GAZ NATUREL

Le Québec a besoin d’Énergie Est

La Régie de l’énergie précise que le gaz de schiste québécois ne pourrait pas suffire à remplacer les ressources extérieures

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Une décision qui déçoit de part et d'autre

Le Québec devra absolument se tourner vers l’extérieur, et non vers ses propres ressources, pour combler ses besoins en gaz naturel à long terme, tranche la Régie de l’énergie dans un avis rendu public mercredi. Pour assurer l’approvisionnement de la province, le projet Énergie Est de TransCanada est « souhaitable », indique l’organisme, à condition que les consommateurs de gaz n’assument pas les coûts et les risques qui relèvent de l’industrie pétrolière.

Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Arcand, a dévoilé mercredi un avis remis le 19 décembre dernier dans lequel la Régie évalue les besoins du Québec en gaz naturel au cours des 15 prochaines années et se prononce sur les options d’approvisionnement à privilégier.

« D’ici 2030, la demande en gaz naturel au Québec augmentera d’environ 2 % par année. La seule option d’approvisionnement fiable consiste à acheter du gaz naturel à l’extérieur du territoire et à l’acheminer au Québec par le réseau principal de [TransCanada] », écrit l’organisme.

La Régie juge que le projet Énergie Est « aura peu d’impacts » sur le prix du gaz naturel pour les consommateurs québécois. Gaz Métro fait pourtant valoir depuis des mois qu’en convertissant en oléoduc la portion ontarienne de son gazoduc, entre North Bay et Ottawa, TransCanada ferait grimper le prix du gaz naturel et fragiliserait l’approvisionnement. Pour pallier ce problème, TransCanada prévoit la construction d’un nouveau gazoduc (Eastern Mainline) parallèle à celui qui sera converti, mais dont la capacité de transport serait moins grande.

« Le projet Énergie Est est souhaitable dans la mesure où il consiste à convertir à un autre usage des actifs de transport de gaz naturel actuellement sous-utilisés. La Régie estime qu’une telle conversion pourrait contribuer à limiter la hausse des tarifs de transport de gaz naturel », écrivent les régisseurs.

En revanche, la Régie demande à TransCanada de revoir son projet pour éviter de refiler indûment la facture aux consommateurs de gaz. « Le volet gazier de ce projet introduit des coûts et des risques que les expéditeurs de gaz naturel n’ont pas à supporter actuellement », précise-t-elle.

« Nous nous réjouissons que la Régie de l’énergie partage la plupart de nos inquiétudes quant au projet Énergie Est et à l’impact pour la clientèle gazière du Québec », a réagi par voie de communiqué la vice-présidente de Gaz Métro, Stéphanie Trudeau. Le directeur principal d’Équiterre, Steven Guilbeault, s’est lui aussi dit heureux de voir la Régie exiger des changements au projet Énergie Est.

Le ministre Arcand a pour sa part invité Gaz Métro et TransCanada à « s’entendre pour répondre aux besoins des consommateurs de gaz naturel ».

TransCanada a déposé sa demande d’approbation du projet auprès de l’Office national de l’énergie le 30 octobre dernier. Les audiences publiques devraient débuter cette année.

Nouvelle gifle

L’avis de la Régie de l’énergie porte un autre coup dur à la filière du gaz de schiste québécois. Sans se prononcer explicitement sur le besoin d’exploiter le gaz de schiste du Québec ou le gaz naturel de l’île d’Anticosti et de la Gaspésie, l’organisme considère que ces ressources « ne peuvent être considérées comme des options d’approvisionnement fiables à l’horizon 2030, en raison notamment des enjeux relatifs à la rentabilité économique, à l’environnement et à l’acceptabilité sociale ».

Elle calcule que, si tous les projets annoncés à ce jour devaient se concrétiser, la production de gaz naturel québécois représenterait moins de 1,5 % des besoins de la province en 2030. « Cette option ne peut donc assurer la fiabilité des approvisionnements du Québec », souligne la Régie. Seul un approvisionnement provenant de l’extérieur du Québec constitue donc une « source fiable » pour répondre aux besoins de la province en gaz naturel, ajoute-t-elle.

En décembre dernier, le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement a quant à lui conclu que le développement de l’industrie du gaz de schiste au Québec serait non rentable, risqué pour l’environnement, et que l’acceptabilité sociale est « loin d’être acquise ».

Le premier ministre Philippe Couillard a également créé la surprise en reprenant ces arguments à son compte lors d’une entrevue accordée le mois dernier à Radio-Canada. « Je crois de toute façon qu’il n’y a pas grand intérêt à développer cette ressource, uniquement sur le plan économique et financier », a-t-il déclaré. Il s’est cependant dit contre l’imposition d’un moratoire.

Malgré ce tir croisé, l’Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ) a indiqué mardi qu’il est « économiquement possible et souhaitable » d’exploiter le gaz naturel qui se situe « sous nos pieds ». « C’est bien beau d’aller chercher le gaz naturel ailleurs, mais il serait plus logique et rentable d’en produire au moins une partie ici », fait valoir le président de l’APGQ, Michael Binnion.

L’association estime que la production locale de gaz naturel permettrait d’atténuer la faiblesse stratégique du Québec dans la chaîne d’approvisionnement et aurait même « un impact positif sur l’environnement ».


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