Les accommodements: Libertés individuelles ou collectives?

Sans respect c'est le chaos

Tribune libre

« Au Québec, il est bien de respecter la liberté de chacun, mais il faut que cette liberté soit assortie de la liberté de l’ensemble. »

Trente années dans l’enseignement m’ont fait comprendre beaucoup de choses.

Une classe c’est une mini-société. Comme professeur, nous en sommes le Premier ministre. Nous devons imposer des règles sinon l’ambiance d’enseignement devient vite un chaos.
Je me souviens de mes premières années. J’avais 22 ans. Certains de mes étudiants de secondaire 5 avaient presque 18 ans. Des doubleurs évidemment. À l’époque ça se faisait encore.
Je hurlais mes consignes. « Reste assis! Non tu ne peux pas aller aux toilettes pour la troisième fois! Non tu n’ouvres pas la fenêtre, il fait -25 dehors! Replace cette table! Ne monte pas debout sur ton bureau! … etc., etc. Vous voyez le topo? Pas facile!
Comment enseigner dans un tel bordel? Poser la question c’est y répondre.
Puis j’ai appris.
Il y a un moment où l’étudiant doit comprendre qui est le chef d’orchestre dans le groupe. Mais il faut s’affirmer clairement, dès le premier cours! Et ensuite… Il faut que les règles soient appliquées, à la lettre, également pour tous.
Moi, mes règles se résumaient à peu de choses.
Respect!

Je leur expliquais que comme enseignant j’avais une tâche.
Ma tâche était de leur enseigner.
Pour ce faire il devait donc y avoir des règles entre nous.
Tu ne respectes pas le groupe quand :
- Tu te lèves à tout moment pendant que j’explique.
- Tu parles en même temps que moi ou un autre étudiant.
- Tu décides d’ouvrir ou de fermer une fenêtre sans approbation.
- Tu importunes un autre étudiant.

Avec ces 4 règles de respect simples, nous pouvions commencer l’année.

Comme je le disais plus haut, un groupe académique est une mini-société.

Un voisin qui met sa musique à tue-tête près de chez vous ne vous respecte pas. Celui qui jette ses déchets ou envoie sa neige dans votre entrée ne vous respecte pas. S’il permet à son chien de japper jour et nuit, il ne vous respecte pas.
Nous devons, pour vivre en société instaurer des règles pour le «bien vivre ensemble».
Quand je regarde les débats houleux concernant les religions et tous ces accommodements que l’on doit faire comme société, je m’inquiète. Où sont les règles?
Sans règles, comme dans une classe, la société devient chaotique.
Tous ensemble, nous devons instaurer des règles.

Une tentative fut proposée par le gouvernement précédent avec la charte des valeurs. Pourrions-nous l’améliorer? Nettement! Mais nous devons trouver un terrain d’entente pour des règles.
Quand on affirme vouloir respecter la libre expression de chacun, on se prépare au chaos. Mes étudiants entraient dans ma classe en sachant très bien à quoi s’en tenir avec moi. Les règles étaient claires. Jamais personne ne s’est senti lésé car les règles étaient les mêmes pour tout le monde.
Ici au Québec, il est bien de respecter la liberté de chacun, mais il faut que cette liberté soit assortie de la liberté de l’ensemble.


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3 commentaires

  • Chrystian Lauzon Répondre

    31 octobre 2014

    Monsieur Blanchette,
    Votre propos est d’une logique et d’une cohérence exemplaires. Mais enseigner et faire de la politique diffèrent et la politique brouille les cartes. Et qui plus est, passer du savoir à la pratique n’est pas donné à tout le monde. Comme le disait un grand prof socio-politiquement engagé, Albert Jacquard*, la première chose que l’on enseigne, c’est soi, ce que l’on est. Et si l’on est intimidé de nature ou trop mou trop arrogant et sourd aux autres, la tolérance conduit à son contraire, contre soi-même et ses nobles valeurs ou simplement à la disparition des règles de base d’un agir social respectable et respectueux.
    Lors du débat sur la Charte, au lieu de distinguer nettement les règles comme vous l’avez fait face à vos étudiants, le gouvernement Marois-PQ a brouillé les cartes : Charte des valeurs québécoise ou Charte de la laïcité? Et cette confusion a déclenché le fouillis, devenu historique, dans les « classes »… sociales et politiques du Québec. Prétendre que le Québec pouvait avoir ses valeurs propres fut même traité de racisme face aux valeurs dites « universelles » par des opposants instruits, voire du niveau même d'un docteur en philosophie. Simultanément, le PQ, médias « aidant », passa pour partisan et biaiseur, voulant faire de la propagande indépendantiste sur le dos de la laïcité.
    Enfin, pour faire court, les auto-proclamés « inclusifs », eux et seulement eux le seraient (sic), sont sortis d’un boîte de « cracker Jack » pour compliquer le débat et diviser la population au point que dans ce regroupement, fédéralistes se sont ligués avec des indépendantistes. Personnellement, une figure importante, de nos « valeurs » d’indépendance nationale croyais-je, a perdu totalement mon estime et sa crédibilité à mes yeux : Richard Desjardins prêchant le fédéralo-multiculturalisme à La Presse contre le PQ. Résultat politique : un sous-produit de Québec Solidaire de plus vit le jour, amalgame de collectifs fédéralo-pseudo-indépendantistes à idéologies multiples contradictoires, allant du communisme et ses nuances pointues, jusqu’à l’anarchisme total et violent – comment se surprendre que le musulmanisme djihadiste, l’islamisme radical et violent s’y soit réfugié. En voilà du chaos, tel que vous le décrivez en mini-société.
    Si, mettant de côté ses apprentis-stratèges, le PQ-Marois avait fonctionné en collégialité avec l’alliance des partis politiques et avec l’intelligence de sa population, il aurait nettement distingué, et procéder dans l’ordre suivant :
    1- LOI SUR LA LAÏCITÉ
    Énoncer et débattre d’une loi sur la laïcité – il y avait consensus sur la laïcité de l’État au Québec, à ce moment-là. Les libéraux, en diluant à présent cela sous le terme « neutralité » (loi de la), ne se pose plus en « chef d’orchestre » comme vous dites, mais en roseau pouvant plier à tout vent selon qu’un groupe préfère tirer la couverture de tel côté plutôt qu’un autre, le gouvernement « s’accommodant » selon les circonstances atténuantes : encore de l’élastiquage légalo-judiciarisable à n’en plus finir. Si l’État ne donne pas SA couleur claire et nette (telle que les québécois le souhaitait alors), comme vous dans votre classe, la zone grise dite « neutre » prévalant, le jeu des dominations se poursuivra pour faire avancer sa cause réductiviste à soi, tel un musulmanisme radical et guerrier dans l’état actuel d’inertie libérale. Mais je crains, qu’avec la manipulation libérale et médiatique (2 classes sous contrôle fédéraliste) et la terreur grandissante laissée à elle-même, la population n’ait plus une vision aussi nette de la laïcité : l’État-professeur est incompétent puisqu'il enseigne du plus flou et partisan encore que le MaroisPQ;
    2- CHARTE DES VALEURS QUÉBÉCOISES
    Amener l’idée d’une Charte des valeurs québécoises, en complément d’une laïcisation de l’État et des espaces publics, aurait été une excellence idée à débattre collectivement, avec les citoyens et regroupements divers, mais en ouvrant une fenêtre sur le monde : en quoi face à ce qui se passe ailleurs, nos valeurs peuvent exprimer des différences propres de développement national, humain et socio-économique; le débat aurait pris ainsi une ampleur où langue et culture s’intégraient parfaitement à l’intérieur de préoccupations et de cris d’alerte d’organisations et d’institutions internationales. L'appui internaltional aurait été appelé et confirmé en écho.
    3- COLLOQUE DES DIVERSES ÉGLISES ET RELIGIONS AU QUÉBEC
    Avoir privilégié en prétendant traiter de laïcité, le christianisme/catholicisme comme valeur religieuse première du Québec, dans une Charte devenant fourre-tout, voilà l’erreur qui fut fatale, si évidente de grossièreté qu’aucun stratège digne de ce nom n’y aurait miné sa crédibilité. C’est cette contradiction flagrante qui entraîna un dérapage de premier niveau : le crucifix à l’Assemblée nationale devait-il y rester? et la prière du minimaire là-là-Tremblay de Saguenay était-elle, sinon légale, du moins patrimoinesquement justifiée. Quelle contradiction insurmontable et idiote en soi politiquement (plus nul que cela stratégiquement, un parti meurt! et la moribondité du PQ est un propos qui se poursuit et que les médias n’arrêtent pas de se relayer) : prétendre élaborer sur la laïcité de l’État une loi et s’en rendre inapte en survalorisant une religion auto-centristement, c’était se tirer dans le pied et en plein centre!!! Le clou de notre masochisme politico-judaïque traditionnel qui n’en finit pas de nous faire agoniser comme nation pleine et entière. Réélire des reconnus mafieux par une commission d'enquête en est un autre exemple!
    Sur le plan religieux, il aurait été pertinent, et ce l’est encore plus de par les faits récents (criants et tragiques), de proposer un colloque des différentes Églises et appartenances religieuses au Québec, afin justement, de clarifier le rôle pacifiste et d’élévation (non de rabaissement) pour l’humain, de toute démarche spirituelle et selon des normes détachées de toute visée politique ou de contrôle des masses. Des règles sociales, civiles et politiques en ressortiraient pour éteindre tous les feux potentiels du fanatisme religieux.
    D’ailleurs, il est notoire que les principales instances religieuses actuellement ne se présentent pas du tout au parloir de la place publique, bien au contraire, pour inviter toutes les religions et leurs chefs administratifs supérieurs respectifs à se rassembler en un tout unifié par l’Amour, à la base de toute religion qui vise le rapprochement de l’humain au divin pour son salut et le bien de l’humanité entière… vivante, par que morte! Les religions savent-elles passer à l’action de la pacification du monde, mettre en pratique le RESPECT plutôt qu’uniquement l’enseigner? Le savoir qui ne sert pas est un savoir inutile! Tout comme quelqu'un qui ne travaille pas, doit se travailler!
    Le RESPECT dont vous parlez, M. Blanchette, n’est-il pas une valeur par excellence à solliciter au Québec, et ce, dans le cadre organisé du maintien et de la promotion de la paix sociale par toutes les associations religieuses réunies en une force de conviction globale?
    Qu’en pensez-vous, « neutralité » ou « chef d’orchestre » pour conduire l’État à des règles claires et incontournables d'harmonisation culturelle et de développement social? Vous poser la question, revient à se demander si vous êtes un excellent pédagogue ou si je n'ai rien compris.
    Chrystian Lauzon

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    *voir son livre « J’accuse l’économie triomphante », dont le résumé suivant définit bien la "classe" indisciplinée et chaotique des libéraux et fédéralistes : « Il n’y a plus de jour où l’on ne nous affirme que l’économie gouverne le monde, que les lois de la rentabilité et du marché constituent une vérité absolue. Quiconque conteste cette nouvelle religion est aussitôt traité d’irres-ponsable.
    Mais une société humaine peut-elle vivre sans autre valeur que la valeur marchande ? Prenant ses exemples dans les domaines les plus variés – logement, emploi, santé, environnement, alimentation… –, Albert Jacquard démontre les méfaits de l’économisme triomphant et fanatique qui prétend aujourd’hui nous gouverner. Economiste et scientifique, inlassable défenseur du droit au logement, il expose ici en des pages rigoureuses et claires, appuyées sur une vaste information, les convictions qui fondent son engagement. Il nous invite à refuser la fatalité inhumaine de l’intégrisme économique. »

  • François A. Lachapelle Répondre

    31 octobre 2014

    En société comme dans une classe, sans le respect mutuel, c'est le chaos.
    Je me permets de compléter votre éloquente démonstration à titre d'enseignant dans une école secondaire du Québec par un synonyme de respect, soit la notion "d'esprit fraternel". La vie est impossible sur terre sans "esprit fraternel" et sans respect.
    C'est d'ailleurs le contenu du Premier article de la Déclaration universelle des droits de l'homme de Paris 1948 je cite: " Article premier: Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité."
    Malheureusement, le Québec est une proie facile parce que lors des élections, il donne le pouvoir à des personnages qui sont à la solde des ennemis du Québec. C'est comme si "mon vote" pouvait être bradé en échange de n'importe quelle promesse sans obligation de résultats. Nous avons ici le côté irresponsable, adolescent des Québécoises et des Québécois.
    Autrefois, c'est la sirène Solange Chaput-Rolland qui trônait avec son cri du coeur: "je ne veux pas qu'on m'enlève mes rocheuses !" Là n'était pas la question mais l'écho des rocheuses retentissait jusqu'au Québec.
    Aujourd'hui, c'est Philippe Couillard qui promet qu'il déposera son projet de loi sur la Charte de la laïcité du Québec. Cette Charte est importante parce qu'elle dissiperait plusieurs ambiguïtés dont celle des valeurs du multiculturalisme, art. 27 de la Charte de Trudeau-1982. Ces valeurs prévalent au Québec et sont promues par les professionnels de l'immigration qui font leur pain et leur beurre avec les immigrants. Ils sont de précieux agents du fédéral au Québec.
    Le multiculturalisme est synonyme de communautarisme ce qui est à l'opposé d'une intégration volontaire de tout immigrant à la culture minoritaire, en demi-ton et errante du Québec. Le caractère unique du Québec dans le monde disparaît plus rapidement qu'on le pense parce que des "prédateurs de bonne foi" s'invitent à notre table et bouffent tout sans qu'on s'y oppose.
    Les principaux prédateurs sont les fédéralistes à la Trudeau de 1982 avec le Gouvernement des juges ainsi que la majorité ( 95% ) des immigrants qui savent où se trouvent les gagnants et les perdants.
    Affirmer notre différence de Québécois en français à Montréal est un problème: notre chaloupe est percée de partout. Le dossier des accommodements en majorité pour des motifs religieux ne sont pas réglés sur la place publique. Ils sont gérés à la pièce par des gestionnaires qui ne veulent pas de problèmes. Vous rajoutez à cela le Common Law qui affectionne le cas-le-cas, cheval de Troie qui ouvre la porte à tous les autres cas qui s'engouffrent dans la jurisprudence.
    Pensez-vous que le fédéraliste Philippe Couillard, ex surveillant du SCRS, désire faire la lumière à l'aide d'une future Charte de la laïcité du Québec ? Comment le faire bouger dans le sens de la défense et la promotion des intérêts majeurs du Québec ? Avec son expérience de la Chine, il ne voudra plus jamais entendre parler "du porc du Québec"... ni du reste.

  • Yvon Lagacé Répondre

    31 octobre 2014

    Très bon sujet, et le respect commence par se respecter soi-même, ce que ne fait pas le Peuple Québécois.
    Mais comment amorcer un dialogue sensé lorsque chaque fois qu'on apporte un argument de protection du Peuple Québécois, on est systématiquement taxé de racisme, xénophobie etc...
    Le multiculturalisme est insensé, il y a trop de cultures différentes, trop différentes pour le vivre ensemble. On peut être de très bon voisins, cela ne veut pas dire que l'on vivraient ensemble. Il faut accepter ce fait.
    La Charte Trudeau ne protège pas du tout notre Peuple, elle ne protège que les étrangers.
    Pour imager un peu, un ami m'offrais hier un exemple de cela. Un blanc va dans un bar où la majorité de la clientèle est noir, et se fait sortir. On trouvera une raison du genre "il troublait la paix de l'établissement", ou n'importe quelle raison, mais cela ne sera jamais du racisme.
    Un noir qui se fait sortir d'un bar de blanc, on ne cherchera aucune autre raison que le racisme. Et j'aurais pu prendre n'importe quel groupe de la société, cela aurais donné le même résultat.
    Trop de gens vivent également dans notre société sans s'intégrer, ne laissant pas leurs enfants jouer avec ceux qui sont différents, et ce n'est pas que les islamistes intégristes, d'autres religions ou groupes font la même chose.
    Ça prend des règles pour le vivre ensemble, ça prend du respect, mais ça prend aussi des gens qui se ressemblent, qui ont assez de points communs pour vivre avec leurs différences, c'est de la simple logique, du gros bon sens.
    Il faut se permettre d'être plus rigide dans nos règles de vie commune. C'est une question de survie d'un Peuple.