Le souverainisme contre la résistance au changement

La solution pour le mouvement souverainiste? L'habilitation.

Tribune libre

Voici un petit texte que j'ai écrit pour le journal Le Devoir. Malheureusement, comme le texte est trop long (plus de 400 mots), il ne pourra être publié dans leurs pages. Ce texte reprend, dans l'ensemble, une bonne partie de mon dernier texte publié sur Vigile.
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Le souverainisme, malgré tous les problèmes du fédéralisme canadien, n'a que très rarement rallié une majorité de Québécois et semble éternellement figé à plus ou moins 40 % d'appuis. Sondage après sondage, nous constatons que la population québécoise souhaite du changement et se détache de l'identité canadienne. Pourtant, les Québécois craignent encore la souveraineté au point où de nombreux souverainistes croient préférable de ne pas promouvoir leur option afin d'accéder au pouvoir. Un concept de psychologie, la résistance au changement, permet de mieux comprendre cette crainte de l'indépendance et fournit aux souverainistes une piste de solutions pour faire progresser l'appui à la souveraineté.
Selon ce concept, tout changement est forcément accompagné d'une certaine résistance qui est en réalité une réaction défensive face à l'anxiété. La raison est simple : l'individu, avec l'expérience, se développe des habitudes, des routines et des connaissances qui le confortent et le rendent à l'aise dans son environnement. Un changement, dépendamment de sa nature et de son importance, remet en cause cet environnement et engendre une zone d'incertitude et d'inconnu qui crée l'anxiété, contraignant ainsi l'individu à résister. Les personnes âgées, étant plus habituées à leur zone de confort, sont généralement celles qui s'opposent le plus au changement, comme en témoigne le faible appui à la souveraineté dans cette tranche de la population.
Et, bien que la population affirme constamment souhaiter du changement, la réalité est qu'une levée de boucliers le suit presque inévitablement : la peur de l'inconnu, ou anxiété, est facilement exploitable par les groupes d'intérêts et les partis politiques. Voilà pourquoi les fédéralistes, afin de contrer le souverainisme, ont toujours misé sur la peur : partition du territoire québécois, perte des régimes de pension, désastre économique, etc. Plus un changement est important, plus il est facile pour les groupes d'intérêts d'effrayer la population et ainsi la rallier, par défaut, à leur cause.
À moins qu'une réforme n'engendre d'incertitude, seule la conviction que la situation actuelle est négative ou se dégrade peut mener un individu à appuyer le changement sans crainte. Pour la question nationale, il ne fait aucun doute que le déclin du français et du poids du Québec dans le Canada permettent de justifier un changement. C'est d'ailleurs avec les arguments identitaires que les souverainistes ont généralement réussi à convaincre puisque la relation causale avec la situation constitutionnelle est facilement démontrable, ce qui l'est moins pour les questions économiques.
La solution pour le mouvement souverainiste? L'habilitation. Préparer la population au changement en expliquant clairement ce qui se produira avant, pendant et après un référendum gagnant, en préparant des plans de contingences, en consultant la population, etc. Bref, faire en sorte que l'incertitude soit réduite à pratiquement zéro en informant la population et surtout en l'impliquant. Car, en ayant lui-même directement participé à la réforme, il est fort peu probable qu'un individu en craigne les effets!
Maxime Duchesne

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Maxime Duchesne25 articles

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Maxime Duchesne est présentement étudiant à HEC Montréal et travaille au Parlement du Canada comme employé contractuel.

Il est détenteur d'une maîtrise en Science politique de l’Université de Montréal depuis novembre 2012 et d'un baccalauréat en Science politique de la même université depuis 2010.

Ses études l’ont mené à passer un trimestre en Chine et à effectuer un stage au Parlement du Canada pour le compte d’un député fédéral. Cette dernière expérience lui a permis d’obtenir un emploi comme adjoint parlementaire contractuel.

Il a également été membre des Forces canadiennes durant plus de six ans. Ses études universitaires se sont centrées autour de la politique québécoise, le nationalisme, la gouvernance et les affaires publiques.

Il détient également un DEC du Collège de Maisonneuve en Informatique de gestion.





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7 commentaires

  • Maxime Duchesne Répondre

    12 mars 2012

    Bonjour.
    Merci pour vos commentaires. Monsieur Savoie, effectivement, il y a une hiérarchie des besoins qui diffère d'un individu à l'autre. Certains mettent la religion avant tout, d'autres l'argent, d'autres leur appartenance à un groupe, etc. Les besoins primaires l'emportent généralement sur tous les autres besoins. Je ne voulais pas dire que l'économie n'influence pas les souverainistes eux-mêmes, mais je crois que nous sommes convaincus qu'un Québec souverain serait viable économiquement mais que notre culture et notre identité ne pourra survivre dans le Canada. La situation de l'identité québécoise dans le Canada justifie l'indépendance alors que l'économie vient supporter (ou, selon les fédéralistes, discréditer) la validité du projet.

  • Archives de Vigile Répondre

    11 mars 2012

    Vous avez parfaitement raison d’expliquer la résistance au changement sous l’angle psychologique. C’est une donnée essentielle. On peut aussi définir ou décrire le comportement collectif sous l’angle stratégique de l’intérêt commun et individuel en posant la question suivante. Qu’elle est le rapport coût/bénéfice de l’indépendance pour moi, ma famille et mon entourage immédiat ? Dans ce contexte, je ne suis pas certain que les questions identitaires l’emportent sur les questions de pains et de beurre. Il existe une hiérarchie dans les besoins humains, un peu comme dans la pyramide de Maslow.
    C’est pour cette raison qu'O.N. parle toujours et constamment des avantages (ils sont nombreux) que l’indépendance apportera à chaque citoyen. Comme dit Jean-Martin Aussant "L’indépendance du Québec aura un impacte favorable immédiat et direct sur les vrais affaires". En parallèle, nous nous équipons pour ridiculiser les arguments fédéralistes de manière à neutraliser les effets de stresse induits par des campagnes de peur. Notre plateforme tente aussi d’expliquer la démarche d'accession à l'indépendance et d'en décrire les conséquences.
    Ce n’est pas en refusant de parler d’indépendance comme le fait bêtement le PQ que la cause avancera dans l’esprit des québécois. Depuis 1995 le PQ a probablement fait CONSIDÉRABLEMENT plus de tord à la cause que les fédéralistes eux-mêmes. Dans mon esprit à moi, le PQ est sans doute devenu le plus grand regroupement de colonisé(es) que le Québec n’a jamais eu. Un regroupement de pleutres qui carburent à la peur de faire peur. Des individus traumatisés par la défaite et qui demeurent encore tapis dans l'indifférence, la résistance et la résignation.

  • Marcel Haché Répondre

    11 mars 2012

    Un parti politique obtient d’abord la confiance de l’électorat et devient le parti du gouvernement. C’est ensuite que le gouvernement peut obtenir—rien n’est assuré-- que le peuple se mette en mode écoute.
    Ce qui n’a pas réussi, ce qui ne réussit pas et n’est pas prêt de réussir, c’est qu’un parti souverainiste se gagne une adhésion à sa thèse à partir d’une position d’opposition. Le Pouvoir est un incontournable pour que l’électorat se mette en mode écoute. Et encore, encore faut-il qu’un gouvernement souverainiste s’adresse ici au bon peuple, et non que pas à ce peuple inventé par les fédéralistes et nos honteux, les couchés-carpettes devant le multiculturalisme.
    La poussée de l’A.D.Q. avec Dumont—à mille lieux des rêves les plus fous de Q.S.-- devrait faire réfléchir ceux qui s’appliquent depuis 40 ans à convaincre un peuple « civique » québécois qui n’existe pas.
    Le Pouvoir est un incontournable, et Nous itou. Il n’y a pas d’exclusive là-dedans, ni xénophobie ni rien. Il y a juste un élan qui est pris par les premiers concernés et les seuls qui peuvent engager le mouvement. Les « Autres » suivraient NOTRE détermination.
    Qu’auraient-ils d’ailleurs à suivre si Nous-mêmes continuions de Nous traîner les pieds et la langue à terre, ce que Nous faisons parfaitement bien depuis 1995 ?
    Ce que vous proposez Maxime Duchesne, c’est ce que le gouvernement élu de 1960 a réussi en 1962 au Québec. Ce fut le début consenti à la Révolution Tranquille.

  • Archives de Vigile Répondre

    11 mars 2012

    Message à "journal de personne"
    Vous avez oublié la vraie démocratie par tirage au sort. Vous sortirez de ce livre complètement transformé.
    Yves SINTOMER, Petite histoire de l'expérimentation démocratique, Tirage au sort et politique d'Athènes à nos jours, La Découverte\Poche,Paris 2011, 291 pages.
    Pierre Cloutier

  • Archives de Vigile Répondre

    11 mars 2012

    @ Pierre Cloutier
    Dire que votre commentaire serait la plus belle proposition qu'on doive mettre de l'avant : à la fois juste, motivante, réalisable et efficace... si n'était vos deux derniers paragraphes ainsi que la fin du précédent.
    Et puis ce serait positif alors que là ça se perd dans un ronronnement agaçant qui finit par lui faire perdre toute son efficacité !

  • Archives de Vigile Répondre

    11 mars 2012

    La première chose à faire est de mettre le mot "souveraineté" à la retraite pour le remplacer par le mot "indépendance" beaucoup plus clair, franc et honnête.
    Idem avec le mot "référendum" qu'on peut remplacer par le mot "consultation populaire décisionnelle" et non pas uniquement consultative, comme maintenant.
    La 2e chose à faire est de préparer et déposer lors de l'élection une proposition concrète et emballante d'indépendance sous la forme d'un projet de loi transitoire sur la nation québécoise et de mettre sur pied une constituante citoyenne afin de rédiger une constitution d'un Québec indépendant.
    Autrement dit, c'est de proposer un changement de STATUT de la province de Québec à un état indépendant ICI ET MAINTENANT au lieu de fuckailler avec le puck provincial comme le PQà marde s'apprête à le faire
    Mais évidemment, ce n'est pas cela qui va se passer et on va se retrouver dans 10 ans au même point.
    Mais moi j'ai des chances d'être mort, mon frère. Merci Pauline.
    Pierre Cloutier

  • Le journal de Personne Répondre

    11 mars 2012

    Mère : tu ne m'as toujours pas dit comment tu vas appeler ton pays ?
    Enfant : le pays des affranchis... le franc pays... le voici !
    Mère : c'est joli. Et tu voudrais y faire régner une liberté absolue ?
    Enfant : oui, une liberté illimitée
    Mère : mais tu le sais sans limites... il n'y a pas de liberté
    Enfant : c'est un mensonge éhonté
    Mère : entre la monarchie, l'oligarchie et la démocratie, pour quel type de gouvernement tu as opté ?
    Enfant : je vais te surprendre : j'ai opté pour la monarchie
    Mère : tu voudrais retirer le pouvoir au peuple, pour le mettre entre les mains d'un seul
    Enfant : seul un monarque un vrai, pourrait rendre le pouvoir au peuple
    Mère : mais pourquoi le reprendre pour le rendre ?
    Enfant : parce qu'avec la démocratie, le peuple n'a jamais rien pu
    Mère : et pourtant, on dit que c'est le régime le moins pire pour gouverner la cité
    Enfant : c'est ce qu'on dit, mais ce n'est pas la vérité!
    Mère : si tu remets le pouvoir entre les mains d'un seul, ce sera de nouveau, l'absolutisme, l'obscurantisme, la tyrannie
    Enfant : pas entre les mains de n'importe qui
    Mère : le pouvoir corrompt st rend fou même le plus sage d'entre nous
    Enfant : ça vaut mieux que l'opinion d'une majorité artificielle
    Mère : qu'est-ce que tu fais du suffrage universel ?
    Enfant : il n'a jamais été universel! Ce sont toujours des forces particulières qui l'emportent
    Mère : oui mais à la suite d'un vote
    Enfant : quel vote ? C'est une question de côte, comme pour le tiercé
    Mère : et ton monarque ? Il règnera en vertu de quel décret ? Qu'est-ce qui va lui donner une légitimité ? Le sang franc qui coule dans ses veines ?
    Enfant : je pense à son haut niveau de conscience
    Mère : ça y est... tu es élitiste... tu crois au mythe du plus intelligent ?
    Enfant : pas le plus intelligent mais le plus digne de Foi
    Mère : mais même le plus sage n'est pas à l'abri du pire dérapage
    Enfant : le philosophe roi, tu vois ce que c'est ?
    Mère : c'est une légende platonicienne
    Enfant : celui qui aime la sagesse n'a que faire de sa légende personnelle
    Mère : ton optimisme a été démenti par l'Histoire
    Enfant : Au plus sage on n'a jamais remis le pouvoir
    Mère : et comment vas-tu choisir le plus sage? Tu ne vas pas organiser un concours ?
    Enfant : un comité de sages s'en chargera
    Mère : ce sera un gouvernement aristocratique qui verra toujours des sots se faire passer pour les meilleurs
    Enfant : on choisit bien les plus belles architectures... pourquoi ne pas choisir parmi les plus belles envergures ?
    Mère : parce que ce sont toujours des abrutis qui votent
    Enfant : parce qu'il n'y a que des abrutis qui se présentent
    Mère : cite-moi un seul sage parmi les philosophes ?
    Enfant : Platon... même mort il pourra encore gouverner un pays comme la Grèce
    Mère : tu es idéaliste mon petit et c'est triste
    Enfant : Les matérialistes sont en train de rendre l'âme
    Mère : il faut être réaliste
    Enfant : Alors soyons royalistes et exigeons l'Impossible !
    http://www.lejournaldepersonne.com/2012/03/le-franc-pays/