Le Québec en récession

Le Québec et la crise


Le mot est lâché. Les États-Unis seraient officiellement en récession depuis un an maintenant. Ici, la banque centrale estime que le Canada s'y engage présentement. Pour sa part, le Québec ne pourra, finalement, que difficilement y échapper. Quant à son ampleur et à sa durée probables... Petit retour sur les sévères récessions de 1980-82 et de 1990-92.
Selon la définition élargie du National Bureau of Economic Research, l'activité économique est en recul aux États-Unis depuis son sommet atteint il y a un an. Selon la définition classique du deux trimestres (ou plus) de croissance négative du PIB, la récession aurait débuté au sud de la frontière au troisième trimestre. On présume, cela va de soi, que le quatrième trimestre sera négatif pour tout le monde. C'est ce qui a fait dire, d'ailleurs, au gouverneur de la Banque du Canada que l'économie canadienne est officiellement entrée en récession. Cela signifie que la décroissance sera également au rendez-vous au premier trimestre de 2009. On s'en doute, le Québec ne pourra l'éviter, ébranlé qu'il est par son secteur extérieur. Une fois cela dit, il reste à déterminer l'ampleur et la durée de la contraction.
La douleur de la récession québécoise sera fonction de la capacité de récupération de ses partenaires commerciaux, États-Unis en tête. Un sombre scénario, inspiré des crises passées, retient qu'une récession suivant une crise bancaire est généralement plus longue, 23 mois contre neuf en moyenne, et, plus grave, avec un recul moyen du PIB de 1,5 % contre 0,9 % en moyenne. Cette référence situe la reprise américaine quelque part au début de 2010. Un scénario moins pessimiste mais retenant tout de même un sérieux recul de l'activité économique évalue la durée de vie de l'actuelle récession américaine entre 12 et 15 mois, ce qui ramène la reprise attendue au deuxième trimestre de 2009.
En retenant cette dernière cible, les économistes du Mouvement Desjardins concluent que la récession québécoise, qualifiée de probable, sera plus technique que classique. Elle sera donc légère. Rien à voir avec ce que le Québec a vécu en 1980-82 et en 1990-92.
En 28 ans, le Québec a connu deux récessions dites classiques et trois récessions techniques, qui sont généralement peu ou pas ressenties. En ce qui concerne les classiques, celle de 1980-82, particulièrement douloureuse avec son inflation galopante, ses taux d'intérêt touchant les 17-20 % dans l'univers des hypothèques et son taux de chômage touchant un sommet à 15,8 %, a persisté pendant 15 mois. Elle a été suivie d'une réaccélération rapide. L'autre, celle de 1990-92, avec un taux de chômage touchant une pointe à 14,2 %, avait été précédée par une correction du marché immobilier et une crise bancaire aux États-Unis. Elle a été moins prononcée, mais la reprise a tardé à se manifester, les premiers signes de relance n'ayant apparu qu'après deux ans.
Dans leur étude, les économistes de Desjardins s'en remettent aux consommateurs, sur qui repose 60 % du PIB québécois. Même s'il y a chute prononcée de confiance, provoquée par l'effondrement des cours boursiers, l'emploi tient le coup au Québec dans un marché du travail fragile, qui devrait voir le taux de chômage québécois atteindre 8,5 % d'ici la mi-2009 (contre 7,1 % présentement). Aussi, la chute des prix de l'essence vient appliquer un certain baume sur le budget des ménages. S'ajoute l'effet des baisses de taxes et d'impôt. De plus, les taux d'intérêt sont faibles et l'immobilier résiste, même si un recul des prix - devant être plus fort dans le segment des propriétés plus dispendieuses - apparaît dans les cartes.
Côté investissements, la rareté des projets des entreprises, devenus moins abondants en raison d'un marché du crédit frileux, sera atténuée par ceux, massifs, des gouvernements en infrastructures et d'Hydro-Québec. Le Québec s'appuie également sur une structure industrielle diversifiée et peut espérer bénéficier du recul du dollar canadien, quoique les régions doivent composer avec un fort recul du prix des matières premières.
Reste le secteur extérieur et ses exportations problématiques, très largement influencé par l'état de santé de l'économie américaine, qui demeure un frein à la croissance globale.
Le diagnostic de Desjardins: «la période de contraction s'apparentera plutôt à une récession technique, soit deux trimestres consécutifs de faible contraction du PIB réel (moins de 1 %). La situation n'aura donc rien à voir avec les véritables récessions observées au début des années 1980 et 1990».
Et que disait Desjardins auparavant?
- Risque de récession technique très élevé (27 novembre).
- Dernier sursaut de l'économie du Québec avant que les effets de la crise financière ne se fassent pleinement sentir (30 octobre, en commentant la hausse de 0,5 % du PIB en juillet).
- Les risques de récession ne peuvent pas être écartés (26 septembre, après une hausse de 0,9 % du PIB au deuxième trimestre).
- L'économie du Québec évitera de justesse la récession (27 août).
- Le Québec s'approche d'une récession (27 juin).
- Le ralentissement économique n'est toutefois pas derrière nous (24 avril).
On ne peut reprocher à ces analystes de manquer de suite dans leurs idées.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->