Le milieu agricole québécois craint l'uniformisation de ses produits

L'Accord de commerce intérieur et le modèle québécois


Québec - Le secteur agricole québécois craint que la spécificité de ses produits soit passée à la moulinette par l'Accord de commerce intérieur (ACI) renégocié actuellement par les provinces. Les producteurs agricoles redoutent que le projet d'harmonisation des règles de commerce interprovincial, qu'ils ont analysé, permette à des entreprises d'autres provinces de contester des façons de faire au Québec.
Des règles qui déterminent la composition du yogourt, la certification des produits bio ou les mesures permettant le retrait préventif de certains aliments pourraient ainsi être menacées parce qu'elles apparaissent comme des freins au commerce, ont indiqué hier des représentants de l'Union des producteurs agricoles et de la Fédération des producteurs de lait du Québec.
Le président de l'UPA, Christian Lacasse, estime que les ministres canadiens de l'Agriculture, qui reprennent aujourd'hui à Québec les négociations à ce sujet, font actuellement fausse route. «Cette uniformisation viendrait à l'encontre de ce que les consommateurs recherchent, soit des produits qui présentent certaines particularités et spécificités qu'on a ici au Québec, comme il peut aussi y en avoir dans les autres provinces», a déclaré M. Lacasse, lors d'une conférence de presse.
Le président de la FPLQ, Marcel Groleau, a enjoint le ministre québécois de l'Agriculture, Laurent Lessard, à rejeter toute modification qui ne garantirait pas la protection des mesures régissant la composition des aliments ainsi que l'étiquetage, et qui ne favoriserait pas la mise en marché collective ainsi que la gestion de l'offre au Québec.
Selon M. Groleau, le milieu agricole n'est pas contre une harmonisation des règles, mais l'opération doit soutenir des points importants pour les producteurs et les consommateurs. «On ne dit pas que c'est mauvais, on dit qu'il faut que ça soit bien fait», a-t-il déclaré, ajoutant que M. Lessard partage leurs préoccupations.
Par ailleurs, M. Lacasse a dénoncé le manque de transparence entourant les négociations du volet agricole de l'ACI, affirmant qu'aucune consultation officielle n'est prévue pour connaître les impacts d'éventuelles modifications de l'accord, en vigueur depuis 1995. «On demande au gouvernement de la transparence, qu'on ait de l'information, qu'on fournisse des études pour qu'on soit en mesure d'être consultés», a-t-il dit.
En 2004, le Conseil de la fédération, qui regroupe les premiers ministres des provinces, a résolu de modifier certains chapitres de l'ACI, dont celui touchant l'agriculture. Selon l'UPA et la FPLQ, les ministres de l'Agriculture doivent approuver cet automne la version définitive des amendements qui seront apportés à l'entente.
Le bureau de M. Lessard a fait savoir hier que le Québec réclamait des modifications au projet d'harmonisation auquel ont fait référence les représentants du secteur agricole. Son attaché de presse, Frédéric Lagacé, n'a cependant pas voulu préciser quels aspects étaient en cause dans le texte. M. Lagacé a assuré qu'aucune date butoir n'avait été fixée pour les négociations et que les pourparlers se poursuivraient, au besoin, au-delà de la rencontre de cette semaine.
Selon lui, les inquiétudes soulevées par l'UPA et la FPLQ font partie des aspects abordés autour de la table de négociation. «Ailleurs au Canada, les producteurs ont tout intérêt à ce qu'il y ait du lait dans le yogourt, dans le fromage, tout comme nous au Québec, a-t-il dit. On partage les mêmes objectifs entre les provinces canadiennes et les producteurs ailleurs aussi.»
M. Lagacé a estimé que l'intervention de MM. Lacasse et Groleau ne constituait pas une contestation des positions de M. Lessard mais lui avait plutôt apporté un appui. «Ils ne réclamaient pas des choses différentes de celles réclamées par M. Lessard, a-t-il dit. Au contraire, c'est un appui à M. Lessard.»
Les ministres de l'Agriculture du pays sont réunis à Québec depuis hier. Ils participeront notamment au dévoilement, demain, d'un accord déterminant l'aide financière d'Ottawa au secteur agricole.


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