Le duel Bloc-NPD

Élections fédérales - 2011 - le BQ et le Québec



Dernière semaine de campagne.
Dernier droit.
Aussi, la dernière possibilité pour le Bloc québécois de tenter, tout au moins, d'endiguer en partie la montée surprise du NPD au Québec. Et une montée qui déborde les frontières du Québec au point où certains sondages semblent même indiquer une possibilité que le NPD remplace le PLC comme opposition officielle...
Que le populaire chef du NPD, Jack Layton, ait tenu un rallye ce samedi où plus de 1 200 personnes sont venues l'applaudir dans un théâtre situé au coeur même du comté de Gilles Duceppe, en dit aussi très long sur la détermination aussi forte de M. Layton d'«occuper» le terrain au Québec le plus possible.
Oui. Une semaine décisive. Non seulement parce qu'elle est en effet la dernière.
Mais aussi parce que malgré les sondages et justement à cause du caractère soudain de cette montée du NPD, il est également possible qu'une partie de l'électorat québécois ait encore le choix un tantinet volatile. Bref, les sondages sont ce qu'ils sont. Mais lorsqu'il y a rebondissement d'une telle nature, et aussi rapide, seul le soir de l'élection donne le vrai résultat final...


Et donc, ce lundi matin, dans une petite salle de Saint-Lambert, très chaude et remplie de militants bloquistes et où l'on sentait aussi une inquiétude réelle et incontournable dans les circonstances, l'ancien premier ministre Jacques Parizeau s'est joint au chef bloquiste,pour un appel à la mobilisation du vote souverainiste (1).
Mais pas seulement à celui-ci...
De fait, tout au long de son discours, il s'est également adressé aux électeurs nationalistes mais non souverainistes. De même qu'aux électeurs, disons, plus progressistes - souverainistes ou non -, dont une partie semble très tentée par le NPD de Jack Layton.
Bref, s'il a en effet appelé les souverainistes à voter pour le Bloc tout en travaillant à en «convaincre» d'autres autour d'eux de faire de même - ce qui rappelait d'ailleurs ce qui fut surnommé pendant la campagne référendaire de 1995 l'opération «convaincre» -, il a surtout insisté sur le thème plus large de la «défense des intérêts du Québec à Ottawa».
Car ce sont bien là les trois éléments principaux de la base électorale du Bloc - soit les souverainistes, les nationalistes non indépendantistes et les sociaux-démocrates, souverainistes ou non.
Qualifiant aussi de «poudre aux yeux» cette «tentation» de voter NPD, M. Parizeau a procédé à une pédagogie détaillée de certaines promesses du NPD, et même du PLC, lesquelles, par un drôle de hasard, tombent en pleine juridiction provinciale.
Des promesses à caractère plus «social» et qui, par définition, les rend séduisantes à prime abord pour des électeurs inquiets d'une possible majorité conservatrice. Mais des promesses qui, parce qu'elles relèvent en bonne partie de juridictions provinciales, seraient pas mal compliquées à livrer... Autant en santé, qu'en éducation, qu'en gestion des ressources naturelles, etc...
Conséquemment, selon M. Parizeau, il serait nettement plus crédible pour le NPD et le PLC de s'engager plutôt à transférer des points d'impôts au gouvernement du Québec pour l'aider à couvrir les programmes sociaux dont ce dernier est le véritable responsable.
C'est d'ailleurs là, une pédagogie qui aura manqué dans la campagne du Bloc...
Jacques Parizeau a également rappelé, de manière détaillée, le «rôle» du Bloc à Ottawa. J'y reviendrai d'ailleurs dans ma chronique de la semaine (en ligne le mercredi et en kiosque le jeudi).
Maintenant, cette sortie aidera-t-elle ou non le Bloc dans ce tournant crucial de la campagne? La réponse la plus prudente serait sûrement d'attendre le 2 mai au soir.
Mais, en attendant, on a entendu dans les bulletins de lundi soir des commentaires du genre «M. Parizeau ne fait pas l'unanimité» (mais quel chef de parti, passé ou présent, le fait-il?); «qu'il incarne l'aile pure et dure» du mouvement souverainiste; que «quand M. Parizeau sort, on sait que les nationalistes mous vont quitter»; qu'il est «d'une autre époque»; etc., etc....
Des commentaires qui, de toute évidence, sous-estiment le respect dont jouit en fait l'ancien premier ministre au Québec.
Et ce, bien au-delà de ce qu'on aime ici appeler les «purs et durs». Et ce, même chez les plus jeunes.
Et ce, il va sans dire, que les gens partagent ou non sa vision d'un Québec indépendant.
Depuis son départ suite au dernier référendum, il faut avoir vu et entendu cet homme donner moult conférences dans les cégeps et universités pour mesurer avec plus de justesse le respect qu'il a su s'attirer. Autant par la clarté de son propos que sa capacité exceptionnelle de se renouveler et de se documenter de manière continue. Bref, de par sa stature intellectuelle même et tout à fait unique dans la classe politique des dernières années...
Dans n'importe quelle autre société avancée, que l'on en partage ou non toutes les idées, n'importe quel ancien premier ministre ou président d'une telle stature intellectuelle et/ou qui aurait autant contribué à en bâtir certains de ses meilleurs outils de gouvernance, se verrait tout au moins épargner le genre de commentaires dérogatoires qui ne cessent de pleuvoir ici, sur la place publique, dès qu'il se prononce sur un quelconque sujet.
Mais tout ça, c'est une autre histoire. Une autre histoire que l'Histoire - justement celle avec un grand «H» -, saura bien régler un jour avec un peu plus de justice et de recul...
Quant à l'impact que sa sortie aura, ou non, sur les appuis que récoltera le Bloc, le fait est qu'il est très difficile de le prévoir en ce moment.
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Et donc, plus que sept jours de ce qui prend maintenant la forme d'un véritable «duel» politique entre le Bloc et le NPD, entre Gilles Duceppe et Jack Layton..
Même si le Bloc n'en est certes pas à sa première campagne difficile, il reste néanmoins que cette montée surprise du NPD - alors que le PQ a de bonnes chances de former le prochain gouvernement au Québec - fera sûrement de ces prochains sept jours la semaine la plus «longue» de son existence...
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(1) http://www.ruefrontenac.com/nouvelles-generales/politiquefederale/36766-parizeau-bloc-souverainistes
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@ Photo: Graham Hughes, The Canadian Press


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