Les syndicats militaires existent

Peu connus, l’un d’eux, le finlandais, a fait ses preuves en guerre

Tribune libre


En service en Allemagne à l’automne 1957, j’ai appris que la nouvelle armée allemande, la Bundeswehr, était syndiquée sur le modèle de l’armée finlandaise. Après l’indépendance de la Finlande en 1920, les Finlandais, libérés de la domination russe, s’étaient d’abord syndiqués sur le modèle suédois.
En 1939, craignant une invasion allemande de la Russie par le nord, Staline ordonna l’invasion de la Finlande, dont la neutralité n’était pas crédible.
Petit pays périphérique au nord-ouest de la Russie, la population de la Finlande de 1939 ne dépassait pas quatre millions d’habitants. Sa défense était basée sur une armée de miliciens territoriaux, comme la Suisse, qui avait servi de modèle au maréchal finlandais Karl Gustav Emil Mannerheim, avec cette différence que les militaires finlandais étaient syndiqués.
Quant à Mannerheim, il avait servi comme officier de cavalerie dans la guerre russo-japonaise et à la bataille de Liao Yang en Corée en 1905. Revenu de Corée, il s’était rendu célèbre en dirigeant une enquête de plusieurs années sur le statut géopolitique du Sin-Kiang.
Devenu général de l’armée russe pendant la guerre 1914-18, il avait commandé une division sur le front de Bessarabie. Lors de la révolution russe de 1917, alors que les Bolchéviques assassinaient leurs généraux, ils permirent à Mannerheim de retourner dans son pays, en même temps qu’ils accordaient l’indépendance à la Finlande.
Novembre et décembre 1939, face à l’invasion russe, Mannerheim ne disposait que d’effectifs très réduits.
Première décision de l’armée syndiquée : déployer toutes ses forces
sur le matériel et la logistique russes. Le succès fut total. Privés de leur matériel et de leurs communications, les Russes se retrouvèrent considérablement affaiblis.
Deuxième décision de l’armée syndiquée : frapper à toutes forces sur le Quartier Général de l’armée russe, localisé à Suomussalmi.
La célèbre bataille de Suomussalmi a eu lieu entre le 20 et le 28 décembre 1939, par une température descendant à 50 sous zéro.
Ce fut un coup mortel porté à l’armée Rouge du maréchal Woroschilow. Jamais au cours de l’histoire de l’humanité, une armée aussi petite en avait-elle défait une aussi grosse.
Face aux Allemands, les Russes n’avaient plus le choix. Même s’ils étaient encore en position de force, ils reconnurent de nouveau l’indépendance de la Finlande, mais exigèrent de dures réparations, dont la construction et la livraison de navires pour la Russie, qui n’étaient jamais assez bien construits ni dotés de suffisamment d’équipements.
Les Finlandais acceptèrent leur mauvais sort, sauf que le travail accompli pour les Russes fut pour la Finlande le début d’une industrie navale d’une exceptionnelle compétence et devint l’occasion d’un développement économique inattendu pour les Finlandais qui en profitent encore.
Les syndicats avaient joué un rôle important dans les succès de la Finlande au cours de ses misères, et par la suite.
Après l’expérience tragique de la seconde Guerre mondiale, les Allemands suivirent les traces de la Finlande et syndicalisèrent leur armée. Finis les ordres absolus et arbitraires, criminels et incompétents. La nouvelle discipline serait non pas rigide, mais rigoureuse. Le syndicat exige intégrité et compétence de la part du gouvernement allemand et des autorités militaires en matière d’organisation et d’administration des nouvelles forces armées.
Jamais il n’a été possible de parler de syndicats militaires dans les Forces Armées Canadiennes. Les autorités de mon temps y ont opposé un refus formel, qualifiant les syndicats de fauteurs de troubles.
JRMS

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René Marcel Sauvé217 articles

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J. René Marcel Sauvé, géographe spécialisé en géopolitique et en polémologie, a fait ses études de base à l’institut de géographie de l’Université de Montréal. En même temps, il entreprit dans l’armée canadienne une carrière de 28 ans qui le conduisit en Europe, en Afrique occidentale et au Moyen-Orient. Poursuivant études et carrière, il s’inscrivit au département d’histoire de l’Université de Londres et fit des études au Collège Métropolitain de Saint-Albans. Il fréquenta aussi l’Université de Vienne et le Geschwitzer Scholl Institut Für Politische Wissenschaft à Munich. Il est l'auteur de [{Géopolitique et avenir du Québec et Québec, carrefour des empires}->http://www.quebeclibre.net/spip.php?article248].





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