Un véritable ressac populiste menace la zone de confort de la classe politique québécoise

Le Beppe Grillo de la Côte-Nord

Bernard «Rambo» Gauthier

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Chronique de Patrice-Hans Perrier

Bernard «Rambo» Gauthier, coloré représentant syndical, profite de la vague populiste qui secoue l’occident pour venir battre les cartes du monde sclérosé de la politique québécoise. Il est savoureux de lire les commentaires apeurés de certains analystes qui laissent entendre que ce «Beppe Grillo» de la Côte-Nord n’aurait pas sa place sur l’échiquier de la politique, une activité «sérieuse» en définitive. Qu’il nous soit permis d’interroger le sérieux d’une activité qui s’apparente, de plus en plus, à un art de la figuration consistant à berner les citoyens. Puisque les véritables décisions sont prises par les metteurs-en-scène de la sphère financière.

La Côte-Nord, à l’instar de plusieurs régions éloignées des grands centres urbains, est menacée de se vider de son sang à brève échéance. Dans un contexte où les activités minières éprouvent de graves difficultés – réalité que semble ignorer une classe politique obsédée par son hypothétique «Plan Nord» – le taux de suicides explose depuis 2015 dans cette région livrée à elle-même. Comble de l’aberration, certains traités de libre-échange permettent aux entreprises étrangères d’importer leur propre main-d’œuvre, laissant les autochtones (toutes origines ethniques confondues) à leur triste sort. Le déferlement de cette main-d’œuvre étrangère génère une pression à la baisse sur les salaires. Nous en avons pour preuve l’entente qui fait en sorte que des femmes de ménages provenant des Philippines aient, déjà, été employées sur les chantiers de La Romaine moyennant des émoluments bien en-deçà du salaire minimum.

La mondialisation menace la survie des régions

Dans un contexte où les citoyens des régions éloignées ne veulent plus être taillables et corvéables à merci, il est manifeste que la marmite risque de déborder, une fois pour toute. Bernard Gauthier vient d’annoncer qu’il se lance en politique avec l’espoir de faire élire une poignée de «dissidents» de la Côte-Nord et, chemin faisant, souhaite brasser la cage d’une Assemblée nationale qui semble avoir été prise en otage par les grands centres urbains. Maniant un langage «brut de décoffrage», voir ordurier, celui qui a déjà témoigné devant la Commission Charbonneau sur l’industrie de la construction ne décolère plus face à une classe politique totalement soumises aux dictats des ententes transfrontalières.

Un chien dans un jeu de quilles

Certains sondages, au moment de soumettre notre billet, indiquent que le principal intéressé obtiendrait près d’un quart des suffrages si des élections avaient lieu aujourd’hui-même. Il s’agit d’un phénomène para-politique jamais vu de mémoire d’homme et un nombre croissant de citoyens de la Côte-Nord n’hésitent pas à comparer Gauthier avec le très charismatique Michel Chartrand, un autre syndicaliste qui était venu foutre la merde dans le paysage politique des années 1960-70. Malheureusement, l’action citoyenne de Chartrand n’aura pas réussi à véritablement chambarder les us et coutumes d’une classe politique rompue dans l’art de manipuler les électeurs. Il est à espérer que Bernard Gauthier ne subisse point un revers de fortune du même acabit. Puisque, plus souvent qu’autrement, les «électrons libres» finissent par être confinés à la marge d’un système qui s’apparente à une implacable centrifugeuse.

Quoi qu’il en soit, nous sommes en présence d’un nouveau phénomène politique qui pourrait bien être beaucoup plus qu’un simple canular médiatique. En effet, Bernard Gauthier semble disposer d’un solide appui dans son milieu d’ancrage et ses irrévérencieux coups de gueule accusent, principalement, les traités et autres manigances politiciennes qui font en sorte de dépouiller les citoyens de tout ce qui servait à les protéger face à la mondialisation galopante. Bernard Gauthier et sa cohorte de supporters montrent le chemin à suivre aux citoyens des autres régions qui se sentent, eux-aussi, laissés pour compte.

L’émergence d’un mouvement citoyen

Les classes populaires n’en peuvent plus à l’heure où les grands partis se préoccupent, surtout, de ménager la chèvre et le chou. Nos politiciens ont, manifestement, laissé tomber leurs électeurs puisqu’ils refusent de porter la question identitaire jusqu’à son terme. La question de l’identité, bien au-delà des sphères symbolique ou culturelle, recoupe tout ce qui a trait aux frontières, à l’immigration et à la régulation des activités économiques sur un territoire donné. C’est ici que l’on débusque la duplicité de notre classe politique, toutes tendances confondues, et que l’on prend conscience que rien n’est entrepris pour que soit protégé le peuple dans son plus simple appareil.

C’est ce que Bernard Gauthier nous rappelle, sans faire attention aux précautions d’usage, en martelant qu’il faudra bien «botter le cul» des politiciens qui n’ont rien à foutre de la survie de nos régions. Tels des prédateurs, sans âme, les financiers veulent un retour sur l’investissement à n’importe lequel prix et ils peuvent compter sur une classe politique disposée à liquider tout ce qui permettait aux petites communautés de résister à cette mondialisation sauvage qui ne fait pas de quartier. Il est à espérer que d’autres francs-tireurs, à l’instar de Gauthier, se fassent élire pour venir perturber la torpeur d’une Assemblée nationale que l’on pourrait qualifier, sans exagération, d’avant-poste des puissances coloniales aux aguets. Toujours désireuses de se tailler la part du lion au pays des brebis soumises. Ce pays du Québec dont nous avons oublié jusqu’au nom.

Patrice-Hans Perrier

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Patrice-Hans Perrier est un journaliste indépendant qui s’est penché sur les Affaires municipales et le développement urbain durant une bonne quinzaine d’années. De fil en aiguille, il a acquis une maîtrise fine de l’analyse critique et un style littéraire qui se bonifie avec le temps. Disciple des penseurs de la lucidité – à l’instar des Guy Debord ou Hannah Arendt – Perrier se passionne pour l’éthique et tout ce qui concerne la culture étudiée de manière non-réductionniste. Dénonçant le marxisme culturel et ses avatars, Patrice-Hans Perrier s’attaque à produire une critique qui ambitionne de stimuler la pensée critique de ses lecteurs. Passant du journalisme à l’analyse critique, l’auteur québécois fourbit ses armes avant de passer au genre littéraire. De nouvelles avenues s’ouvriront bientôt et, d’ici là, vous pouvez le retrouver sur son propre site : patricehansperrier.wordpress.com





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9 commentaires

  • Pierre Grandchamp Répondre

    2 février 2017

    Salaire de Rambo 108, 000$. Il fait partie de l'élite qu'il décrie!

  • Carl Monty Répondre

    18 décembre 2016

    @ François Ricard,
    D'accord avec vous sur le principe, par contre vous devriez peut-être regarder un peu plus le programme des sans-partis, future citoyen au pouvoir car les faits que vous évoquez dans votre commentaire sont aborder, ligne de parti, béni oui-oui, nomination par et pour l'élite etc... Effectivement milles Bernard Gauthier ne changeront rien à rien, par contre un seul avec le soutien de tout un peuple prêt à sortir de sa zone de confort pour léguer en héritage un système plus vrai. Pas grand chose peu résister à un tel tsunami politique.
    Bien à vous!

  • François Ricard Répondre

    18 décembre 2016

    Bernard Gauthier, mille Bernard Gauthier ne pourront faire quoi que ce soit en notre pseudo-démocratie.
    Tous nos élus doivent nécessairement dir comme le chef, agir comme le chef et approuver toutes les décisions du chef.
    Avec l'appui de ces béni-oui-oui élus, le chef dirige le législatif de main de maître.
    De plus, il nomme et dégomme les ministres. Il nomme et dégomme les hauts fonctionnaires de l'état. Un plein contrôle sur l'exécutif.
    Il nomme les juges. Les chefs de l'UPAC et de la SQ. Il exerce une influence énorme sur le judiciaire.
    C'est le système qui est tout faux. Et personne ne le voit.

  • Yves Corbeil Répondre

    18 décembre 2016

    Et si chaque circonscription élisait celui ou celle qui les représenteraient vraiment à Québec, pas des parachutés chien, chien qui suivent la ligne de parti après l'élection.
    Non des gens qui feraient fonctionné la démocratie comme elle devrait fonctionné. Une démocratie représentative, participative mener par des gens qui sont aux services de ceux qui les ont élus pas aux services d'un parti qui sert de couverture à ceux qui opèrent dans l'ombre.
    Un Libéral honnête, un Péquiste honnête, un Caquiste honnête, un Solidaire honnête et finalement une bande de personnes honnête qui veulent vraiment faire fonctionner la démocratie. On jase là, mais ça se peux-tu ça.

  • Jean Lespérance Répondre

    17 décembre 2016

    M. Carl Monty,
    Je ne sais pas au juste ce que vous entendez par démocratie directe mais je sais ce qu'est la démocratie. Et ce dont nous vivons n'a rien à voir avec la démocratie. Le jeu de Trudeau consiste à nous faire croire que la démocratie s'exerce au moment du vote alors qu'il n'en est rien. Comme on dit, c'est après le vote que ça se gâte, un peu comme au PQ lorsqu'on choisit un chef, le sieur chef travaille contre nos intérêts. Trouvez-moi un chef qui va parler des référendums d'initiatives populaires? Trouvez-moi s'en un qui en a parlé? Rien qu'un. La vraie démocratie, c'est lorsque le peuple a le pouvoir de faire autre chose que de manifester son mécontentement dans la rue. Tous les satanés accords, traités de traîtres qui font de nous des machine-outils de l'Union Europaïenne, quand allons-nous avoir un chef au PQ qui va en parler? Tout ce que ce chef de mes deux fesses a à nous proposer est un statut de colonisé. Qui nous divise Mme Otis? Ce n'est pas Trudeau, c'est notre tête de turc, aussi fiable qu'Erdogan. Vous ne savez jamais ce qui lui trotte derrière la tête. Rambo n'est pas un grand penseur, mais quand il dit quelque chose, son discours est cohérent et on sait qu'il est sincère. Quand nous aurons un vrai chef qui va demander des référendums d'initiatives populaires avec un droit "d'impeachment" et le droit de foutre dehors tout député indigne ou commissaire ou chef de ci et de ça, on pourra croire en sa sincérité. Des Trump et des Rambo, des gens sincères, pas des carriéristes qui travaillent uniquement pour avoir une pension, c'est ça que ça nous prend. Après Parizeau, le PQ n'a jamais eu un vrai souverainiste, On est encore pogné avec quelqu'un qui travaille contre nos intérêts, y a pas de quoi avoir la nausée? Je m'arrête là. sinon je vais sacrer.

  • Archives de Vigile Répondre

    17 décembre 2016

    M. Perrier,
    Vous décrivez bien la situation économique actuelle des régions. Mais Est-ce que
    souhaiter l'implantation
    du Parti Citoyens dans plusieurs régions va être une
    bonne chose? On est sûr qu'il fera réélire le PLQ. C'est ce que vous souhaitez?
    Vous parlez des partis dominants sans faire référence au PLQ qui domine le paysage politique québécois depuis 15 ans et qui a coupé partout dans les régions. Et M. Chartrand a fait de grandes choses. Vous n'en parlez pas sauf pour dire qu'il n'a pas réussi sa mission. Mais imaginez si ce grand homme n'avait pas été là? La solution n'est pas de proposer la division de l'opposition actuelle mais la renforcer pour qu'elle batte le PLQ. Rien de moins.

  • Archives de Vigile Répondre

    17 décembre 2016

    Je suis démoralisée de lire M. Jean L'Espérance.
    Quelle indéendance poursuit-il avec un tel jugement. Diviser pour régner était le
    principe de Tudeau. Il nous a bien eus tous. Arrêtez ce réflexe de colonisé s.v.p.
    monsieur! Soyez plus stratégique et moins politicailleux.

  • Carl Monty Répondre

    17 décembre 2016

    @ l'auteur,
    Belle analyse, mais le seul bémol est que suggéré dans votre texte que Bernard Gauthier fonde quelque chose, c'est faux. Il s'associe à un mouvement politique qui existe depuis 2012 dans les dossiers du directeur générale des élections, c'est une nuance que je tient à préciser.
    @ M. L'espérance, depuis 2012 quelques cerveaux sont à l’œuvre pour présenté les prémisses d'une démocratie directe, ce qui est hors norme politiquement parlant.
    Le mouvement des électeurs que vous décrivez est plus que probable et j’ajouterai celui des immigrés dont la plupart sont d'honnêtes travailleurs. Si l'équipe de M. Gauthier à basé l'élaboration de la démocratie directe sur certaines réalités humaines, les libéraux ne retrouverons plus que quelques votes des gens soutenant la philosophie libéral, l'honnêteté des immigrants en moins.
    Entendons nous bien, une pseudo démocratie ne peu qu'engendrer une pseudo laïcité, l'islam et autres religions ne sont pas le pire ennemis de nos droits et libertés. Tout au plus une dérive intellectuelle pour nous éloigner des véritables enjeux et de véritables débats constructifs pour notre société.

  • Jean Lespérance Répondre

    17 décembre 2016

    Si Rambo Gauthier était appuyé par un penseur, il pourrait faire un méchant ravage. On ne sait jamais, un miracle pourrait arriver. Avec un coéquipier qui s'occupe des gens de la ville et lui des régions, il n'aurait aucune difficulté à dépasser QS et à être sur un pied d'égalité avec la CAQ.
    Les partis de carriéristes, les gens en ont ras-le-bol. Il est capable de ravir des votes au PQ. Comme le PQ me donne la nausée, tout brasseur de cages qui arrive dans le décor est bienvenu.