Depuis plusieurs semaines, les médias ont mis les projecteurs sur les « mensonges » de Martin Dumont, ces derniers allant de soi pour de nombreux de nos journalistes et reporters.
Son retour devant la Commission Charbonneau, les 21 et 22 janvier derniers, a été l’occasion pour son avocate, Me Suzanne Gagné, d’attirer l’attention sur un point, jusqu’alors passé inaperçu, celui des interrogatoires des enquêteurs. Elle a mis en cause les méthodes utilisées et, dans le cas de son client, les a qualifiées d’atteintes aux droits fondamentaux de la personne.
Le bref interrogatoire, fait à l’enquêteur Robert Pigeon, a vite mis en évidence que les procédés, utilisés par ce dernier pour obtenir les aveux écrits de Martin Dumont, n’étaient pas conformes aux procédures de respect des droits fondamentaux de la personne. L’usage de menaces, de mensonges, de harcèlements psychologiques pour obtenir de tels aveux ne pouvait être passé sous silence et Me Suzanne Gagné était bien déterminée à en faire la démonstration.
Cette mise en lumière de procédés inacceptables, en droit, pour obtenir des aveux a de quoi soulever de nombreuses interrogations sur ce qui se passe derrière les murs de notre société civilisée, vêtue de la Charte des droits de la personne. Nous réalisons tout d’un coup que certains procédés d’interrogatoire, nous scandalisant tellement chez les autres, peuvent se retrouver dans notre propre maison.
Je pense que la Commission Charbonneau a bien vu le panier de crabes qui s’ouvrirait encore davantage si elle n’intervenait pas pour convaincre Me Suzanne Gagné de mettre un terme à sa démarche. Pour y arriver, il fallait qu’elle reconnaisse que les aveux obtenus de Martin Dumont, dans le cadre de l’interrogatoire des enquêteurs, étaient inadmissibles en preuve et, du fait même, qu’ils seraient retirés du dossier de la Commission.
Voici la déclaration de Me Suzanne Gagné, suite à cette entente.
Déclaration de Me Suzanne Gagné au sujet de la renonciation des procureurs de la CEIC à mettre en preuve la déclaration vidéo de Martin Dumont
MONTRÉAL, le 23 janv. 2013 /CNW Telbec/ - Monsieur Dumont soutient que sa déclaration vidéo du 11 décembre 2012 a été obtenue de lui par des moyens et dans des circonstances qui portent atteinte à ses droits fondamentaux et qui en réduisent la fiabilité.
Il a déposé une demande devant la Cour supérieure du Québec dans le but ultime que cette déclaration ne soit pas admise en preuve devant la Commission.
Le procureur de la Commission ayant décidé de renoncer à mettre en preuve cette déclaration, les procédures entreprises devant la Cour supérieure n'ont plus leur raison d'être et monsieur Dumont y met fin.
Pour des raisons qui tiennent au caractère public des audiences de la Commission, cette déclaration vidéo a malheureusement été diffusée lors de l'audience de lundi et reprise dans tous les médias du Québec. Cela a causé un tort considérable à la réputation de monsieur Dumont, à sa vie personnelle et professionnelle et à sa santé.
Par ailleurs, monsieur Dumont se présentera demain devant les commissaires pour répondre à leurs questions et à celles des parties intéressées. Quant à sa déclaration vidéo du 11 décembre 2012, il faut retenir qu'elle ne fait pas partie de la preuve devant la Commission.
SOURCE : Affaire Martin Dumont
Renseignements :
Luc Tremblay
CONCLUSION
Quelques heures avant ce règlement hors Cour, j’avais écrit sur ce litige un texte toujours disponible sur mon site internet : http://humanisme.blogspot.ca/2013/01/commission-denquete-charbonneau.html
Je pense que toute société doit avoir un œil attentif sur les comportements de ceux et celles qui ont des fonctions de pouvoir, surtout si ce pouvoir est exercé derrière des portes closes.
À ce titre, je me demande si l’enquêteur Robert Pigeon, auteur de la mise en scène de ces aveux, a toujours la crédibilité nécessaire pour continuer comme enquêteur auprès de la Commission Charbonneau.
Quant à la crédibilité de Martin Dumont, la suite de son témoignage nous en dira plus long.
Oscar Fortin
Québec, le 24 janvier 2013
http://humanisme.blogspot.com
Si le témoin se doit de dire la vérité
Le cas Martin Dumont
L'enquêteur ne peut la lui dicter
Tribune libre
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Formation en Science Politique et en théologie. Expérience de travail en relations et coopération internationales ainsi que dans les milieux populaires. Actuellement retraité et sans cesse interpellé par tout ce qui peut rendre nos sociétés plus humaines.
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2 commentaires
Oscar Fortin Répondre
24 janvier 2013@Pierre Cloutier : Merci pour votre intervention et l'information juridique que vous y apportée. En écoutant ce matin les interrogatoires à la commission j'ai aussitôt perçu un changement de ton de la part des commissaires et des procureurs à l'endroit de Martin Dumont. Il faut dire que Me Suzanne Gagné était présente et que cette présence, à elle seule, assurait un déroulement normal et respectueux du témoin et des procédures. Nous n'en étions plus au ton élevé et agressif du procureur de la commission dans son interrogatoire de Martin Dumont le 22 janvier. Je pense également que la commission a pris bonne note que les enquêteurs doivent s'astreindre à une disciple de droit et de respect.
N'empêche que la réputation de Martin Dumont y a goûté avec la publication de cette vidéo.
Archives de Vigile Répondre
24 janvier 2013Dans un cas comme celui-là, même si la commission d'enquête est maître de la procédure et du mode de preuve, elle ne peut passer sous silence sans se discréditer l'article 24 (2) de la Charte canadienne des droits et libertés qui se lit comme suit :
"Lorsque dans une instance visée au paragraphe 1, le tribunal a conclu que des éléments de preuve ont été obtenus dans des conditions qui portent atteinte aux droits ou libertés garantis par la présente charte, ces éléments de preuve sont écartés s'il est établi, eu égard aux circonstances, que leur utilisation est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice".
Il y a une abondante jurisprudence en matière criminelle qui balise sévèrement les interrogatoires policiers, notamment le fait que les déclarations faites aux policiers doivent être libres et volontaires et exemptes de toutes formes de menaces et de promesses.
À mon avis, la commissaire Charbonneau s'est comportée de manière autoritaire et abusive dans cet épisode en rudoyant injustement l'avocate de Martin Dumont.
C'est pour cela que les procureurs de la commission ont jugé bon de s'entendre avec Me Gagné et de mettre fin à l'incident, car cet épisode mettait en danger la réputation de la commission.
Pierre Cloutier ll.m
avocat à la retraite