AUSTÉRITÉ

Les Musées de la civilisation bouclent leurs archives

Quelque 400 chercheurs dénoncent la sape de la mission de l’institution

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Plus de personnel pour veiller à l’analyse des collections aux Musées de la civilisation du Québec (MCQ), ni en conséquence de moyens pour préparer comme avant de nouvelles expositions. Et les riches archives de ces collections classées par l’UNESCO ne sont plus accessibles non plus aux chercheurs. Voilà ce que regrettent quelque 400 historiens, archivistes et sociétés d’histoire dans une lettre obtenue par Le Devoir. Ils protestent et s’inquiètent du sort fait aux Musées de la civilisation à Québec, une victime selon eux des mesures d’austérité.

Les MCQ comprennent, outre le Musée de la civilisation, le Musée du Séminaire, le Musée de l’Amérique francophone, le Centre d’interprétation de la Place-Royale et la Maison Chevalier. Historiens de toutes les universités du Québec, mais aussi d’autres provinces canadiennes, archéologues, bibliothécaires, archivistes de plusieurs sociétés d’histoire, tous n’en reviennent pas : la mission de ce fleuron est « remise en cause par les récentes décisions administratives ».

« Les Musées de la civilisation de Québec ont procédé, le 1er avril, au démantèlement complet de leur service de la recherche et s’apprêtent, le 23 juin prochain, à fermer la salle de consultation de leurs archives. » Six professionnels ont perdu leurs emplois déjà, dont deux conservateurs et un archiviste.

Pour Stéphan La Roche, directeur général, les Musées manquent effectivement d’argent en raison des restrictions budgétaires, mais certains arguments invoqués par les signataires lui apparaissent en partie inexacts. La fonction de recherche du musée n’a pas été sacrifiée, à son sens. Elle a plutôt été intégrée à la direction des expositions. « Elle n’a pas disparu. Ce sont six employés occasionnels dont les contrats n’ont pas été renouvelés. » Selon lui, « la recherche continue », même s’il reconnaît aussi que les conditions actuelles de son exercice sont difficiles.
Archives fermées

Les archives de l’institution seront en revanche bel et bien fermées aux chercheurs pour une période indéterminée. Les archives des MCQ sont sans équivalent au Canada, au point d’être reconnues par l’UNESCO. « Elles abritent la collection nationale composée notamment de la collection ethnographique du Québec, des collections des Premiers Peuples, celles du Séminaire de Québec ainsi que des livres rares et anciens », rappellent les signataires. Tout cela, c’est-à-dire environ 625 000 objets et documents, avait été regroupé dans l’intention d’être au service du savoir et de l’éducation. La fermeture serait provisoire.

Martin Pâquet, professeur à l’Université Laval et président de l’Institut d’histoire de l’Amérique française, est un des instigateurs de la lettre de protestation commune. « On ne connaît pas les délais pour cette fermeture », dit-il. Certains documents de l’institution sont en attendant disponibles à la consultation numérique.

Les spécialistes s’inquiètent aussi du fait que cette situation menace la reconnaissance internationale. « L’UNESCO a inscrit le Fonds d’archives du Séminaire de Québec (1623-1800) au registre Mémoire du Monde, en 2007. L’un des critères prédominants est celui de l’authenticité des documents consultés. » Or ne pouvoir consulter des documents qu’en ligne ne peut garantir l’authenticité historique, plaident les signataires.

Pour le directeur général des Musées de la civilisation, « ce n’est pas parce qu’on est dans le virtuel [que cette fermeture intervient], mais bien parce qu’on a des problèmes budgétaires ».

Le directeur n’est pas à même de préciser quand la salle pourra être rouverte. « Dans notre optique, c’est quelques mois. On est à la recherche de financement pour pouvoir rouvrir. »

Avec un financement gelé, l’administration des Musées doit composer avec des coûts de fonctionnement qui, eux, augmentent sans arrêt. « On sait très bien que l’administration doit composer avec une situation difficile en raison des politiques d’austérité », observe Martin Pâquet.

Cette situation très difficile conduit-elle l’administration des Musées à dénoncer ce sous-financement ? « Je n’ai pas à dénoncer qui que ce soit », dit Stéphan La Roche. « Je suis un gestionnaire d’une société d’État. Des représentations sont faites au ministère pour faire valoir nos besoins. […] Mais on comprend l’importance d’avoir des budgets équilibrés. »


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