Le feu aux poudres

Mais qu'est-ce qui a piqué le directeur général des élections du Canada, Marc Mayrand?

Vote voilé - turbulences dans l'ordre démocratique

Hier, il a annoncé qu'une femme portant le niqab, un voile qui cache entièrement le visage sauf les yeux, peut voter si elle présente deux cartes d'identité. Une décision hautement controversée qu'il nous a balancée en pleine figure, comme ça, à la veille du vote par anticipation qui commence aujourd'hui.
Il n'y a eu ni débat ni discussion. Rien. À peine un petit communiqué chenu qui est tombé en fin de journée.
Le 17 septembre, il y aura trois élections partielles fédérales, dont une dans Outremont, une circonscription multiethnique.
Pourtant le Québec s'est déjà payé un psychodrame avec une histoire de niqab et de vote. C'était en mars, à la veille des élections provinciales. Le directeur général des élections du Québec, Marcel Blanchet, avait décrété que les femmes voilées pouvaient voter.
Le bureau de Me Blanchet avait été inondé d'appels et de courriels indignés. Sur Internet, des gens affirmaient qu'ils se présenteraient dans des bureaux de vote avec un masque.
Pour préserver la «sérénité du processus électoral», Marcel Blanchet avait finalement reculé et interdit le port du niqab. Les libéraux, les péquistes et les adéquistes avaient unanimement appuyé sa décision.
Visiblement, Marc Mayrand n'a pas retenu la leçon. Il était peut-être en voyage intergalactique lorsque la controverse a éclaté.
Le pire, c'est que l'histoire se présente de la même façon. En mars, un journaliste avait posé une question hypothétique au bureau de Marcel Blanchet: une femme voilée peut-elle voter?
Même scénario cette semaine. Mardi, un journaliste de CJAD a appelé au bureau du directeur des élections du Canada. Il n'y avait ni plainte ni demande provenant des musulmans, qu'une simple question de journaliste.
Me Mayrand a rapidement examiné la chose et hier, il a tranché, benoîtement, comme si la question n'avait aucune charge émotive.
Selon les organisations musulmanes, très peu de femmes portent le niqab au Québec. Alors pourquoi cette décision qui arrive comme un cheveu sur la soupe? Le directeur général cherche le trouble? Il n'a pas assez de travail? Il s'ennuie? Si oui, il risque d'être drôlement occupé dans les prochains jours. Il vient de créer une crise de toutes pièces.
Parlons du fond de la question maintenant. Je suis généralement en faveur des accommodements raisonnables. J'étais d'accord avec le port du kirpan à l'école, l'érouv dans Outremont, la souccah sur les balcons des condos. C'est pour vous dire.
Mais le niqab? Non, c'est trop. Tout simplement trop. Le niqab n'est pas un simple bout de tissu. Au contraire. Il nous jette en pleine figure l'inégalité entre les hommes et les femmes et il rappelle la charia, la loi islamique où les femmes sont traitées comme des mineures.
Si des musulmanes veulent se promener dans la rue avec leur niqab, libre à elles, mais les institutions publiques ne doivent pas céder un pouce. Donc pas de niqab à l'école, dans les tribunaux, les bureaux de vote, les aéroports.
Cette controverse autour du niqab arrive à un bien mauvais moment. Lundi soir, la commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables commence ses travaux à Gatineau. Au menu, des audiences où le grand public pourra prendre le micro et dire ce qu'il pense. Il n'y aura aucun filtre. Ça promet. Tout est en place pour des dérapages. Certains risquent d'en profiter pour se vider le coeur et vociférer contre les «maudits» immigrants.
Le feu couve et, avec cette histoire de niqab, le directeur général des élections vient de fournir l'huile.


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