Les Élections et l'indépendance

Jouer au plus fin avec les électeurs n'est pas une option

PI - Parti indépendantiste

L'idée d'accéder à l'indépendance par mandat électoral, sans recours au
référendum, s'impose de plus en plus. C'est la marque du [Parti
Indépendantiste->www.parti-independantiste.org], nouvellement autorisé par le Directeur des élections du
Québec. Une fois élu selon nos règles parlementaires, le gouvernement
déclare l'indépendance en toute légitimité et met à exécution le programme
annoncé. Certains, toutefois, décrochent mal du scénario référendaire et
s'inquiètent de la reconnaissance internationale. C'est le cas du
Rassemblement pour l'indépendance du Québec (RIQ), qui télescope le
référendum dans l'élection et assimile indépendance et reconnaissance.
Le référendum, voie piégée et fermée
Les Québécois ne veulent pas être les dindons de la farce d'un troisième
référendum. Ils ont en aversion les prétentions hégémoniques d'Ottawa à
décider de la valeur du résultat (loi C-20 sur la clarté) ; ils ont pris
bonne note de l'ingérence hostile du Canada en 1980 et de 1995 et savent
qu'il méprise leurs règles référendaires et leur Assemblée nationale.
La prétendue obligation de référendum comporte un défaut rédhibitoire.
Elle empêche le mandat que les élus indépendantistes reçoivent du peuple
d'être tenu pour ce qu'il doit être par définition, un mandat
d'indépendance. Du coup, la détention du pouvoir met ces représentants en
contradiction avec eux-mêmes. Les atermoiements historique du PQ et sa
partie de cache-cache avec l'électorat (« vous votez pour des
souverainistes, pas pour la souveraineté ») sont là pour le prouver. Aussi
est-ce en dehors de l'appareil péquiste et de son référendisme de dupe
qu'aujourd'hui les indépendantistes se réorganisent.

La voie électorale, qu'est-ce au juste ?
À la place du référendum, la voie qui s'offre tout naturellement est celle
des élections. Le parti qui se voit confier le mandat de gouverner, en
vertu de la majorité de députés qu'il fait élire au parlement, réalise son
programme comme il en a la légitimité et l'obligation devant le peuple. Ce
principe vaut pour tous les partis, y compris le parti de l'indépendance.
Concrètement pour le Parti Indépendantiste, cela signifie : faire adopter
par l'Assemblée nationale, conformément à l'engagement pris, une
déclaration d'indépendance et une Constitution provisoire d'État
indépendant ; charger une assemblée d'élaborer un projet de Constitution
permanente à soumettre à l'approbation possiblement référendaire du peuple.
À noter que ce référendum sur le projet de Constitution permanente ne remet
en question ni le mandat des élus, ni la Constitution provisoire existante,
ni l'indépendance du nouvel État.
Que le mandat d'indépendance tienne dans le mandat électoral même amène à
parler de voie électorale d'accession à l'indépendance. Emprunter cette
voie, c'est faire de la politique telle qu'elle se pratique chez nous et
accepter les règles électorales et parlementaires existantes. De la sorte,
les électeurs savent clairement pourquoi ils votent quand ils votent pour
le Parti indépendantiste, puisque le mandat que celui-ci sollicite auprès
d'eux est bien, comme le veut sa vocation explicite, un mandat
d'indépendance — nonobstant bien sûr les autres éléments de sa plateforme.
Le mélange inconséquent de l'élection référendaire
Certains partisans de la voie électorale ne l'acceptent qu'en la
rebaptisant à l'eau du... référendum! Ainsi en est-il de l'« élection à
double majorité », qui cumule majorité des sièges (élection) et majorité
des voix (référendum). Pour pouvoir légitimement réaliser son programme
d'indépendance, le parti devrait faire élire plus de candidats que tout
autre parti en lice, mais encore recueillir au moins la moitié des
suffrages exprimés. C'est l'opinion du RIQ (« Des défis sur le chemin de
l’indépendance »,Vigile, 7 nov. 2007). Sa proposition de « pacte »
électoral entre partis souverainistes vise d'ailleurs à atteindre cette
double majorité.
On aura compris que l'élection à double majorité n'est que l'autre nom,
moins équivoque peut-être, de l'« élection référendaire ». Mais ce mixage
ferait entorse à notre système électoral et... fuir les électeurs, car il
brouille le jeu électoral, y introduit un élément de désordre, l'exigence
inusitée de majorité absolue, et consacre l'iniquité entre les partis en
lice.
Une élection référendaire serait certes un référendum pour les
indépendantistes, mais une élection ordinaire pour les autres ! La double
majorité serait exigible des seuls indépendantistes ; les partis adverses
n'auraient rien à faire d'une surexigence pareille. Ils auraient ainsi le
droit de réaliser leur programme en cas de victoire, mais pas le parti de
l'indépendance. Curieuse démocratie multipartite qui commence par une
injustice électorale ! On verrait le mandat de représentation des élus se
scinder en deux légitimités : celle d'exercer le pouvoir et celle de
réaliser leur programme. Les représentants du peuple, d'obédience
indépendantiste, ne le seraient plus dès qu'il s'agirait pourtant de tenir
leur engagement ! L'électeur indépendantiste pourrait avoir la surprise de
gagner ses élections tout en les perdant, si d'aventure son parti rentrait
(majorité des sièges), mais pas son option (majorité des voix). Son parti
serait porté au pouvoir, mais privé en même temps du pouvoir de l'exercer
conformément à ce qu'il a promis. Pouvoir décisif pourtant, qui donne sens
à tout l'exercice et dont bénéficie tout parti autre qu'indépendantiste.

Toutes ces complications et entourloupes à cause du refus de soumettre
tout simplement l'indépendance au verdict électoral, d'offrir aux
Québécois, quand ils vont voter aux élections législatives, le choix
partisan de l'indépendance. Après tout, la lutte pour l'indépendance est
une lutte politique et ne saurait échapper à l'affrontement inévitable des
partis.
La manie souverainiste de s'auto-exclure de la politique
Les souverainistes ont contracté la manie de se nier dès qu'ils entrent en
élections ou au parlement : ils se présentent devant l'électorat en
laissant leur option de côté ; ils refusent d'utiliser les moyens du
gouvernement pour la promouvoir. Soit qu’ils renvoient l'option
souverainiste à un exercice autre qu'électoral (le référendum), soit qu’ils
dénaturent l'exercice électoral pour être sûrs de ne jamais vraiment y
soumettre leur option (cas de l'élection à double majorité).
Si nous changeons les règles du jeu, que nous introduisons des exigences
inusitées et superflues, l'électeur nous accusera de brouiller les cartes
et de jouer au plus fin avec lui. Le parlementarisme à la québécoise, de
type britannique, appartient à une grande famille de régimes démocratiques
reconnue à travers le monde. Pourquoi le modifier quand il s'agit de s'en
servir à fond ?
La reconnaissance internationale comme prétexte
Pour soustraire au verdict des électeurs l'enjeu de l'indépendance, toutes
les craintes sont mobilisées : fracture du Canada, mesures de rétorsion
d'Ottawa, intervention armée des États-Unis, guerre civile... L'une de ces
suppositions concerne la reconnaissance internationale : utilisation du
droit international contre nous, lenteur des nations étrangères à nous
reconnaître — à commencer par l'État canadien !
L'inquiétude hyperbolique du RIQ à ce sujet vient de ce qu'il assimile
indépendance et reconnaissance. Pour lui, pas d'indépendance sans
reconnaissance. Dans ses textes d'ailleurs, l'indépendance du Québec
équivaut à avoir une place aux Nations Unies; l'indépendance d'une nation
n'a d'existence concrète que lorsqu’elle est reconnue par les autres
nations. Et c'est encore par rapport à la reconnaissance internationale
qu'il justifie l'élection à double majorité. (« Une élection à double
majorité, dans le cadre d’un pacte électoral entre partis politiques ou
non, est le véhicule le plus approprié pour déboucher sur une
reconnaissance internationale », bilan cité.)
En vérité, une exigence qui bousculerait des règles aussi démocratiques et
internationalement reconnues que les nôtres ne saurait tenir lieu de
critère au regard du droit international et, de ce point de vue, on a au
contraire tout intérêt à jouer sans complexe notre système politique.
Surtout, indépendance et reconnaissance internationale ne sont pas la même
chose et c'est la première qui conditionne la seconde, non l'inverse.
Jacques Parizeau s'en est rendu compte dans la préparation du référendum
de 1995. En quête du soutien de la France et peu enclin, pour sa part, à
l'idée d'une déclaration de souveraineté, il a changé d'avis quand les
Français lui ont dit : « Que voulez-vous que nous reconnaissions si vous ne
déclarez pas l'indépendance ? » Sans déclaration d'indépendance, il n'y a
rien à reconnaître. Et quelles que soient les difficultés qui puissent se
dresser sur le chemin de cette reconnaissance internationale, elle n'est
jamais qu'une résultante de l'indépendance, non sa condition.
Conjuguer pour vrai élections et indépendance
Cessons de prendre les Québécois pour des sourds en leur demandant deux
fois la même chose comme si la première ne suffisait pas et, comble
d'esprit sportif, en donnant aux adversaires de leur indépendance politique
deux occasions de les vaincre ! La démission historique du PQ fait que les
Québécois n'ont plus le choix de l'indépendance quand ils vont voter (et
même avant, avec la stratégie référendaire, ils n'avaient ce choix que de
façon indirecte et hasardeuse). De ce choix électoral de l'indépendance
dépend pourtant notre avenir national et, à court terme, la clarification
du débat public. C'est en conjuguant enfin correctement élections et
indépendance que le mouvement indépendantiste se relève aujourd'hui.

-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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5 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    12 février 2008

    J'aimes croire en l'indèpendence du Quebec tel que le P.I le prèsente sans dètour
    ( Journal de Mtl lundi 11 fev 08 ) Chez nous pour nous, Je crois dans un Quebec
    FRANCAIS et ouvert au reste du monde par sa culture, le respect de ses lois,
    son bilinguisme et son ouverture. Mais il y a un os et un tres gros dans ce projet
    de scociètè et c'est le fait autochtone avec leurs revendications tèritoriales les deux
    tiers du Quebec, leurs refus d'etre soumis aux meme lois que les non-autochtone
    leurs atachement au fèdèral ( $ ) et dans ce cas prècis il y aura deux thermes qui
    seront comme eaux et feux SÈPARATION et PARTITION.
    pourions-nous faire un pays
    du Quebec avec la seule vallèe du St-Laurent, ou si je me fais des peurs

  • Archives de Vigile Répondre

    9 février 2008

    Le chaos monsieur Lévesque, nous sommes dedans!
    Nous venons de perdre notre bourse dans la métropole économique du Québec. Nos entreprises québécoises sont toutes achetées les unes après les autres par les américains. Le français recule sur l'Ile de Montréal. Le secteur manufacturier québécois est en voie d'effondrement. Le gouvernement Charest ment à pleine gueule sur tous les dossiers qu'il touche et vous vous inquiétez de l'avènement d'un Québec indépendant par une majorité simple?
    Moi, c'est de demeurer dans ce foutu bordel de merde qui m'inquiète!

  • Archives de Vigile Répondre

    5 février 2008

    Ne craignez-vous pas la réaction éventuelle d'une majorité qui n'aurait pas voté pour le Parti indépendentiste si ce dernier prenait le pouvoir et déclarait unilatéralement la souveraineté du Québec? Je souhaiterais vous lire là-dessus. Certains affirme que la question de l'avenir du Québec est trop importante pour faire l'objet d'une décision prise à majorité simple lors d'une élection uninominale à un tour. Ils disent qu'on ne peut pas faire l'indépendance sans avoir l'appui d'au moins 50% de la population. En tout cas pas dans ce pays où le clivage souverainiste/fédéraliste est trop approximatif. Bref, on craint le chaos. Qu'en pensez-vous?

  • Archives de Vigile Répondre

    2 février 2008

    À l'intervenant Viateur Beaupré (et aux intéressés),
    le site Internet du Parti indépendantiste est :
    www.parti-independantiste.org.
    Plein d'infos s'y trouvent et le nécessaire pour adhérer.
    Avec mes salutations
    Richard Gervais
    Samedi, le 2 février 2008

  • Viateur Beaupré Répondre

    29 janvier 2008

    J'aimerais donc qu'on mette fin à tous les tataouinages et qu'on mette la locomotive de l'indépendance devant les wagons: éducation, environnement, santé, économie, etc. Au lieu de croire qu'avec des wagons bien aménagés on poussera la locomotive.
    Cela fait maintenant trente ans que l'on met les boeus devant la charrue. Il est plus que temps de changer la façon de labourer la terre pour ensemencer le pays.
    J'aimerais que vous me fassiez connaître votre nouveau parti, qui me semble être le parti de l'avenir, celui de notre avenir enfin libre.