Une déclaration de François Legault dans le West Island a fait jaser, mais pas pour les bonnes raisons.
Que le chef de la Coalition avenir Québec déclare qu’il fermera à double tour la question de la souveraineté s’il est élu, c’est son droit le plus strict. Qu’il ait été le plus pressé des pressés il y a 15 ans ne lui enlève pas non plus la possibilité de changer d’idée. Le problème est ailleurs.
Le chef caquiste a aussi affirmé qu’il fallait éliminer pour de bon le projet d’indépendance du débat public. Qui est-il pour décider à l’avance des enjeux dont pourront discuter les générations futures ? Les propos de M. Legault soulèvent aussi la question de l’impuissance du nationalisme provincial.
Sur l’autonomisme
L’autonomisme, dont se réclame la CAQ, n’est pas une tradition nouvelle au Québec. À la veille de la Révolution tranquille, le Parti libéral du Québec lui-même embrassait une telle position, proposant de corriger les dysfonctionnements du système canadien. Puis, quelques années plus tard, Daniel Johnson formulait son slogan Égalité ou indépendance. Finalement, les autonomistes n’ont pas eu l’égalité, et ils ont craint l’indépendance.
Les tentatives de réforme du système canadien se sont toutes heurtées à des échecs. Les accords du lac Meech et de Charlottetown en ont été les exemples les plus probants. En fait, le seul qui y soit parvenu a été Pierre Eliott Trudeau, qui a rendu le Canada encore plus centralisé, et qui a donné aux tribunaux des moyens inusités pour démanteler les choix démocratiques du Québec.
De défaite en défaite, les autonomistes ont constamment abaissé leurs demandes à l’endroit d’Ottawa, comprenant qu’ils n’obtiendraient pas gain de cause, et ce, jusqu’à ce qu’ils ne demandent plus rien du tout.
Que fera François Legault ?
Le Canada est aujourd’hui tout simplement irréformable. Pourtant, la CAQ a, il y a quelques années, réalisé une petite opération marketing pour ressusciter l’autonomisme. François Legault dit vouloir rapatrier des juridictions d’Ottawa à travers un processus qui débuterait par le transfert des pouvoirs en matière d’immigration et langue, et qui se terminerait par la reconnaissance formelle de la nation québécoise par le Canada. Les membres de la CAQ ont aussi adopté une proposition demandant à Ottawa de ne plus nommer de lieutenant-gouverneur au Québec.
Maintenant qu’il a complètement exclu la possibilité d’envisager un jour la souveraineté, comment M. Legault estime-t-il pouvoir convaincre Ottawa d’obtempérer à ses demandes ? Que compte-t-il faire si on lui dit non ? Existe-t-il chez lui un seuil de l’inacceptable ?
La menace souverainiste a toujours été un des principaux arguments de vente des autonomistes dans le passé, le « couteau sous la gorge » d’Ottawa comme l’appelait Léon Dion. Une manière de dire « si vous ne nous donnez pas une partie de ce que nous demandons, nous saurons quoi faire ! »
Provenant du monde des affaires, François Legault ne devrait pourtant pas être étranger à l’art de la négociation...