Selon Jean Lapierre

Le PLC ne peut pas donner "une nouvelle claque au Québec"

La nation québécoise vue par les fédéralistes québécois


par Bellavance, Joël-Denis
Ottawa - Après le rôle qu'il a joué dans l'échec de l'accord du lac Meech et le scandale des commandites, le Parti libéral ne peut se permettre de donner une "nouvelle claque au Québec" en rejetant la résolution qui reconnaît la nation québécoise, estime le député libéral Jean Lapierre.
Le député d'Outremont invite donc tous les candidats à la direction du PLC à éviter de "casser du sucre sur le Québec" en critiquant cette fameuse résolution qui sera débattue au congrès de Montréal, le mois prochain. C'est également durant ce congrès que le prochain chef du PLC sera élu.
M. Lapierre, qui avait quitté le PLC en 1990 après l'échec de Meech et l'élection de Jean Chrétien comme chef du parti pour ensuite fonder le Bloc québécois en compagnie de Lucien Bouchard, estime que cette question est désormais au coeur de la course au leadership. Selon lui, il appartient aux aspirants de s'assurer qu'il n'y ait pas de dérapage. "Il est clair que le débat déraille. Quand je me ferme les yeux, je vois passer devant moi le film sur la société distincte. C'est exactement le même genre de débat", a déclaré à La Presse hier Jean Lapierre.
Il y a deux semaines, l'aile québécoise a adopté une résolution qui reconnaît que le Québec forme une nation. Cette résolution propose aussi de créer un comité d'experts ayant comme mandat de recommander des moyens d'enchâsser cette reconnaissance dans la constitution.
Des huit candidats en lice, seul le député libéral Michael Ignatieff appuie cette résolution. Dans son programme, M. Ignatieff, meneur incontesté de cette course, propose d'ailleurs de relancer éventuellement les discussions constitutionnelles afin de reconnaître que le Québec forme une nation. Mais depuis l'adoption de cette résolution, les principaux candidats ont commencé à se chamailler sur la meilleure façon de reconnaître la spécificité du Québec. La semaine dernière, l'ancien premier ministre péquiste du Québec, Bernard Landry, a d'ailleurs salué la démarche de Michael Ignatieff.
La branche d'olivier
En entrevue, hier, M. Lapierre a soutenu que cette résolution constitue une sorte de branche d'olivier que le Parti libéral tend aux Québécois. Et après les résultats désastreux des dernières élections, le parti ne peut se permettre de faire marche arrière.
"Chaque fois que le Parti libéral du Canada a refusé de reconnaître la différence québécoise, ça nous a coûté très cher. À l'époque de la société distincte, le Parti libéral a refusé de reconnaître cela, ça a donné le Bloc québécois", a affirmé M. Lapierre, qui demeure neutre dans cette course.
"Après, il y a eu le référendum de 1995 où encore là, jusqu'à la veille du référendum, M. Chrétien refusait de reconnaître la différence québécoise. Cela a donné un référendum presque perdu. Pour faire oublier la différence québécoise, cela a donné le programme de commandites. Et on connaît les résultats pour le Parti libéral."
M. Lapierre a rappelé que cela fait longtemps que les Québécois souhaitent obtenir une forme de reconnaissance du reste du Canada. "La recherche d'une reconnaissance remonte à très longtemps et à chaque fois on a failli à la tâche. Cette fois-ci, est-ce que le Parti libéral sera à la hauteur de la tâche que lui proposent les militants québécois?" a demandé le bouillant député.
M. Lapierre et d'autres députés libéraux du Québec, tels Lucienne Robillard, Pablo Rodriguez et Denis Coderre, tentent d'expliquer à leurs collègues anglophones les tenants et aboutissants de la résolution adoptée par l'aile québécoise afin d'éviter les malentendus.
Mme Robillard, qui est également neutre dans cette course, a distribué le texte de la résolution à tous ses collègues mercredi dernier. En fin de semaine, l'ancien astronaute Marc Garneau, qui était candidat libéral aux dernières élections, a aussi défendu cette résolution dans une entrevue accordée au réseau CTV. "Nous avons laissé le débat prendre une mauvaise tangente au début, mais nous avons essayé de le réaligner rapidement en montrant la résolution adoptée. Il n'est pas question de rouvrir la constitution demain matin. (...) Mais il faut se rapprocher de l'électorat francophone au Québec", a indiqué Pablo Rodriguez, partisan de Michael Ignatieff.
Travail d'éducation
Certains candidats, dont Gerard Kennedy, Bob Rae et Michael Ignatieff, ont décidé de lancer des discussions informelles afin de tenter de trouver un terrain d'entente sur cette question avant la tenue du congrès, rapportait hier le quotidien Toronto Star. Ils évoquent la possibilité d'amender la résolution sur la nation québécoise au congrès de Montréal pour la rendre plus acceptable. "Tout le monde parle à tout le monde parce qu'il n'y a personne qui veut que cette affaire dérape au congrès. (...) Il y a un travail d'éducation à faire. Il y a un travail de communication à faire. Il ne faut pas tomber dans la partisanerie de leadership dans cette affaire-là. Il faut avoir un débat de fond, pour ou contre la nation québécoise", a affirmé Denis Coderre.


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