Hausse des frais de scolarité

Le 1% de trop

Chronique de Pierre Gouin

On parle ici d’une question de principe. Une hausse de 45$ ou 70$ par année des frais de scolarité, plutôt qu’un gel, ce n’est pas financièrement significatif pour la très grande majorité des étudiants. Une hausse de 2% ou de 3%, plutôt qu’un gel, ça n’a pas vraiment d’impact sur les finances publiques du Québec.
C’est l’indexation basée sur l’indice des prix à la consommation qui est très généralement utilisée par les gouvernements pour que la valeur réelle des prestations aux citoyens ne diminue pas dans le temps et il en est de même, je suppose, pour les prêts et bourses aux étudiants. Cet indice a progressé en moyenne de 1,9% par année au Québec depuis l’an 2000 et de 2,0% en 2012. Pourquoi alors avoir retenu pour les frais de scolarité une indexation à 3%, qui correspondrait à la croissance du revenu familial?
J’ai écrit récemment sur Vigile que le gouvernement ne devrait pas accepter un gel des frais de scolarité. C’était une question de principe : pourquoi annoncer un gel des frais, et ainsi une démarche vers la gratuité, en même temps que l’on déplore, avec raison, la gestion catastrophique des finances publiques par le gouvernement libéral ainsi que les contraintes que pose le fait que la moitié de nos impôts soient versés à Ottawa? Il y avait là d’ailleurs une occasion de rappeler que la qualité des services et le bien-être des citoyens ne pèsent pas lourd pour le fédéral qui préfère acheter du matériel militaire, qui subventionne généreusement l’économie d’autres provinces, qui empiètent sur nos compétences, qui nous crée des bénéficiaires de l’aide sociale en coupant dans son assurance-chômage, qui construit un pont fédéral que nous allons payer nous-mêmes, etc.
La décision du gouvernement de hausser de 3% par année les frais de scolarité, plutôt que d’opter pour la position neutre qu’est l’indexation au coût de la vie, reflète aussi une question de principe et elle projette une image qui me consterne. Sur le plan idéologique, le gouvernement ne se distingue pas ainsi du gouvernement Charest en s’appuyant sur des concepts de juste part et d’utilisateur payeur. Si les chantiers en arrivent à la conclusion que les universités ont raison quant à leurs besoins de financement, ce qui voudra dire que l’on a évité les discussions et les remises en question fondamentales, la juste part pourra se traduire par des hausses futures de 5% par année.
Si cette décision m’apparaît clairement comme un message qu’on a voulu faire passer quant à la conformité du gouvernement aux principes néo libéraux c’est qu’elle ne peut pas, cette fois, être justifiée par la situation budgétaire, en raison de l’insignifiance des montants en cause, ni par le fait que le gouvernement soit minoritaire. Je ne suis pas surpris que Mme Marois ait de la difficulté à s’opposer aux pressions néo libérales mais j’espérais que les ministres et députés ayant de plus solides convictions sociales démocrates sauraient mieux encadrer la première ministre. Dans le cas présent il n’est peut-être pas trop tard.
Un autre test important se dessine alors qu’il y aura des discussions sur la question des redevances et autres contributions fiscales des entreprises minières. J’espère qu’au moment de prendre des décisions certains ministres seront prêts à mettre le poing sur la table.


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2 commentaires

  • Pierre Gouin Répondre

    28 février 2013

    @ M. Poulin
    Avec le Parti québécois au pouvoir, les indécis dans la population et à l'intérieur du parti, sont mieux en mesure de juger de quel bois il se chauffe. De plus, si le PQ n'était pas au pouvoir actuellement on serait pris avec le PLQ ou la CAQ.
    Je souscris entièrement à votre liste de griefs.

  • Raymond Poulin Répondre

    27 février 2013

    Ceux qui auraient pu encadrer la Première ministre ne sont plus députés du Parti québécois, et ils n’y sont plus, entre autres, parce qu’elle ne semble écouter personne. Même minoritaire, un parti peut se permettre de faire bouger les lignes, surtout lorsque ses adversaires, pour un bon moment, ne sont pas en mesure, financièrement, de renverser le gouvernement. Par le1% supplémentaire, Mme Marois surfe sur l’opposition majoritaire de la population au gel, ce qui lui permet de faire de l’électoralisme à bon compte tout en montrant qui est le boss et en faisant un clin d’oeil à l’oligarchie.
    Je commencerai à croire le contraire lorsque, pour le moins, elle taxera les surprofits des banques et réévaluera à la hausse les redevances sur les richesses naturelles, tout en appliquant la loi 101 aux cégeps, en abolissant l’immersion en anglais en 6e année du primaire et en transformant l’école secondaire en autre chose qu’une maternelle pour adolescents. Cela dit, nous n’en serons pas encore à ladite et supposée gouvernance souverainiste, mais c’est une autre histoire. À défaut, nous aurions au moins un gouvernement différent du précédent et soucieux du bien public.