y CROIT ENCORE...
Et pourtant, malgré une classe politique ayant peiné à mobiliser les citoyens pour un simple vote, le cynisme ne semblait pas trop de mise à l'annonce de la victoire d'Amir Khadir dans Mercier. Hormis quelques langues vinaigrées n'y voyant là qu'un caprice de la "gauche caviar du Plateau-Mont-Royal", voilà qu'au-delà de la partisanerie, des citoyens redécouvrent la différence que pourrait faire un "simple" député, comme on dit. Comme quoi, dans le fin fond, on croit encore à l'importance des élus. C'est peut-être juste qu'on en voudrait un éventail un peu plus étendu et défendant aussi ceux et celles qui ont peu ou pas de voix dans les coulisses du pouvoir politique et médiatique.
Tenez. Avouez que ce sera tout de même intéressant d'entendre Amir Khadir, que ce soit en Chambre, une fois de temps en temps, ou en point de presse, offrir autre chose que le discours dominant voulant, par exemple, qu'on ne soit plus capable de se payer un système de santé public fort. Ça nous changera du refrain usé du "c'est-pas-de-ma-faute-c'est-celle-de-l'autre", ainsi que des professions de foi faites envers le système public la main sur le coeur, mais pendant qu'on légifère pour élargir le "marché" de la maladie au privé...
Maudit hiver!
l'inutilité de cette élection crevait les yeux même des citoyens les moins politisés
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