Le PLC, une «famille dysfonctionnelle»

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Hugo de Grandpré - Dans un geste sans précédent depuis l'arrivée de Stéphane Dion comme chef, un membre influent de l'aile québécoise du Parti libéral du Canada a levé le voile sur les graves problèmes qui minent l'organisation du parti dans la province.


Dans une entrevue exclusive accordée à La Presse, hier, l'un des vice-présidents les plus actifs du PLCQ, Steve Pinkus, a décrit le parti comme une «famille dysfonctionnelle» et appelé Stéphane Dion à intervenir de toute urgence.
Selon M. Pinkus, qui s'implique chez les libéraux depuis plus de 30 ans, le président du PLCQ, Robert Fragrasso, et la lieutenante du Québec, Céline Hervieux-Payette, sont engagés dans une guerre ouverte qui paralyse tout effort d'organisation.
Résultat: le parti se dirige tout droit vers la catastrophe, croit l'homme d'affaires. «On n'avance pas. Au contraire, on recule. Depuis un an, on recule», a-t-il lancé durant un long entretien téléphonique, hier après-midi.
«M. Dion doit brasser les choses, a poursuivi M. Pinkus. Ce n'est pas son lieutenant qui est en train de le faire. Ce n'est pas son président qui est en train de le faire. Ils sont en guerre civile entre eux.»
«M. Dion a un choix, a conclu le militant. Ou on reste tel quel, et alors là, on va manger une claque au Québec comme jamais. Il va manger la claque que tout le monde a prévue. Ou il fait quelque chose...»
«En fait: il n'a pas le choix!»
Moins de candidats
Steve Pinkus, un des deux vice-présidents anglophones du Parti libéral du Québec, a confié à La Presse que le PLC avait aujourd'hui moins de candidats qu'il y a un an dans la province, ajoutant qu'il avait perdu plusieurs candidatures de «grande qualité».
De même, le parti n'a aucun plan pour rétablir la quarantaine d'associations de circonscriptions qui n'existent tout simplement plus, a-t-il dit. Enfin, le PLCQ n'a pas de plan de financement populaire capable de rivaliser avec celui des conservateurs.
À qui la faute? «Ce n'est pas entièrement celle de Robert Fragrasso», a précisé M. Pinkus.
Jeudi, une fronde organisée par deux membres du parti a failli mener au départ du président. On lui reprochait de ne pas être assez actif pour préparer d'éventuelles élections. La réunion s'est soldée par une démonstration d'appui à M. Fragrasso.
Mais pour Steve Pinkus, cette solution ne résoudra rien du tout. «Nous faisons face à des problèmes majeurs, à des défis majeurs, a-t-il dit. Et la résolution du problème, hier, a été ridicule. Ils n'ont fait que mettre un pansement sur une plaie béante et purulente.»
M. Pinkus blâme directement le bureau du chef, Stéphane Dion, pour son hésitation et son immobilisme dans le dossier du recrutement, qu'il juge primordial.
«Le malaise sur le plan des candidatures au parti existe depuis plus d'un an, a expliqué Steve Pinkus. Peu importe le candidat ou la candidate, une personne qui aurait toutes les qualités que l'on chercherait, qui serait là... Ils pensent toujours qu'ils vont aller en chercher un meilleur.»
Selon lui, l'exemple de Lasalle-Émard est éloquent. Desiree McGraw, une environnementaliste de Montréal et diplômée de la prestigieuse London School of Economics, a récemment reçu le feu vert de Paul Martin, condition sine qua non pour tout candidat qui souhaite reprendre le fief occupé par l'ancien chef depuis 1988.
Or, a raconté M. Pinkus, la jeune femme était à la fois courtisée par deux fondations et une multinationale de haut niveau. Comme la réponse du bureau du chef tardait à venir, elle a rappelé la sénatrice Céline Hervieux-Payette. Une adjointe lui a répondu qu'elle aurait une réponse dans trois semaines.
«Elle n'a pas eu d'autre choix que d'envoyer un courriel à la sénatrice, pour lui dire d'enlever son nom de la liste. Et elle n'a même pas reçu d'accusé de réception», a déploré M. Pinkus.
M. Pinkus, qui a appuyé Michael Ignatieff dans la dernière course au leadership libéral, se défend de vouloir déstabiliser le chef pour avantager celui qui a été son favori du congrès de décembre 2006.
«Je n'essaie pas de torpiller Stéphane Dion, a-t-il précisé. J'essaie de brasser le parti et que quelqu'un fasse preuve de leadership, qu'il remette de l'ordre dans la shop et qu'il nous remette sur les rails.»
Le cri du coeur d'un libéral de longue date qui espère sauver ce qu'il reste de l'ancien «parti gouvernemental naturel» au Québec
«Quelqu'un au bureau du chef m'a dit récemment qu'on n'aurait peut-être même pas nos 75 candidats ici pour les prochaines élections Ça fait 36 ans que je milite dans le parti. Je n'ai jamais de ma vie vu une situation où on n'a pas 75 candidats au Québec», s'est-il désolé.
«Je n'ai rien à perdre», a conclu celui qui en est à son dernier mandat de vice-président.
Qui est Steve Pinkus?Actif chez les libéraux depuis 36 ans, Steve Pinkus est l'un des actionnaires d'une société de télécommunications de Dorval, Voipra. Depuis 2003, il est aussi l'un des 10 vice-présidents du Parti libéral du Canada, section Québec, et l'un des deux vice-présidents dits «anglophones». Ce poste lui donne accès au Conseil de direction du PLCQ, où siègent 36 personnes. C'est là que, jeudi, une motion a été présentée pour demander la démission du président, Robert Fragrasso. Cette motion a été défaite, dans le but de montrer une image d'unité dans les rangs libéraux.
Les membres du conseil ont aussi élu M. Pinkus pour qu'il siège à son comité administratif. En principe, ce groupe formé de sept personnes doit se rencontrer au moins une fois par semaine, pour voir à la cuisine quotidienne. Le vice-président a toutefois confié qu'il ne s'était pas réuni une seule fois depuis Noël. C'est le deuxième et dernier mandat de Steve Pinkus en tant que vice-président anglophone du PLCQ, en vertu d'une nouvelle règle de la Constitution.


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