L’Accord de commerce intérieur menace le modèle québécois

«Ça ressemble de plus en plus à un cadeau bien ficelé pour les grandes entreprises au détriment des citoyens et des pouvoirs publics»

L'Accord de commerce intérieur et le modèle québécois

Québec, jeudi 17 juillet 2008 – Les tarifs des CPE, ceux d’Hydro-Québec ou
encore le mode d’indemnisation de la SAAQ pourraient-ils être invoqués
comme éléments de compétition déloyale par d’autres provinces, territoires
ou entreprises dans le cadre d’un accord sur le commerce intérieur tel
qu’il se dessine actuellement derrière des portes closes?
Oui, répondent d’emblée les présidents et présidentes des fédérations du
travail de l’ensemble des provinces canadiennes et des territoires réunis à
Québec en marge du Conseil de la fédération. « On note une forte tendance,
avec un lobby très puissant des entreprises, à la formalisation juridique
d’un accord sur le commerce intérieur, avec un tribunal privé pour le
règlement des litiges et des amendes pouvant aller jusqu’à cinq millions de
dollars.
Le modèle québécois lui-même serait menacé
« Les provinces abdiqueraient ainsi des pouvoirs considérables au profit
d’intérêts strictement privés. Le modèle québécois lui-même serait menacé
par la porte d’en arrière », a fait valoir Michel Arsenault, président de
la FTQ, au nom des autres leaders syndicaux présents.
Puissant lobby de la grande entreprise
Dans une récente lettre au premier ministre Jean Charest, le 10 juillet,
un puissant lobby de banquiers, d’entreprises pétrolières, de chambres de
commerce, de manufacturiers dit comprendre que « (…) les ministres ont fait
consensus sur la mise en place d’un mécanisme de règlement des litiges,
incluant la détermination par un tiers de pénalités monétaires en cas de
non respect de ce règlement »
Rappelons que jusqu’à présent, l’Accord sur le commerce intérieur était un
accord politique basé sur le consensus des parties sans mécanisme formel de
règlement des litiges ou mesures coercitives. Les négociations en cours
changeraient cela et ouvriraient la porte aux entreprises qui voudraient
contester les lois ou la règlementation d’une province ou d’une
municipalité si elles étaient considérées comme des barrières au libre
commerce. On importerait ainsi dans les affaires domestiques canadiennes
ce qui existe actuellement dans l’ALENA et à l’OMC.
Les vrais sujets à discuter
« On a grandement exagéré l’impact des soi-disant barrières au commerce
intérieur, en réalité entre 0,05 % et 0,10 % du PIB, pour tenter de
justifier des mécanismes d’intervention. Dans les faits, il y a beaucoup
plus d’échanges commerciaux entre les provinces qu’avec les États-Unis », a
ajouté Michel Arsenault.
« Il me semble qu’il y a suffisamment de problèmes sérieux comme la crise
de l’emploi dans le secteur manufacturier, l’explosion des coûts de
l’essence et de l’huile, la nécessité de renforcer les transports publics.
Ce sont les vrais sujets qui devraient être abordés par les premiers
ministres et non pas ces discussions sur des façons pour les entreprises de
faire encore plus de profits dans un marché déréglementé », a repris le
président de la FTQ.
Une culture du secret déplorable
Les leaders syndicaux déplorent unanimement la culture du secret qui
entoure ces discussions du Conseil de la fédération sur des enjeux aux
conséquences considérables pour la population et les travailleurs, des
discussions qui pourraient attenter aux principes du fédéralisme et à la
capacité des gouvernements de promulguer des règlements dans l’intérêt
public. Les dirigeants syndicaux en appellent donc à des consultations
publiques sur cette question.


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